TAF, stop ou encore ?

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Pour les besoins de cette étude, les investigateurs suisses ont recruté 6.555 participants au sein de la vaste cohorte Swiss HIV Cohort Study. L'âge médian des participants était de 54 ans, 24,3% étaient des femmes, 13,3% étaient de race africaine et 95,1% présentaient une charge virale indétectable lors de la visite d'inclusion. Le poids moyen était de 76kg et 50,2% étaient en surpoids ou obèses. Des 6.555 participants, 5.485 (83,7%) ont continué le TAF jusqu'à la fin de l'étude, et 1.070 (16,3%) sont passés à un régime sans TAF. Parmi les personnes ayant arrêté le TAF, 196 (18,3%) participants ont initié un traitement antirétroviral contenant du TDF, 565 (52,8%) sont passés à 3TC/DTG, 115 (10,7%) ont commencé un traitement CAB/RPV à action prolongée et 194 (18,1%) sont passés à d'autres combinaisons d'antirétroviraux ne comportant pas de TAF. Parmi les personnes qui sont passées du TAF au TDF, les combinaisons les plus couramment utilisés étaient la doravirine/TDF/3TC (n = 642, 60,1%) et RPV/TDF/FTC (n = 147, 13,8%). Comparativement aux personnes ayant continué TAF, celles ayant arrêté étaient plus jeunes, avaient reçu un traitement antirétroviral pendant une durée plus courte, étaient plus susceptibles d'être en surpoids ou obèses et étaient moins susceptibles d'être diabétiques ou d'avoir des antécédents de maladie cardiovasculaire. De plus, les taux de cholestérol total et de LDL étaient légèrement plus élevés chez les personnes ayant arrêté le TAF que chez celles l'ayant continué, tandis que les ratios cholestérol total/HDL étaient similaires dans les deux groupes. Le suivi médian était de 1,3 an pour les personnes ayant continué le TAF et de 1,2 an pour celles ayant arrêté le TAF. Dans l'ensemble, l'arrêt du TAF et le passage vers une autre combinaison d'antirétroviraux, quelle qu'elle soit, a entraîné une perte de poids corporel de 0,540kg en moyenne sur la période de suivi de l'étude. Mais le plus intéressant vient des résultats de l'analyse stratifiée. En cas de passage du TAF vers le TDF, la perte moyenne de poids corporel est 1,840kg, et on note aussi une diminution du cholestérol total et des triglycérides après 12 mois de suivi. Le passage d'un traitement comportant TAF vers DTG/3TC (-0,170kg) ou CAB/RPV à longue durée d'action (-0,640kg) ne modifie pas fondamentalement le poids corporel sur la durée de suivi d'un an. Le remplacement du TAF par du TDF chez les patients vivant avec le VIH a entraîné une diminution du poids corporel, alors que le passage à d'autres schémas thérapeutiques courants sans TAF tels que DTG/3TC ou CAB/RPV n'a pas entraîné de changements de poids substantiels. Ces résultats nous fournissent des données intéressantes pour guider la prise de décision lors de discussions avec des patients présentant un surpoids ou une obésité induit par leur traitement antirétroviral. Les avantages potentiels du remplacement du TAF par du TDF sur le plan du poids et du métabolisme lipidique doivent cependant être mis en balance avec le profil de sécurité du TAF, lequel comprend des améliorations de la fonction rénale chez les personnes atteintes d'une maladie rénale chronique et des taux plus faibles de déminéralisation osseuse. D'autres études sont donc nécessaires pour évaluer si ces changements de poids se maintiennent dans le temps et s'ils auront un impact quelconque sur l'incidence des comorbidités cardiaques et métaboliques liées au poids chez les patients vivant avec le VIH. Réf : Damas J. et al. Clinical Infectious Diseases, Vol 79(4); 990-998, 15/10/2024. DOI: 10.1093/cid/ciae189