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Bien que les taux des infections par le VIH contracté en période périnatale soient en baisse depuis plusieurs décennies dans le monde, on estime qu'environ 2,5 millions d'enfants et d'adolescents vivaient avec le VIH en 2022, dont 90 % en Afrique et la plupart avec une infection contractée durant la gestation.Lorsque ces jeunes séropositifs atteignent la vingtaine, ils peuvent avoir suivi un traitement antirétroviral depuis deux décennies et avoir été exposés à des antirétroviraux plus anciens et plus toxiques. Les troubles métaboliques provoqués par le traitement antirétroviral tels qu'un taux de cholestérol ou de triglycérides trop élevé et un diabète de type 2 peuvent se développer avant l'âge adulte, bien avant que ces affections ne soient susceptibles d'apparaître dans la population générale. La North American AIDS Cohort Collaboration a évalué, entre 2000 et 2019, l'incidence des facteurs de risque qui contribuent au développement de maladies cardiovasculaires auprès de 375 sujets jeunes âgés de 18 à 30 ans, porteurs du virus du VIH contracté durant la période périnatale. L'âge médian, au moment de l'inclusion, était de 22 ans, et les participants ont été suivis pendant une durée moyenne de trois ans. La plupart des participants étaient sous traitement par un inhibiteur de protéase (54 %) ou un inhibiteur d'intégrase (39 %).Présentés dans le cadre de l'édition 2024 de la CROI à Denver et juste publiés dans la revue AIDS, les résultats montrent qu'à l'âge de 30 ans, 19 % des participants avaient développé un diabète de type 2, 40 % présentaient un taux de cholestérol élevé, 50 % avaient un taux élevé de triglycérides, 22 % souffraient d'HTA et 25 % avaient déjà développé une maladie rénale chronique.Le diabète de type 2 était trois à six fois plus élevé que chez les jeunes adultes séronégatifs et chez les personnes âgées séropositives. L'incidence de l'hypertension artérielle était de 50 % plus élevée que chez les jeunes adultes non infectés par le VIH. La prévalence de l'insuffisance rénale chronique chez les jeunes séropositifs était quatre fois plus élevée que chez les personnes plus âgées séropositives. Les investigateurs n'ont cependant pas constaté de taux plus élevés d'événements cardiovasculaires (crises cardiaques et AVC) chez les jeunes séropositifs à la naissance. Cependant, le taux élevé de troubles métaboliques constatés constitue un signe précurseur indiquant qu'ils courent un risque plus élevé de développer ces événements cardiovasculaires. Face à ce constat, quels sont les meilleurs marqueurs pour surveiller la santé cardiovasculaire des sujets jeunes atteints du VIH contracté en période périnatale ? Le cholestérol et les triglycérides fournissent-ils suffisamment d'informations pour identifier les jeunes présentant un risque plus élevé de maladie cardiaque et de diabète ? Dans leur conclusion lors de la présentation de l'étude à Denver, les investigateurs ont listé plusieurs mesures susceptibles de fournir davantage d'informations aux praticiens. Ainsi, les petites différences dans l'épaisseur de l'intima média de la carotide entre les jeunes avec et sans VIH dans les études réalisées à ce jour ne doivent pas être écartées. Elles montrent, en effet, que même une différence de 0,1 mm est associée à un risque accru de 15 à 18 % de crise cardiaque ou d'AVC. Autre piste avec l'IRM cardiaque qui peut révéler des signes précoces de fibrose chez des jeunes séropositifs sous traitement antirétroviral. La fibrose du tissu cardiaque constitue un signe de souffrance et peut, éventuellement, entraîner des problèmes tels qu'une insuffisance cardiaque ou une arythmie même si aucun symptôme n'est détectable au moment de la réalisation de l'IRM.Un dernier point concerne le recours aux statines comme outil de prévention, l'étude REPRIEVE ayant démontré qu'un traitement préventif par statines réduisait les événements cardiovasculaires chez les personnes vivant avec le VIH. Toutefois, seules les personnes de plus de 40 ans ont participé à l'étude. Cela signifie que les directives actuelles ne recommandent pas encore les statines à titre préventif pour les personnes séropositives de moins de 40 ans. Des recherches supplémentaires sont donc nécessaires pour voir si les statines seraient utiles pour protéger le coeur des jeunes personnes séropositives.Réf : Haw, NJL et al. AIDS ():10.1097/QAD.0000000000003892, March 19, 2024. | DOI: 10.1097/QAD.0000000000003892