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Les mesures déployées contre la propagation du SRAS-CoV-2 se sont avérées beaucoup plus efficaces pour prévenir la grippe. Durant la saison 2020-2021, il n'y avait même pas de grippe et l'une des quatre souches de grippe, la lignée B/Yamagata, s'est définitivement éteinte. "Nous avons appris que la grippe n'a aucune chance dans les situations de confinement, mais le coût social est trop élevé", constate le virologue Marc Van Ranst. "Comme il n'y a pas eu de grandes épidémies de grippe ces dernières années, les gens risquent maintenant de sous-estimer le virus de la grippe. Il y a également une lassitude générale vis-à-vis de la vaccination, typique après une pandémie. Mais cette épidémie de grippe arrive, et pour les groupes à haut risque, elle peut être mortelle." "Le fait que les indications du vaccin antigrippal et du vaccin contre le covid-19 se chevauchent est suffisamment connu à l'heure actuelle", relève le Pr Van Ranst. "Nous pouvons donc nous faciliter la tâche et combiner les vaccinations: une injection dans chaque bras. [1] Il est également possible de retarder quelque peu la vaccination contre la grippe. En effet, le covid-19 se manifeste en moyenne un peu plus tôt que la grippe, même si ce timing reste incertain. Quoi qu'il en soit, les deux vaccins sont aussi importants l'un que l'autre", souligne-t-il. "Certaines personnes pensent qu'elles doivent faire un choix ou veulent attendre que la grippe soit présente dans le pays pour se faire vacciner contre celle-ci. Ce n'est pas une bonne stratégie." L'organisation des vaccinations se déroule généralement sans problème. Les médecins généralistes organisent des journées de vaccination ouvertes, les vaccins sont administrés gratuitement dans les hôpitaux ou les entreprises et, depuis cette année, les pharmaciens formés seront également autorisés à participer à la vaccination. "Ces solutions à bas seuil fonctionnent. L'approche idéale dans une ville n'est pas la même qu'à la campagne, mais personne n'y répond mieux que les soins de santé de première ligne au niveau local", se félicite Marc Van Ranst. "La couverture vaccinale contre la grippe est également bonne en Belgique, même si on peut toujours mieux faire. Les personnes âgées sont généralement bien protégées, mais les jeunes - les jeunes diabétiques, par exemple - mériteraient un peu plus d'attention." Ces dernières années, le vaccin antigrippal a gagné en efficacité à chaque fois. "Le vaccin quadrivalent a constitué un net progrès par rapport au trivalent, et le vaccin antigrippal à haute dose, qui contient quatre fois plus d'hémagglutinine par souche virale et qui est recommandé pour les personnes âgées et les personnes ayant des problèmes d'immunité, présente une efficacité de 25% supérieure. Ces vaccins hautement dosés sont disponibles, mais les règles de remboursement font encore l'objet de discussions. En tout état de cause, je vaccine mes parents avec ce vaccin", confie le Pr Van Ranst. Bien entendu, la communauté médicale espère que la réponse immunitaire aux vaccins antigrippaux fera un bond en avant. Une chose que les vaccins à ARNm pourraient rendre possible dans un avenir proche. "Ils présentent un double avantage. D'une part, les vaccins à ARNm peuvent être développés plus rapidement, ce qui laisse plus de temps pour en déterminer la composition. Aujourd'hui, il faut prévoir dès la fin février ce qui se passera l'année suivante. À cette date, l'épidémie de grippe n'est même pas encore à mi-chemin dans une grande partie du monde. Avec un mois et demi de plus, nous aurons une meilleure idée des souches de la prochaine saison. D'autre part, l'efficacité devrait être plus élevée, comme cela s'est avéré spectaculaire avec les vaccins à ARNm contre le covid-19, même chez les personnes âgées", explique Marc Van Ranst. Ce n'est pas la seule nouveauté sur laquelle les grandes sociétés pharmaceutiques misent aujourd'hui. Si l'on veut combiner le vaccin contre la grippe et celui contre le covid-19 en une seule visite, pourquoi ne pas le faire dans la même seringue? "Le développement de ces vaccins combinés va bon train et les résultats des études préliminaires sont prometteurs. Un certain nombre de firmes visent même un vaccin combiné à base d'ARNm. Ces 'nouveaux' vaccins devront aussi être mis à jour chaque année, pour les deux virus. Cela nécessite des études à grande échelle sur plusieurs saisons. Il est encore trop tôt pour faire des déclarations définitives, mais beaucoup de choses bougent", déclare le Pr Van Ranst. "Certains médecins pensent qu'ils sont immunisés contre le virus de la grippe parce qu'ils voient beaucoup de patients. C'est vrai, jusqu'à ce qu'ils tombent malades", dit-il en riant. "Pour le rhume, ce raisonnement est plus valable. En tant que médecin (généraliste), vous avez trois raisons de vous faire vacciner contre la grippe: l'égoïsme, pour ne pas tomber malade, l'altruisme, pour protéger les patients vulnérables, ET la raison collégiale, parce qu'abandonner vos confrères pendant la période la plus chargée de l'année n'est pas très sympathique", note le Pr Van Ranst. "En outre, vous envoyez le bon message aux patients à risque (qui doutent): je me fais vacciner parce que c'est important." Les éventuels effets secondaires locaux et systémiques du vaccin contre la grippe sont bénins et n'ont pas lieu de faire peur aux gens. "Les conséquences potentielles de la grippe sont bien plus graves", conclut Marc Van Ranst. "Même si nous ne devons pas non plus élargir les indications de vaccination. Si tous les quadragénaires en bonne santé se faisaient soudainement vacciner, nous aurions trop peu de vaccins contre la grippe."