1. Les BiSP dans le lymphome non hodgkinien - Guillaume Cartron (Montpellier)

Nous résumons ici les données de recherche fondamentale relatives aux différences potentiellement significatives entre les BiSP et leurs alternatives, en levant le voile sur leur application dans les lymphomes sur la base de données préliminaires. Il n'existe encore pratiquement aucune véritable étude clinique comparative entre les différents BiSP et il convient encore de prendre en compte de nombreux aspects tels que la QoL, le "burden of therapy", la durée d'hospitalisation, le coût... !

Après le tournant majeur des anticorps monoclonaux anti-CD20, l'attention s'est lentement portée sur le rôle fonctionnel des lymphocytes T contre le NHL, comme après une alloSCT avec l'effet GvLymfoma : les lymphocytes T sont à même de mieux contrôler les lymphomes (surtout de bas grade) ! À l'heure actuelle, divers "engagers" des lymphocytes T (CAR-T, BiTE, BiSP) constituent clairement un nouveau paradigme, marquant une évolution des anticorps monoclonaux médiés par le fragment Fc vers les traitements médiés par les lymphocytes T. Les BiSP sont dans ce cadre la classe la plus récente, ciblant simultanément le récepteur des lymphocytes T (TCR) et un antigène spécifique de tumeur. Le paysage s'élargit rapidement, les BiSP anti-CD20/CD3 ne ciblant qu'un seul épitope étant rejoints par les BiSP anti-CD20/CD3 ciblant deux épitopes (p. ex. mosunetuzumab, epcontamab, odronextamab, glofitamab...). L'emplacement de l'occupation précise de CD20 est aussi important au niveau pratique : l'epco et l'odro peuvent être associés avec le RTX ou l'obinutuzumab, les autres peuvent interférer avec leur liaison au CD20.

Dans les lymphomes agressifs (aNHL), les résultats d'études avec des BiSP anti-CD20/CD3, naturellement chez des patients déjà traités au préalable, peuvent être résumés brièvement :

- En monothérapie : une efficacité démontrée avec un ORR entre 40+ et 60+ % et une CR de 25-30 %, moyennant des effets indésirables raisonnablement acceptables (si soins ambulatoires possibles, mais malgré tout manifestement pas chez 10-15 % des patients) et les toxicités majeures avec CRS ou ICANS (cf. remarques) ne présentent qu'une faible incidence. La mDOR en CR est > 12m, mais la PFS est inférieure à 6m et sans véritable plateau. Le CRS est classé en grades (1-4) et un grade > 1 peut, s'il est apparent, très bien être utilisé pour mesurer le grade de toxicité. Aucun facteur prédictif de CRS n'a encore été trouvé. Les possibles effets secondaires à long terme, surtout le risque d'épuisement lymphocytaire T (établi in vitro), invitent encore à la prudence.

- Dans le traitement associant epco et R-CHOP, on obtient dans une population à haut risque avec aNHL un ORR de 100 % et une CR allant jusqu'à 77 %, mais encore une fois moyennant un suivi de courte durée. Avec glofit (plus CRS/ICANS !) et R-CHOP, l'ORR est de 93 % et la CR, de 73 %. Le risque de CRS est manifestement plus faible lorsque cette chimio-immuno est administrée en premier ?

Petit commentaire sur l'efficacité : contrairement à la thérapie CAR-T (par axi-cel) chez des patients ayant déjà reçu de lourds traitements (au moins en traitement de quatrième ligne), aucun plateau de PFS n'a pu être constaté après les BiSP.

Autres commentaires sur la toxicité : une prémédication par corticoïdes fait baisser l'incidence et le grade du CRS ; les études divergent aussi en termes de durée de traitement (p. ex. epco et odro : jusqu'à progression ou toxicité excessive ; glofi : jusqu'à 12 cycles ou toxicité excessive) et ne sont donc pas comparables en la matière.

Dans le NHL indolent (iNHL) : également chez les patients déjà traités au préalable :

- En monothérapie : efficacité démontrée dans les diverses études de phase 1/2, mais avec de petits nombres de patients et à diverses posologies : intervalle d'ORR de 70-90 %, CR de 75-48 %. Le mosun en monothérapie résulte en une mPFS de 24m, mais les connaissances à son sujet ne sont pas encore suffisantes par rapport aux autres.

- En polythérapie par epco et RTX-lénalidomide, la mDOR n'a pas été atteinte, mais le suivi était de courte durée. La proportion de RTX peut éventuellement être questionnée ? La survenue du CRS est influencée par les posologies, jusqu'à max. 32 % (grade 1) et 9 % (grade 2) après la première dose complète au cycle 1 ; l'incidence diminue fortement par la suite.

Par rapport à CAR-T, le ratio de CR est plus ou moins identique, avec un TTNT plus élevé et une DOR plus longue comme bénéfices potentiels. Sans oublier une durée d'hospitalisation réduite.

En conclusion sur les BiSP moAbs dans le NHL : cette classe de "T-cell engagers" offre une opportunité de meilleurs résultats chez les patients R/R NHL, avec moins d'effets indésirables et une application potentiellement plus simple qu'avec la thérapie CAR-T. Les études doivent encore être fortement améliorées (hétérogénéité des populations et des méthodes de mesure/critères de réponse, suivi de plus longue durée). Il convient de se pencher davantage sur le contrôle apparemment plus court de la maladie, par rapport aux thérapies CAR-T, ainsi que sur le danger d'épuisement lymphocytaire T (sujet à discussion, données insuffisantes) faisant craindre le développement d'infections et de cancers secondaires. D'autre part, ils offrent de belles perspectives : associations avec la chimio (aNHL) ou p. ex. le lénalidomide (iNHL) et application suivie par une CAR-T chez les patients R/R NHL et à haut risque...

Remarque : CRS: Cytokine Release Syndrome: A condition that may occur after treatment with some types of immunotherapy, such as monoclonal antibodies and CAR-T cells. Cytokine release syndrome is caused by a large, rapid release of cytokines into the blood from immune cells affected by the immunotherapy. Cytokines are immune substances that have many different actions in the body. Signs and symptoms of cytokine release syndrome include fever, nausea, headache, rash, rapid heartbeat, low blood pressure, and trouble breathing. Most patients have a mild reaction, but sometimes, the reaction may be severe or life threatening.

Remarque : ICANS: Immune effector Cell-Associated Neurotoxicity Syndrome is a clinical and neuropsychiatric syndrome that can occur in the days to weeks following administration of certain types of immunotherapy, especially immune effector cell (IEC) and T cell engaging therapies. It has previously been referred to as cytokine release encephalopathy syndrome (CRES) and chimeric antigen receptor T (CAR-T) cell-related encephalopathy or neurotoxicity.

2. Anticorps monoclonaux bispécifiques dans le MM - Nathalie Meuleman (HUB)

Les BiSP moAbs dirigés contre les cellules myélomateuses se divisent en 2 catégories : les IgG-like (comme l'elratamab et le teclistamab humanisés, ou non humanisés, comme le cevostamab et le talquetamab, e.a.) et les non-IgG-like (AMG 420 et la variante AMG 701). Tous sont fortement impliqués dans des recherches scientifiques et cliniques. Ces BiSP marquent une révolution dans le traitement, comme en comparaison des BiTE et des CAR-T, en qualité de "T-cell engagers" : par leur libération de perforines et de granzymes dirigée contre les cellules myélomateuses, leur activation et prolifération de lymphocytes T. Les actuels antigènes spécifiques ciblés couvrent 3 groupes : BMCA-CD3 (nombreuses molécules à l'étude), FcRH5-CD3 (cevo) ou GPRC5D (talque). Globalement, ils donnent tous - dans la population d'étude généralement lourdement traitée au préalable - un ORR compris entre 30 et 79 % (mais pas encore d'études comparatives disponibles !).

Quelques résultats d'études en monothérapie à titre d'illustration :

BMCA-CD3 :

- MajesTEC-1 (tecli) dans le R/R MM : MRDneg dans 46 % des cas (1/10-5) ; temps médian de 1re réponse 1,2m, de meilleure réponse 3,8m et mPFS 18,3m (NEJM2022).

- MagnetisMMR (elra) dans le R/R MM : CR de 28 % avec sCR de 13 % ; VGPR ou mieux 55 % ; temps de réponse médian de 1,2m ; ORR de 61 % avec suivi de 10,4m ; MPFS et mOS non atteintes après 20m. Toxicité : hématotox/grade 3/4 : neutropénie 48 %, anémie 36 %, thrombopénie 22 % ; CRS jusqu'à 58 %, mais 0 % de grade 3/4 ; ICANS jusqu'à 3,4 %, mais 0 % de grade 3/4.

GPRC5D-CD3 :

"G protein-coupled receptor, family C, group 5, member D" est un récepteur orphelin exprimé sur les plasmocytes. En plus de son expression sur les plasmocytes malins, cet antigène cible est aussi présent sur les cellules tissulaires kératinisées (avec effets additionnels spécifiques) et en abondance sur les cellules MM, une grande augmentation étant associée à un mauvais pronostic.

- Étude Talque (NEJM2022) en classes posologiques et SC ou IV (NEJM2022) : l'administration SC résulte en VGPR ou mieux chez 53 %, dont sCR chez 16 % ; les administrations IV donnent une VGPR ou mieux chez 61 %, dont une sCR chez 17 %.

- MonumenTAL-1 dans le R/R MM : SC administré à dose plus élevée : VGPR ou mieux chez 57 %, avec sCR chez 20 %, et mPFS de 11,2m ; mDOR de 13m. Toxicité : essentiellement des infections, jusqu'à 60 %, grade 3/4 jusqu'à 16 % avec infections opportunistes chez 3 % ou plus ; plaintes dues à des anomalies unguéales, xérostomie, perte de poids, dysphagie, perte d'appétit : moins en cas d'administration IV. Chez des patients ayant reçu au préalable un autre traitement de redirection des lymphocytes T (sélection !), on a atteint un ORR, avec VGPR ou mieux chez 53 % et sCR chez 17 % !

FcRH5-CD3 :

L'antigène ciblant le récepteur homologue 5 du fragment Fc connaît une expression élevée sur les cellules myélomateuses.

- Étude Cevo (phase 1) dans le R/R MM : administré en cycles de 21 jours et avec une dose croissante : jusqu'à VGPR ou mieux chez 60 %, avec sCR chez 6,7 %.

En résumé, les principaux résultats de ces études et des autres (non comparatives) sont un(e) ORR/CR de 57 %/39 %, avec une mDOR de 9,3 à 11,5m, mais ils indiquent aussi des complications d'infections majeures chez 17 à 76 % des patients, un CRS (tous grades) chez 38 à 79 % et un ICANS (tous grades) chez 2 à 4 %.

L'avenir proche ciblera également d'autres antigènes cibles, sur les cellules MM, mais aussi les cellules effectrices de l'immunité autres que les lymphocytes T : NK, mono ?

Exemples avec traitements combinés : évidemment aussi dans le R/R MM : sélection au départ de la liste des travaux en cours :

- MajesTEC-2 (tecli-DRD) (ASH2022) : ORR 94 %, avec VGPR ou mieux chez 90 % avec sCR chez 25 % et un temps médian de première réponse de 1m et de CR de 3m. Toxicité : neutropénie de grade 3/4 78 %, infections de grade 3/4 37 % avec pneumonies de grade 3/4 15 %, mais pas de CRS de grade 3/4 !

- TRIMM-2 (tecli-Dara) (phase 1b) (EHE2022) : ORR de 74 à 100 %. La toxicité semble "acceptable".

Conclusion : Ces BiSP (médicaments disponibles "off the shelf" !) donnent clairement de bons résultats chez des patients MM ayant déjà subi de lourds traitements au préalable, moyennant une réponse profonde et prolongée en traitement d'entretien, mais ils sont aussi source d'inquiétude en raison de l'incidence élevée d'infections, toutefois sans risque de CRS ou d'ICANS sévère. Ils nous permettent d'aider un plus grand nombre de patients, pour une OS et une PFS supérieures mais aussi, entre autres, à un coût plus élevé...

1. Les BiSP dans le lymphome non hodgkinien - Guillaume Cartron (Montpellier)Nous résumons ici les données de recherche fondamentale relatives aux différences potentiellement significatives entre les BiSP et leurs alternatives, en levant le voile sur leur application dans les lymphomes sur la base de données préliminaires. Il n'existe encore pratiquement aucune véritable étude clinique comparative entre les différents BiSP et il convient encore de prendre en compte de nombreux aspects tels que la QoL, le "burden of therapy", la durée d'hospitalisation, le coût... !Après le tournant majeur des anticorps monoclonaux anti-CD20, l'attention s'est lentement portée sur le rôle fonctionnel des lymphocytes T contre le NHL, comme après une alloSCT avec l'effet GvLymfoma : les lymphocytes T sont à même de mieux contrôler les lymphomes (surtout de bas grade) ! À l'heure actuelle, divers "engagers" des lymphocytes T (CAR-T, BiTE, BiSP) constituent clairement un nouveau paradigme, marquant une évolution des anticorps monoclonaux médiés par le fragment Fc vers les traitements médiés par les lymphocytes T. Les BiSP sont dans ce cadre la classe la plus récente, ciblant simultanément le récepteur des lymphocytes T (TCR) et un antigène spécifique de tumeur. Le paysage s'élargit rapidement, les BiSP anti-CD20/CD3 ne ciblant qu'un seul épitope étant rejoints par les BiSP anti-CD20/CD3 ciblant deux épitopes (p. ex. mosunetuzumab, epcontamab, odronextamab, glofitamab...). L'emplacement de l'occupation précise de CD20 est aussi important au niveau pratique : l'epco et l'odro peuvent être associés avec le RTX ou l'obinutuzumab, les autres peuvent interférer avec leur liaison au CD20.Dans les lymphomes agressifs (aNHL), les résultats d'études avec des BiSP anti-CD20/CD3, naturellement chez des patients déjà traités au préalable, peuvent être résumés brièvement :- En monothérapie : une efficacité démontrée avec un ORR entre 40+ et 60+ % et une CR de 25-30 %, moyennant des effets indésirables raisonnablement acceptables (si soins ambulatoires possibles, mais malgré tout manifestement pas chez 10-15 % des patients) et les toxicités majeures avec CRS ou ICANS (cf. remarques) ne présentent qu'une faible incidence. La mDOR en CR est > 12m, mais la PFS est inférieure à 6m et sans véritable plateau. Le CRS est classé en grades (1-4) et un grade > 1 peut, s'il est apparent, très bien être utilisé pour mesurer le grade de toxicité. Aucun facteur prédictif de CRS n'a encore été trouvé. Les possibles effets secondaires à long terme, surtout le risque d'épuisement lymphocytaire T (établi in vitro), invitent encore à la prudence.- Dans le traitement associant epco et R-CHOP, on obtient dans une population à haut risque avec aNHL un ORR de 100 % et une CR allant jusqu'à 77 %, mais encore une fois moyennant un suivi de courte durée. Avec glofit (plus CRS/ICANS !) et R-CHOP, l'ORR est de 93 % et la CR, de 73 %. Le risque de CRS est manifestement plus faible lorsque cette chimio-immuno est administrée en premier ?Petit commentaire sur l'efficacité : contrairement à la thérapie CAR-T (par axi-cel) chez des patients ayant déjà reçu de lourds traitements (au moins en traitement de quatrième ligne), aucun plateau de PFS n'a pu être constaté après les BiSP.Autres commentaires sur la toxicité : une prémédication par corticoïdes fait baisser l'incidence et le grade du CRS ; les études divergent aussi en termes de durée de traitement (p. ex. epco et odro : jusqu'à progression ou toxicité excessive ; glofi : jusqu'à 12 cycles ou toxicité excessive) et ne sont donc pas comparables en la matière.Dans le NHL indolent (iNHL) : également chez les patients déjà traités au préalable :- En monothérapie : efficacité démontrée dans les diverses études de phase 1/2, mais avec de petits nombres de patients et à diverses posologies : intervalle d'ORR de 70-90 %, CR de 75-48 %. Le mosun en monothérapie résulte en une mPFS de 24m, mais les connaissances à son sujet ne sont pas encore suffisantes par rapport aux autres.- En polythérapie par epco et RTX-lénalidomide, la mDOR n'a pas été atteinte, mais le suivi était de courte durée. La proportion de RTX peut éventuellement être questionnée ? La survenue du CRS est influencée par les posologies, jusqu'à max. 32 % (grade 1) et 9 % (grade 2) après la première dose complète au cycle 1 ; l'incidence diminue fortement par la suite.Par rapport à CAR-T, le ratio de CR est plus ou moins identique, avec un TTNT plus élevé et une DOR plus longue comme bénéfices potentiels. Sans oublier une durée d'hospitalisation réduite.En conclusion sur les BiSP moAbs dans le NHL : cette classe de "T-cell engagers" offre une opportunité de meilleurs résultats chez les patients R/R NHL, avec moins d'effets indésirables et une application potentiellement plus simple qu'avec la thérapie CAR-T. Les études doivent encore être fortement améliorées (hétérogénéité des populations et des méthodes de mesure/critères de réponse, suivi de plus longue durée). Il convient de se pencher davantage sur le contrôle apparemment plus court de la maladie, par rapport aux thérapies CAR-T, ainsi que sur le danger d'épuisement lymphocytaire T (sujet à discussion, données insuffisantes) faisant craindre le développement d'infections et de cancers secondaires. D'autre part, ils offrent de belles perspectives : associations avec la chimio (aNHL) ou p. ex. le lénalidomide (iNHL) et application suivie par une CAR-T chez les patients R/R NHL et à haut risque... Remarque : CRS: Cytokine Release Syndrome: A condition that may occur after treatment with some types of immunotherapy, such as monoclonal antibodies and CAR-T cells. Cytokine release syndrome is caused by a large, rapid release of cytokines into the blood from immune cells affected by the immunotherapy. Cytokines are immune substances that have many different actions in the body. Signs and symptoms of cytokine release syndrome include fever, nausea, headache, rash, rapid heartbeat, low blood pressure, and trouble breathing. Most patients have a mild reaction, but sometimes, the reaction may be severe or life threatening.Remarque : ICANS: Immune effector Cell-Associated Neurotoxicity Syndrome is a clinical and neuropsychiatric syndrome that can occur in the days to weeks following administration of certain types of immunotherapy, especially immune effector cell (IEC) and T cell engaging therapies. It has previously been referred to as cytokine release encephalopathy syndrome (CRES) and chimeric antigen receptor T (CAR-T) cell-related encephalopathy or neurotoxicity.2. Anticorps monoclonaux bispécifiques dans le MM - Nathalie Meuleman (HUB)Les BiSP moAbs dirigés contre les cellules myélomateuses se divisent en 2 catégories : les IgG-like (comme l'elratamab et le teclistamab humanisés, ou non humanisés, comme le cevostamab et le talquetamab, e.a.) et les non-IgG-like (AMG 420 et la variante AMG 701). Tous sont fortement impliqués dans des recherches scientifiques et cliniques. Ces BiSP marquent une révolution dans le traitement, comme en comparaison des BiTE et des CAR-T, en qualité de "T-cell engagers" : par leur libération de perforines et de granzymes dirigée contre les cellules myélomateuses, leur activation et prolifération de lymphocytes T. Les actuels antigènes spécifiques ciblés couvrent 3 groupes : BMCA-CD3 (nombreuses molécules à l'étude), FcRH5-CD3 (cevo) ou GPRC5D (talque). Globalement, ils donnent tous - dans la population d'étude généralement lourdement traitée au préalable - un ORR compris entre 30 et 79 % (mais pas encore d'études comparatives disponibles !).Quelques résultats d'études en monothérapie à titre d'illustration :BMCA-CD3 :- MajesTEC-1 (tecli) dans le R/R MM : MRDneg dans 46 % des cas (1/10-5) ; temps médian de 1re réponse 1,2m, de meilleure réponse 3,8m et mPFS 18,3m (NEJM2022).- MagnetisMMR (elra) dans le R/R MM : CR de 28 % avec sCR de 13 % ; VGPR ou mieux 55 % ; temps de réponse médian de 1,2m ; ORR de 61 % avec suivi de 10,4m ; MPFS et mOS non atteintes après 20m. Toxicité : hématotox/grade 3/4 : neutropénie 48 %, anémie 36 %, thrombopénie 22 % ; CRS jusqu'à 58 %, mais 0 % de grade 3/4 ; ICANS jusqu'à 3,4 %, mais 0 % de grade 3/4.GPRC5D-CD3 :"G protein-coupled receptor, family C, group 5, member D" est un récepteur orphelin exprimé sur les plasmocytes. En plus de son expression sur les plasmocytes malins, cet antigène cible est aussi présent sur les cellules tissulaires kératinisées (avec effets additionnels spécifiques) et en abondance sur les cellules MM, une grande augmentation étant associée à un mauvais pronostic.- Étude Talque (NEJM2022) en classes posologiques et SC ou IV (NEJM2022) : l'administration SC résulte en VGPR ou mieux chez 53 %, dont sCR chez 16 % ; les administrations IV donnent une VGPR ou mieux chez 61 %, dont une sCR chez 17 %.- MonumenTAL-1 dans le R/R MM : SC administré à dose plus élevée : VGPR ou mieux chez 57 %, avec sCR chez 20 %, et mPFS de 11,2m ; mDOR de 13m. Toxicité : essentiellement des infections, jusqu'à 60 %, grade 3/4 jusqu'à 16 % avec infections opportunistes chez 3 % ou plus ; plaintes dues à des anomalies unguéales, xérostomie, perte de poids, dysphagie, perte d'appétit : moins en cas d'administration IV. Chez des patients ayant reçu au préalable un autre traitement de redirection des lymphocytes T (sélection !), on a atteint un ORR, avec VGPR ou mieux chez 53 % et sCR chez 17 % !FcRH5-CD3 :L'antigène ciblant le récepteur homologue 5 du fragment Fc connaît une expression élevée sur les cellules myélomateuses.- Étude Cevo (phase 1) dans le R/R MM : administré en cycles de 21 jours et avec une dose croissante : jusqu'à VGPR ou mieux chez 60 %, avec sCR chez 6,7 %.En résumé, les principaux résultats de ces études et des autres (non comparatives) sont un(e) ORR/CR de 57 %/39 %, avec une mDOR de 9,3 à 11,5m, mais ils indiquent aussi des complications d'infections majeures chez 17 à 76 % des patients, un CRS (tous grades) chez 38 à 79 % et un ICANS (tous grades) chez 2 à 4 %.L'avenir proche ciblera également d'autres antigènes cibles, sur les cellules MM, mais aussi les cellules effectrices de l'immunité autres que les lymphocytes T : NK, mono ?Exemples avec traitements combinés : évidemment aussi dans le R/R MM : sélection au départ de la liste des travaux en cours :- MajesTEC-2 (tecli-DRD) (ASH2022) : ORR 94 %, avec VGPR ou mieux chez 90 % avec sCR chez 25 % et un temps médian de première réponse de 1m et de CR de 3m. Toxicité : neutropénie de grade 3/4 78 %, infections de grade 3/4 37 % avec pneumonies de grade 3/4 15 %, mais pas de CRS de grade 3/4 !- TRIMM-2 (tecli-Dara) (phase 1b) (EHE2022) : ORR de 74 à 100 %. La toxicité semble "acceptable".Conclusion : Ces BiSP (médicaments disponibles "off the shelf" !) donnent clairement de bons résultats chez des patients MM ayant déjà subi de lourds traitements au préalable, moyennant une réponse profonde et prolongée en traitement d'entretien, mais ils sont aussi source d'inquiétude en raison de l'incidence élevée d'infections, toutefois sans risque de CRS ou d'ICANS sévère. Ils nous permettent d'aider un plus grand nombre de patients, pour une OS et une PFS supérieures mais aussi, entre autres, à un coût plus élevé...