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Le traitement ciblé par enfortumab védotine (EV) a déjà montré des résultats prometteurs dans des études de phase I et II (1,2). Les résultats de l'étude de phase III (EV-301) ont été publiés récemment dans The New England Journal of Medicine(3): l'étude a été arrêtée prématurément en raison des résultats supérieurs dans le bras EV. L'un des auteurs, le Pr Christof Vulsteke (AZ Maria Middelares/Geïntegreerd Kankercentrum Gent/UA), oncologue médical, parle d'une percée: "L'EV deviendra rapidement un traitement de première intention pour ce groupe de patients, certes en combinaison avec l'immunothérapie." Les patients atteints d'un CU localement avancé ou métastatique après une chimiothérapie à base de platine et une immunothérapie (anti-PD-1/PD-L1) ont un pronostic défavorable et peu, voire pas, d'options de traitement. "Aucune option sensée ne permet d'allonger la vie de manière qualitative. Après 7 mois, la mortalité est d'environ 50%. Cette population de patients est donc confrontée à un besoin médical important", déclare le Pr Vulsteke. Le traitement standard du CU métastatique est une chimiothérapie à base de platine en première intention et l'inhibition des check-points (ICP) en deuxième intention. Depuis peu, l'immunothérapie peut s'administrer comme traitement d'entretien. "Par rapport à il y a cinq ans, le développement de produits nouveaux et innovants s'accélère dans le traitement du CU. Avec l'EV, nous disposons d'une nouvelle possibilité: un traitement très ciblé, qui pourra, à court terme, améliorer considérablement la survie, tout en préservant la qualité de vie." L'EV est un conjugué anticorps-médicament (ADC, antibody-drug conjugate), composé d'un anticorps monoclonal lié chimiquement à la monométhylauristatine E, un type de médicament chimiothérapeutique.L'EV cible la nectine-4, une protéine présente à la surface de la plupart des cellules cancéreuses de la vessie, dont l'expression est accrue dans le CU. L'étude internationale randomisée, de phase III EV-301 a inclus 608 patients atteints d'un CU localement avancé ou métastatique, qui avaient déjà reçu une chimiothérapie à base de platine et présentaient une progression de la maladie pendant ou après le traitement par un inhibiteur de PD-1 ou PD-L1. Les sujets ont été randomisés selon un rapport de 1: 1 à un traitement par EV ou à une chimiothérapie classique à base de platine (vinflunine, docétaxel, paclitaxel). Le critère de jugement principal était la survie globale (OS). Lors de l'analyse intermédiaire (suivi médian: 11,1 mois), le bras EV a déjà montré un allongement significatif de l'OS, par rapport au bras chimiothérapie, avec un risque de décès réduit de 30% (OS médiane: 12,88 mois contre 8,97 mois, respectivement ; HR: 0,7 ; IC à 95%: 0,56-0,89). L'étude a dès lors été arrêtée et les patients du groupe chimiothérapie ont pu changer de bras. La survie sans progression (PFS), un des critères de jugement secondaires, a également connu un allongement significatif dans le bras EV: -38% du risque de progression de la maladie ou de décès vs bras chimiothérapie (PFS médiane: 5,55 mois contre 3,71 mois ; HR: 0,62 ; IC à 95%: 0,51-0,75). En outre, la réponse totale était aussi supérieure dans le bras EV (40,6% ; IC à 95%: 34,9-46,5, contre 17,9% ; IC à 95%: 13,7-22,8 ; p < 0,001). 4,9% du groupe EV ont obtenu une réponse complète, contre 2,7% dans le groupe chimiothérapie. Le contrôle de la maladie (" disease control") était également supérieur dans le bras EV (71,9% contre 53,4% ; p < 0,001). "Concernant la toxicité aiguë, l'EV a principalement été à l'origine de dermotoxicité, de neuropathie périphérique et d'hyperglycémie, des effets indésirables généralement mieux tolérés que ceux de la chimiothérapie classique. Ainsi, une neutropénie fébrile est survenue chez 5,5% du groupe chimiothérapie, contre 0,7% du groupe EV. Rappelons qu'en première intention, cette population a déjà suivi une chimiothérapie, connue pour le développement d'une neuropathie périphérique. Sur base de ces résultats, ce traitement pourrait rapidement bénéficier d'un ' early access program' et d'un régime de remboursement courant de cette année pour cette population de patients chez qui il existe un important besoin médical." Vu la supériorité de l'EV par rapport à la chimiothérapie classique, des études où il est utilisé en première intention dans le CU métastatique ont entre-temps débuté. "L'étude de phase II dans laquelle l'EV est évalué en combinaison avec le pembrolizumab en première intention a déjà fourni des résultats remarquables. L'étude de phase III EV-302 (EV + pembrolizumab vs chimiothérapie) est en cours aux États-Unis et débutera bientôt chez nous. Sa conception est prometteuse et nous nous attendons à ce que l'effet de l'ICP soit beaucoup plus grand. Et comme aucune chimiothérapie n'a encore été administrée, nous espérons une réduction de la neuropathie." Enfin, des études dans lesquelles l'ICP est administré en monothérapie ou conjointement avec l'EV, dans le cancer de la vessie infiltrant le muscle (non métastatique) dans le contexte néo-adjuvant, sont en cours (Keynote-905/EV-303). "J'encourage tous les patients à participer à ces études, car elles offrent une option supplémentaire prometteuse ; il s'agit de la meilleure opportunité de recevoir ce produit dans le cadre d'une étude. Et si vous recevez la chimiothérapie classique, vous pourrez encore passer à l'EV plus tard", ajoute le Pr Vulsteke.