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Cette année, quelles ont été les avancées majeures en hématologie ?Pr Violaine Havelange : " Les CAR-T cells sont une option thérapeutique fascinante et prometteuse. Chez les adultes, cette forme d'immunothérapie 'individuelle' est remboursée dans certains lymphomes agressifs en rechute, après échec de minimum deux lignes de traitement, ainsi que dans le traitement de la leucémie lymphoblastique aigüe de l'enfant et du jeune adulte à partir de la deuxième rechute. Aux Cliniques universitaires Saint-Luc, trois patients ont reçu ce traitement et d'autres l'attendent.Ce traitement permet d'obtenir un taux de rémission élevé, mais nous manquons de recul pour en évaluer la durée de rémission. Il n'est pas non plus sans risque. Les patients doivent être surveillés en hospitalisation pendant minimum dix jours. Ils peuvent présenter un syndrome de relargage des cytokines, des complications neurologiques, des infections ou un syndrome de lyse tumorale. Jusqu'à présent, nos patients n'ont pas présenté de complication majeure. "Selon vous, que pouvons-nous attendre en 2020 concernant les CAR-T cells ?" Pour peu que les études en cours en confirment les bénéfices, nous espérons pouvoir proposer ce traitement dans des stades plus précoces du lymphome agressif de l'adulte. Par ailleurs, des études de phase I sont en cours dans d'autres indications, notamment dans le myélome multiple et la leucémie aigüe myéloblastique (LAM), la leucémie la plus fréquente chez l'adulte. Pour le traitement de la LAM, la difficulté est de déterminer une cible spécifique qui ne soit pas présente sur la cellule souche hématopoïétique normale. "Concernant la LAM, qu'en est-il des thérapies ciblées ?" Grâce à l'essor des nouvelles techniques en génétique et biologie moléculaire, nous savons désormais que chaque leucémie est différente. Le séquençage à haut débit nous permet d'identifier chez chaque patient les différentes mutations de l'ADN à l'origine de la maladie. Ces mutations nous permettent de classer les patients en groupes pronostiques et, surtout, de déterminer le meilleur traitement, ciblé si possible. Les nouvelles thérapies épigénétiques du LAM l'illustrent bien. Par exemple, plus d'un quart des patients présente une mutation sur FLT3, un gène qui a une activité de tyrosine kinase. Les inhibiteurs de FLT3 de 1re génération sont remboursés ; ceux de 2e génération sont disponibles en usage compassionnel. Autre situation : les gènes IDH 1 ou 2, qui régulent une enzyme intervenant dans la méthylation, sont mutés chez 10 à 15% des patients. Actuellement, nous pouvons donner des inhibiteurs d'IDH 1 ou 2 en compassionnel, mais seulement en cas de rechute. Nous aimerions pouvoir administrer ces traitements en 1re ligne, en combinaison avec un agent de chimiothérapie. Nous attentons donc avec impatience les résultats des études qui évaluent cette approche. Selon moi, le futur traitement de la LAM se basera sur la combinaison de thérapies ciblées et des traitements systémiques actuels, mais à dose inférieure et, donc, avec moins d'effets secondaires. "Et le venetoclax ?" Le venetoclax est un inhibiteur du Bcl-2, une protéine anti-apoptotique qui, lorsqu'elle surexprimée dans un cancer, peut jouer un rôle dans la chimiorésistance. Ce médicament n'est pas encore remboursé, mais nous pouvons le donner en usage compassionnel en cas de rechute. Cela dit, aux Cliniques universitaires Saint-Luc, nous venons de participer à une étude qui l'évalue en 1re ligne de traitement du LAM, en combinaison avec la chimiothérapie. D'autres indications hématologiques sont aussi à l'étude : on teste le venetoclax dans le myélome multiple, la leucémie lymphoïde chronique, etc.C'est un médicament relativement bien supporté par les patients, mais il a des inconvénients : il faut être très attentif aux possibles interactions avec les autres médicaments et les doses doivent être augmentées progressivement, sous surveillance médicale étroite. En effet, il peut donner lieu à un syndrome de lyse tumorale à l'instauration du traitement qui, si l'on n'y prend garde, peut causer des troubles cardiaques sévères, des troubles neurologiques, de l'insuffisance rénale, etc. Dans certains cas, le venetoclax peut aussi induire une aplasie que nous avons un peu de mal à gérer et qui peut survenir des mois après le début du traitement. Prudence, donc. "Qu'en est-il des greffes ?" Nous recourons de plus en plus à la greffe haplo-identique. Il s'agit d'une allogreffe issue d'un donneur à moitié compatible au niveau HLA, car il n'a qu'un haplotype en commun avec le receveur. L'idéal reste l'allogreffe géno-identique, issue d'un frère ou une soeur compatible. Mais avec la greffe haplo-identique, il peut s'agir d'un enfant ou d'un parent du receveur, ce qui augmente les possibilités de trouver un donneur. Évidemment, cette option implique de modifier la chimiothérapie avant et après la greffe et d'adapter le traitement immunosuppresseur qui protège de la réaction du greffon contre l'hôte. Mais on y a de plus en plus recours, notamment dans les LAM - où l'allogreffe est encore nécessaire dans les deux tiers des cas - et dans les leucémies aigües lymphoblastiques (LAL). Cela dit, il n'est pas impossible que l'essor des CAR-T cells ait un impact sur le recours à l'allogreffe ou la précède dans certaines indications. L'avenir nous le dira ! "