Le thème de la sexualité n'est évoqué qu'avec un quart des patients oncologiques avant le début du traitement. Pour 50% des patients, le sujet n'est même jamais abordé. Voilà ce qui ressort d'un nouveau rapport d'enquête de Kom op tegen Kanker (KOTK)1.
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Pourtant, les problèmes liés à la sexualité et à l'intimité des patients constituent l'une des principales causes de dégradation de leur qualité de vie. KOTK appelle donc à faciliter la discussion autour de la sexualité dans le cancer et formule quelques recommandations. Selon les estimations, 40 à 100% des patients oncologiques sont confrontés à des problèmes d'ordre sexuel, selon le type de cancer, le traitement, l'outil de dépistage des plaintes et le type de troubles sexuels. "Cette problématique ne touche pas uniquement les patients atteints de tumeurs dans la région des seins ou du pelvis, mais aussi d'autres types de cancers. Plusieurs témoignages ont corroboré ce constat", précise Hans Neefs, expert en soins oncologiques chez KOTK. "De plus, la sexualité couvre bien plus que le seul aspect physique. Il est aussi question d'identité de genre, d'orientation sexuelle, d'érotisme, de plaisir, d'intimité et de reproduction." Les problèmes sexuels pendant ou après le traitement altèrent la qualité de vie des patients: dégradation de l'image de soi, sentiment d'incertitude, problèmes relationnels, voire dépression et troubles anxieux. Il s'agit donc d'une problématique physique et psychosociale, qui requiert de porter attention tant au patient qu'à son/sa partenaire. En 2021, KOTK a lancé une campagne pour évaluer la liberté de parole et les soins liés aux troubles sexuels dans le trajet oncologique. Dans ce cadre, 436(ex-)patients et leurs partenaires ont participé à une enquête en ligne. En parallèle, 3 groupes de discussion ont été mis sur pied avec des experts des soins de santé et des représentants des patients. Le rapport d'enquête a été publié plus tôt dans l'année. Parmi les participants interrogés, 88,4% étaient des (ex)patients et 15,6% des partenaires. 88,8% ont reconnu avoir (eu) des problèmes en matière de sexualité et d'intimité. Seuls 24,9% des participants avaient été informés des possibles conséquences du traitement du cancer sur la sexualité avant le début dudit traitement. "Les patients atteints d'un cancer de la prostate étaient notablement plus nombreux (66,7%), ce groupe étant pris en charge par un spécialiste préparé à traiter ces troubles lors de sa formation médicale, ce qui facilite vraisemblablement la discussion sur le sujet." Pour le reste, 48% des participants en ont discuté, pendant ou après le traitement, principalement avec leur oncologue et dans une moindre mesure avec un psychologue. Ce pourcentage est beaucoup plus faible parmi les personnes atteintes d'un cancer des ganglions lymphatiques que parmi les patients atteints de tumeurs dans la région des seins ou du pelvis. En général, le thème était en outre rarement abordé avec les infirmières, les coordinateurs de soins, les généralistes, les travailleurs sociaux et les kinésithérapeutes impliqués dans les soins. Enfin, 72,5% des participants qui n'avaient pas eu de conversation de ce genre auraient souhaité en avoir une. Autre point important: ce type d'entretien avait principalement été initié par le patient ou son/sa partenaire. "Ces résultats confirment ceux d'études antérieures, menées à l'étranger, selon lesquels 5% à peine des oncologues interrogés abordent spontanément ce sujet. Or, il est très important que le spécialiste introduise brièvement le sujet avant le début du traitement. Il ne doit pas nécessairement approfondir la question dès le départ mais, une fois le sujet amorcé, le patient sait qu'il peut en parler en consultation." Que ce soit du côté des patients ou des prestataires de soins, des barrières peuvent entraver la discussion sur les troubles sexuels, comme un sentiment de crainte ou de malaise. D'autre part, certains patients pensent que les problèmes vont s'améliorer d'eux-mêmes après le traitement ou se concentrent essentiellement sur la guérison et le bon déroulement du traitement. Les patients ont aussi l'impression que les prestataires de soins font parfois des suppositions incorrectes sur leur (in)activité sexuelle (en fonction de leur âge ou de leur engagement dans une relation ou non). Une partie des participants pointent par ailleurs l'impression de manquer de temps pour en parler et d'un manque de compréhension (minimisation de leurs plaintes) et d'empathie vis-à-vis des émotions qui accompagnent les troubles sexuels. Partant de ces résultats et des groupes de discussion, KOTK a formulé des recommandations à l'intention des prestataires de soins et des décideurs. Les premiers devraient ainsi se montrer proactifs et évoquer, avant le début du traitement, les conséquences possibles sur la sexualité et l'intimité, puis interroger régulièrement les patients sur ce sujet pendant et après le traitement. En effet, les troubles sexuels se manifestent principalement lorsque le patient quitte le mode survie. KOTK plaide dès lors pour une consultation de suivi abordant toutes sortes d'effets secondaires, y compris ceux liés à la sexualité et à l'intimité. La levée du tabou sur la sexualité devrait en outre être une composante obligatoire de la formation de base des prestataires de soins.La formation continue devrait englober des connaissances plus spécifiques sur l'impact des traitements sur la sexualité, ainsi qu'une acquisition des compétences nécessaires en communication. "Il convient de commencer par évaluer les formations existantes afin de déterminer si et comment elles portent déjà un intérêt à ce sujet." KOTK recommande une approche par paliers pour les soins relatifs aux troubles sexuels. Une approche intégrée dans les itinéraires de soins pour les patients oncologiques, qui se sentiraient libres d'aborder ce sujet, où une discussion approfondie est possible si les patients le souhaitent et où ceux-ci sont orientés vers des soins plus spécialisés si nécessaire. "Il est important que tous les prestataires de soins partent d'un seul et même cadre. Nous appelons dès lors à l'élaboration d'une directive belge en matière de sexualité et de cancer, qui pourra entrer dans la pratique et intégrer les formations. En attendant, la directive de l'ASCO peut être appliquée2. Enfin, tous les patients - quel que soit leur type de cancer - devraient avoir accès à une offre uniforme de soins psychosociaux et paramédicaux. Ce n'est malheureusement pas encore le cas. D'énormes différences existent entre hôpitaux et services hospitaliers en termes d'encadrement psychosocial des patients oncologiques."