Chaque jour, en Belgique, 25 femmes apprennent qu'elles sont atteintes d'un cancer du sein. Si les traitements ne cessent de progresser, la reconstruction mammaire fait aujourd'hui encore l'objet d'une information parcellaire. Les techniques actuelles permettent pourtant d'offrir cette possibilité à un maximum de femmes.
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Le sein est un organe très difficile à reconstruire. Des progrès énormes ont pourtant été faits au cours des dernières décennies : plus esthétique, plus sûre, plus ciblée, la reconstruction peut même aujourd'hui avoir lieu, pour certaines patientes, en même temps que l'ablation du sein. Les techniques de reconstruction se sont également diversifiées et la Belgique peut se targuer d'être à la pointe en la matière." La reconstruction mammaire a commencé avec les implants dans les années 60 ", explique le Dr Gaëtan Willemart, chirurgien plasticien. " Au départ, c'était évidemment marginal, en partie parce que du point de vue des moeurs, l'aspect physique était peut-être moins important. Et puis, quand on pratique une nouvelle discipline, tous les praticiens ne sont pas formés. Alors qu'aujourd'hui, pour tous les chirurgiens plasticiens de ma génération - et pour les plus jeunes bien sûr -, la reconstruction mammaire fait partie du cursus qu'ils ont reçu. "La reconstruction par tissus autologues Les années 80 ont vu apparaître les premières techniques de reconstruction avec des " tissus vivants ", sous forme d'auto-transplantation. En complément ou non d'une prothèse, l'utilisation de lambeaux pédiculés - c'est-à-dire restant attachés aux vaisseaux - a permis d'élargir la palette de la reconstruction et de viser un résultat toujours plus naturel. Le lambeau de TRAM (transverse rectus abdominus myocutaneous) utilise ainsi la peau et la graisse du ventre. Dans cette technique, le muscle grand droit de l'abdomen (qui s'insère depuis le sternum jusqu'au pubis) est utilisé comme " porte-vaisseaux " : il est levé et pivoté afin de reconstruire le ou les seins, le principal inconvénient étant le sacrifice d'un muscle. Dans les années 90, les avancées dans le domaine de la microchirurgie ont permis de mettre au point de nouvelles procédures comme le lambeau DIEP (deep inferior gastric perforator), qui utilise des tissus autologues mais permet de préserver le muscle abdominal." Ce sont aujourd'hui les techniques les plus pointues ", commente le Dr Gaëtan Willemart. " La reconstruction par tissus autologues présente en effet l'énorme avantage d'être une reconstruction stable, qui va littéralement vivre avec la patiente : si elle grossit ou maigrit, le sein va lui aussi grossir ou maigrir. Lorsque l'autre sein s'affaissera un peu avec l'âge, le sein reconstruit s'affaissera lui aussi. Lorsque la patiente se couche, c'est un sein qui va naturellement s'étaler sur le thorax. C'est aussi un sein qui est chaud, à l'inverse de la prothèse, qui est froide et qui a tendance à faire durcir le sein, à le rendre plus rigide, plus sphérique. Même si dans l'un et l'autre cas, le sein est insensible. " Malgré leurs avantages, ces techniques par " lambeaux " ou prélèvement de peau ne sont pas indiquées pour toutes les patientes : elles doivent être discutées dans le cadre d'un échange multidisciplinaire, en tenant compte des traitements passés et/ou à venir, de la morphologie de la patiente, de ses priorités, etc.Un choix, pas une injonction " Les perspectives d'avenir, c'est le lipofeeling, qui consiste à injecter des graisses pour combler le déficit, améliorer l'atrophicité des téguments cicatriciels ou irradiés ", poursuit le Dr Gaëtan Willemart. " Mais on peut aussi espérer qu'avec l'amélioration des traitements, on aura de moins en moins besoin de reconstruire. " Aujourd'hui, la reconstruction reste néanmoins une priorité pour de nombreuses femmes ayant subi une ablation. Karin Rondia, directrice médicale de la Fondation contre le Cancer, rappelle cependant qu'elle ne doit pas devenir une obligation. " Pour certaines femmes, reconstruire un sein disparu peut faire partie du processus de guérison. Mais d'autres femmes ne souhaitent pas cela. Certaines disent que l'épreuve du cancer les a littéralement transformées ; elles ne souhaitent pas nécessairement revenir en arrière. Cela ne doit pas devenir une pression. En outre, il ne faut pas laisser filtrer le fantasme que tout sera comme avant. Le sein se vit aussi de l'intérieur du corps et un sein reconstruit restera insensible. " La priorité est de pouvoir avancer en connaissance de cause : aujourd'hui encore, on estime que 40 % des femmes ne sont pas informées des possibilités de reconstruction avant leur opération.Le BRA Day En Belgique, une femme sur neuf sera touchée dans sa vie par un cancer du sein. Malgré la fréquence de cette maladie, les patientes restent encore trop peu informées des possibilités de reconstruction. C'est pourquoi ce 16 octobre, la Société Royale Belge de Chirurgie Reconstructive et Esthétique (RBSPS) a organisé pour la deuxième fois des sessions d'information dans quelque 33 hôpitaux et cliniques du sein, dans le cadre du Breast Reconstruction Awareness Day, une manifestation organisée dans 25 pays. Être informée avant l'ablation des possibilités de reconstruction permet en effet aux femmes de prendre une décision dans les meilleures conditions mais leur offre aussi une perspective d'avenir, un " après " la maladie souvent essentiel d'un point de vue psychologique. www.rbsps.org