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Une femme de 44 ans s'est présentée à l'Infirmerie royale d'Édimbourg avec de vives douleurs dans le bras et l'épaule gauche. Les radiographies ont montré des pertes de mouvement dans le bras et l'épaule gauche ainsi qu'une lésion dans son humérus.Deux mois plus tard, alors que les douleurs persistent, la quadragénaire retourne à l'hôpital. L'équipe médicale suspecte un cancer et pratique une biopsie qui révèle une anomalie vasculaire au niveau de l'os ainsi que la présence d'un cal osseux mais écarte la possibilité d'un cancer.Autant d'éléments qui laissent penser qu'il s'agit d'une fracture anodine, probablement due à une chute.Douze mois passent mais les douleurs sont toujours là, avec une nouvelle fracture détectée à l'épaule. Incapables d'identifier ce qui cause de telles douleurs, les médecins sont déconcertés. Dans la foulée, ils prescrivent à la patiente des examens médicaux plus poussés, dont une angiographie qui permet de voir l'état des vaisseaux sanguins.Résultat ? Les vaisseaux sanguins et lymphatiques se sont propagés dans l'humérus. Un mois plus tard, ce même os a presque complètement disparu, comme évaporé. Même constat concernant l'os ulnaire de son avant-bras.Finalement, 18 mois après sa première visite à l'hôpital, les scans confirment que la patiente a perdu ces os-là. Entretemps, les médecins ont compris l'origine de ses maux : elle souffre d'une pathologie extrêmement rare appelée maladie de Gorham-Stout.Depuis sa première description en 1955, une controverse demeure quant à l'étiologie, le pronostic et la prise en charge de la maladie de Gorham-Stout.Ostéolyse spontanée et massive, elle se déclare dans l'enfance ou au début de l'âge adulte, sans préférence de sexe. Elle débute par des douleurs, des fractures spontanées et des tuméfactions sans cause apparente.L'épaule, le crâne ou la ceinture pelvienne sont généralement touchés. Mais les côtes, la colonne vertébrale ou encore la ceinture scapulaire peuvent aussi être affectées.En raison de sa rareté, le diagnostic est difficile et nécessite d'abord l'exclusion de troubles plus communs, y compris les maladies néoplasiques, inflammatoires, infectieuses et endocriniennes.Bien qu'il reste le plus souvent limité à une zone corporelle et qu'il soit généralement sans graves conséquences, ce trouble osseux peut parfois entraîner une déficience invalidante. Dans ce caslà, la prolifération locale des vaisseaux sanguins et lymphatiques détruit progressivement un ou plusieurs os, le plus souvent contigus. Ceux-ci sont littéralement absorbés et finissent donc par disparaître complètement et de manière irréversible, laissant place à un tissu fibreux résiduel. Une évolution dramatique qui a inspiré l'appellation de " maladie de disparition de l'os " ou " maladie de l'os fantôme ".Les complications comprennent aussi la propagation de la maladie aux vertèbres, conduisant à un épanchement pleural et une quadriplégie.Le cas de la patiente d'Édimbourg est rare. Selon une étude publiée dans le BMJ Case Reports (*), seulement 64 cas ont été enregistrés dans la littérature médicale dont 8 concernant l'humérus.Ce qui cause cette maladie reste mal compris. Aucun facteur de risque environnemental, immunologique ou génétique n'a été identifié à ce jour.Certains chercheurs ont émis l'hypothèse qu'elle soit liée à une mauvaise circulation sanguine. Les zones touchées pourraient avoir une carence en oxygène perturbant l'équilibre du pH dans le corps et activant des enzymes spécifiques qui causeraient finalement la destruction de l'os.Et, malheureusement, à l'heure actuelle, il n'y a toujours pas de remède bien défini en dehors des thérapies mises en oeuvre dans les zones affectées et des traitements concernant les symptômes spécifiques qui apparaissent au fur et à mesure de la progression de la maladie.Pour améliorer leur confort de vie, les malades ont recours à de la chirurgie orthopédique ou à des séances de radiothérapie.Ils peuvent aussi suivre un traitement médical visant à ralentir la perte osseuse et à diminuer le risque de fracture. Il consiste à prendre une ou plusieurs des molécules suivantes : vitamine D, fluorure de sodium, glycérophosphate calcique, interféron alfa-2b et biphosphonates, une classe de médicaments aussi utilisée pour soigner l'ostéoporose et les métastases osseuses." En fin de compte, il s'agit d'une maladie difficile à gérer car les données probantes font défaut ", ont déclaré les chercheurs qui se sont penchés sur le dernier cas connu.Curieusement, il arrive également que la maladie disparaisse aussi mystérieusement qu'elle est apparue.En ce qui concerne la patiente écossaise, aucune information supplémentaire quant à son traitement n'a encore été révélée.