La "Commission fédérale de contrôle et d'évaluation de l'euthanasie" a officiellement réagi vendredi à un important arrêt rendu le 4 octobre par la Cour européenne des droits de l'homme au sujet de l'euthanasie d'une femme belge. La Commission prend acte des manquements soulevés par la CEDH dans le contrôle post-euthanasie tel que prévu par la loi belge, mais pointe qu'il revient au législateur d'y remédier.
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La CEDH était appelée à se prononcer sur le cas d'une femme euthanasiée en 2012, dont le fils, Tom Mortier, a ensuite entamé un combat judiciaire contre le médecin ayant pratiqué l'euthanasie. Wim Distelmans, le médecin en question, est également président (néerlandophone) de la Commission fédérale de contrôle et d'évaluation de l'euthanasie.C'est sur cet unique point que la CEDH est allée dans le sens du requérant et a trouvé à redire: le fonctionnement de cette Commission de contrôle, et plus précisément ce que la loi prévoit pour garantir son indépendance dans l'examen de chaque dossier d'euthanasie qui lui est confié, pose problème, a constaté la Cour. La Cour ne pointe pas une éventuelle influence malvenue dans le cas précis de Lieve De Troyer (la mère de Tom Mortier), dont elle n'a pas trouvé de preuve, mais bien un manque d'encadrement adéquat dans la loi.Un médecin qui pratique une euthanasie doit remplir un document (document d'enregistrement), qui est transmis dans les jours qui suivent à la fameuse Commission fédérale. Le rôle de cette dernière est alors de vérifier que l'euthanasie pratiquée s'est bien faite selon les règles, en respectant les garde-fous et conditions prévus dans la loi (demande répétée et volontaire du patient, souffrance sans issue, avis de deux médecins, etc.). S'il apparait qu'il y a une potentielle irrégularité, le dossier est transmis à la Justice.Dans un premier temps, la Commission ne base son jugement que sur un document anonymisé (une des parties du dossier). Elle n'est donc pas censée savoir quel médecin a pratiqué l'euthanasie et rédigé le rapport. C'est comme cela que le prévoit la loi, qui n'oblige donc pas non plus le médecin concerné, s'il fait également partie de la Commission, de s'en retirer lors de l'examen d'une euthanasie qu'il a lui-même pratiquée.C'est ce manquement que pointe la CEDH: la procédure "n'empêche pas le médecin qui a pratiqué l'euthanasie de siéger dans la Commission et de voter sur la question de savoir si ses propres actes étaient compatibles avec les exigences matérielles et procédurales du droit interne". Dans les faits, une règle tacite veut que le médecin, quand il se rend compte qu'on traite un de ses dossiers, garde le silence. Mais ce n'est pas suffisant légalement pour assurer l'indépendance de la Commission, tranche la Cour.Pour la Commission fédérale de contrôle et d'évaluation de l'euthanasie, la seule solution est "une levée de l'anonymat du document d'enregistrement d'une euthanasie". Le document examiné par la Commission mentionnerait alors le médecin ayant pratiqué l'euthanasie ainsi que les médecins consultés au sujet du patient. Mais "cette levée de l'anonymat suppose une modification de la loi du 28 mai 2002 relative à l'euthanasie", pointe la Commission. "Ceci n'est pas du ressort de la Commission mais bien du législateur."Belga