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Que l'on songe aux chiens secouristes lors de catastrophes ou aux chiens renifleurs habiles à sentir la drogue, cela fait déjà longtemps que le flair de cet animal, bien plus développé que le nôtre, est utilisé pour épauler l'homme. Et à l'avenir, le chien, par ailleurs capable d'assister les malvoyants ou encore les personnes à mobilité réduite, pourrait aussi devenir un " outil " de dépistage non invasif de diverses pathologies.Alors que, depuis une dizaine d'années, des expériences ont prouvé que le meilleur ami de l'homme est capable de détecter les cancers du sein ou de la prostate, le voici désormais formé à repérer les problèmes de glycémie chez les humains et à devenir un véritable ange gardien pour les patients diabétiques.Si plusieurs cas de chiens capables de déceler les premiers signes d'hypoglycémie de leur maîtres atteints de diabète type 1 avaient déjà été décrits dans la littérature et si une étude de 2016 (1) réalisée à Cambridge avait mis en lumière les facultés de ces animaux à détecter les composés volatils présents dans l'haleine de patients diabétiques en hypoglycémie, jamais une recherche bien menée n'avait été faite à large échelle pour le démontrer. C'est chose faite désormais.En collaboration avec la Medical Detection Dogs, une organisation caritative basée au Royaume-Uni qui s'occupe de former des chiens à des fins de détection médicale, une équipe de l'Université de Bristol s'est penchée sur la précision avec laquelle les canidés peuvent détecter l'hypoglycémie ou l'hyperglycémie chez les personnes touchées par le diabète de type 1. (2)Les chercheurs ont évalué la fiabilité de 27 chiens d'alerte à la glycémie, bien entraînés, dont les propriétaires ont fourni pendant six à douze semaines des analyses détaillées de leur sang à chaque alerte déclenchée par leur compagnon à pattes.Il en est ressorti que les animaux ont détecté 83% des hypoglycémies et 67% des hyperglycémies sur un total de plus de 4.000 épisodes examinés. La médiane de valeur prédictive positive a été de 81%. Sur les 27 chiens, trois étaient sous les 50% de succès, tandis que quatre ont réussi dans 100% des épisodes. La performance des canidés a toutefois varié en fonction de leurs caractéristiques individuelles, mais aussi de leur complicité avec leur maître et la famille. Ils ont aussi été en moyenne moins efficaces avec les enfants qu'avec les adultes, un constat que les chercheurs expliquent par la longue séparation qu'entraînent les heures d'école.Les résultats sont plus qu'encourageants car dès lors qu'il perçoit une odeur pouvant être causée par un taux particulièrement faible ou élevé de glucose dans l'organisme de son maître, le chien peut prévenir ce dernier.Un certain nombre de comportements d'alerte ont en effet été inculqués aux chiens selon une méthode arrivée des Etats-Unis par le biais de Jennifer Cattet, formatrice franco-américaine en éducation canine pour diabétiques.Ainsi, lorsqu'il ressent l'imminence d'une crise de diabète, le fidèle compagnon canin peut avertir son propriétaire en frottant avec insistance sa truffe contre ses jambes et, si ce dernier ne réagit pas, il peut même appuyer sur un bouton d'alarme permettant d'alerter l'entourage du diabétique. Du coup, le patient peut prendre à temps les mesures appropriées : s'administrer de l'insuline ou manger pour conserver le bon niveau de glucose et ainsi éviter un accident. L'étude de l'Université de Bristol vient donc confirmer des hypothèses émises depuis maintenant plusieurs années, notamment celle qui veut que la qualité de vie des patients diabétiques s'améliore considérablement grâce à la présence d'un chien de dépistage médical.Selon le Dr Nicola Rooney, auteur principal, " il est désormais essentiel que la recherche se poursuive afin d'évaluer l'efficacité réelle des chiens d'alerte et de déterminer les moyens d'optimiser leurs performances. "Quant au Dr Claire Guest, directrice générale et cofondatrice de Medical Detection Dogs, elle en vient à rêver à d'autres possibilités. " Compte tenu de leur odorat extrêmement raffiné, pourquoi les chiens que nous formons ne pourraient-ils pas détecter d'autres troubles médicaux ? ", se demande-t-elle.Reste qu'entraîner un chien, cela prend du temps et coûte cher, ce qui constitue un frein pour ce type de prise en charge. Chez Acadia (chiens d'assistance pour diabétiques), une association française mise sur pied il y a moins de deux ans, on évalue entre 6 et 18 mois le temps requis pour apprendre à des chiens issus de refuge à détecter les changements glycémiques dans la sueur et l'haleine de leur maître et à donner l'alerte. (3) Une formation dont le coût est évalué à environ 30.000 euros par chien, sachant que le maître doit lui aussi être formé.Co-fondateur d'Acadia, Arnaud Bertrand, est par conséquent à la recherche de mécènes pour poursuivre une mission qu'il estime absolument nécessaire." Aujourd'hui, nous avons formé trois chiens, mais nous avons plus de 60 candidatures en attente"; souligne la présidente Solène Rabiolet. "A terme, nous espérons en éduquer de 10 à 15 par an... "(1) Diabetes Care, juillet 2016, doi : 10.2337/dc16-0461,(2) PLOS ONE, 15 janvier 2019, doi : 10.1371/journal.pone.0210092,(3) http://www.acadia-asso.org/