Samedi 19 octobre, l'Absym-Bruxelles a organisé un séminaire sur le burnout du médecin. Une des pistes de réponse qui en est sortie et que je voudrais développer ici est celle de la nécessité de rémunérer le médecin pour ses actes non cliniques.
Un médecin bien sûr voit des patients, ce sont les contacts face-à-face et c'est le coeur de sa pratique. Mais pour mener à bien cette tâche et pour s'acquitter de sa mission, qui est rappelons-le de garantir des soins de qualité; ce dont on se rend parfois moins compte, c'est qu'il doit assurer toute une série d'actions satellites nécessaires, chronophages et pour la plupart actuellement non rémunérées.
Ces tâches sont de celles qui ne peuvent être remplacées, par le développement de l'intelligence artificielle par exemple. A les voir disparaître, on prendrait le risque d'une commercialisation et d'une industrialisation du système de soins à visée pure de rentabilité qui aurait des conséquences néfastes tant pour le patient que pour le médecin.
Aperçu des tâches non cliniques
Quelles sont ces tâches?
Tout d'abord, le médecin passe un temps non négligeable de concertation autour de son patient : appels téléphoniques, rédaction de rapports et de certificats, suivi des documents administratifs, contacts avec la famille, contacts avec les autres professionnels, animation et supervision d'équipes pluridisciplinaires quand on travaille en institution...
Toutes ces occupations visent à peser l'éthique des décisions cliniques, pour éviter une médicalisation abusive par exemple. Elles permettent de donner de soins biomédicopsychosociaux, c'est-à-dire des soins complets, individualisés où la personne est prise en compte dans sa globalité. Il y a une place pour la négociation avec le patient et sa famille pour décider ensemble de la meilleure prise en charge, et ensuite d'en assurer la continuité. Il vaut mieux, par exemple, prendre du temps pour expliquer la nécessité de tel ou tel traitement, éventuellement réduire les doses en cas d'effets secondaires, parler à la famille pour qu'elle puisse soutenir la prise de ce traitement et éviter de ce fait une intervention chirurgicale pas absolument indispensable ou une hospitalisation longue et coûteuse.
Ce processus peut sembler non rentable dans une visée rationaliste, alors qu'il permet probablement une économie des coûts par une meilleure adéquation des soins. Il ne peut pas être réalisé par une machine artificielle, aussi intelligente soit-elle, du fait du processus constant d'adaptation aux dires du patient et de la nécessité d'habiletés d'empathie et d'écoute. Il demande du temps et de l'engagement et n'est actuellement, pour sa grande partie pas ou très peu rémunéré.
Nécessaire informatisation
Mais ce n'est pas tout, le médecin lambda se voit sommé de s'informatiser et de maintenir à jour le dossier médical de son patient. Il doit veiller à s'équiper adéquatement, se former à l'utilisation des programmes informatiques et passer ensuite du temps pour compléter ces dossiers malgré les aléas informatiques quotidiens, les dysfonctionnements et autres bugs. Prendre connaissance des résultats des examens complémentaires, les importer dans le dossier informatique, se planter, recommencer, les classer dans le dossier, rédiger et envoyer les courriers récapitulatifs aux autres intervenants professionnels, rédiger la note de consultation, avertir le patient quand un résultat sort de la norme, ... Toutes ces démarches sont actuellement extrêmement chronophages et sans aucun incitant financier. Le médecin spécialiste n'a actuellement aucune aide non plus à son informatisation de base.
Et puis, il ne faut pas oublier que le médecin est impliqué dans un processus de formation continue et de qualité. Ainsi, il est fréquent et souhaitable qu'il participe à des formations qui visent à acquérir et améliorer ses habiletés manuelles, techniques, comportementales et communicationnelles, qu'il soutienne la formation des équipes dans lesquelles il travaille pour améliorer le processus d'accompagnement, qu'il participe à la recherche scientifique, qu'il organise des supervisions, ou qu'il se fasse lui-même superviser. Où trouver le temps et les ressources quand ces démarches sont pas ou peu rétribuées ?
Organiser les soins
Enfin, le médecin participe à la dimension organisationnelle des soins au sein de son institution, en prenant part aux rencontres stratégiques et opérationnelles avec la direction, et entre institutions, en rencontrant les autres acteurs de soins et en soutenant l'interconnaissance dans le réseau.
S'il a encore le courage, le temps, l'énergie et l'envie, le médecin a également toute sa place dans l'organisation des soins de santé de façon plus large, où il peut soutenir et promouvoir la place centrale du patient pour recevoir des soins de qualité fourni par un médecin heureux et satisfait de ses conditions de travail...
On a bien compris, malheureusement, qu'arrivé à ce stade, le médecin, lessivé, débordé , surmené, n'a qu'une envie : celle d'aller au lit devant un bon western (et s'endormir après le 1er quart d'heure) et on ne pourra pas l'en blâmer.
On le voit, pour redonner l'envie au médecin de se consacrer à sa clinique et pour lui permettre de rester aussi un interlocuteur valable dans la gestion de soins, une solution s'impose : rémunérer son activité non clinique ! A bon entendeur...
Un médecin bien sûr voit des patients, ce sont les contacts face-à-face et c'est le coeur de sa pratique. Mais pour mener à bien cette tâche et pour s'acquitter de sa mission, qui est rappelons-le de garantir des soins de qualité; ce dont on se rend parfois moins compte, c'est qu'il doit assurer toute une série d'actions satellites nécessaires, chronophages et pour la plupart actuellement non rémunérées.Ces tâches sont de celles qui ne peuvent être remplacées, par le développement de l'intelligence artificielle par exemple. A les voir disparaître, on prendrait le risque d'une commercialisation et d'une industrialisation du système de soins à visée pure de rentabilité qui aurait des conséquences néfastes tant pour le patient que pour le médecin.Quelles sont ces tâches?Tout d'abord, le médecin passe un temps non négligeable de concertation autour de son patient : appels téléphoniques, rédaction de rapports et de certificats, suivi des documents administratifs, contacts avec la famille, contacts avec les autres professionnels, animation et supervision d'équipes pluridisciplinaires quand on travaille en institution...Toutes ces occupations visent à peser l'éthique des décisions cliniques, pour éviter une médicalisation abusive par exemple. Elles permettent de donner de soins biomédicopsychosociaux, c'est-à-dire des soins complets, individualisés où la personne est prise en compte dans sa globalité. Il y a une place pour la négociation avec le patient et sa famille pour décider ensemble de la meilleure prise en charge, et ensuite d'en assurer la continuité. Il vaut mieux, par exemple, prendre du temps pour expliquer la nécessité de tel ou tel traitement, éventuellement réduire les doses en cas d'effets secondaires, parler à la famille pour qu'elle puisse soutenir la prise de ce traitement et éviter de ce fait une intervention chirurgicale pas absolument indispensable ou une hospitalisation longue et coûteuse.Ce processus peut sembler non rentable dans une visée rationaliste, alors qu'il permet probablement une économie des coûts par une meilleure adéquation des soins. Il ne peut pas être réalisé par une machine artificielle, aussi intelligente soit-elle, du fait du processus constant d'adaptation aux dires du patient et de la nécessité d'habiletés d'empathie et d'écoute. Il demande du temps et de l'engagement et n'est actuellement, pour sa grande partie pas ou très peu rémunéré.Mais ce n'est pas tout, le médecin lambda se voit sommé de s'informatiser et de maintenir à jour le dossier médical de son patient. Il doit veiller à s'équiper adéquatement, se former à l'utilisation des programmes informatiques et passer ensuite du temps pour compléter ces dossiers malgré les aléas informatiques quotidiens, les dysfonctionnements et autres bugs. Prendre connaissance des résultats des examens complémentaires, les importer dans le dossier informatique, se planter, recommencer, les classer dans le dossier, rédiger et envoyer les courriers récapitulatifs aux autres intervenants professionnels, rédiger la note de consultation, avertir le patient quand un résultat sort de la norme, ... Toutes ces démarches sont actuellement extrêmement chronophages et sans aucun incitant financier. Le médecin spécialiste n'a actuellement aucune aide non plus à son informatisation de base.Et puis, il ne faut pas oublier que le médecin est impliqué dans un processus de formation continue et de qualité. Ainsi, il est fréquent et souhaitable qu'il participe à des formations qui visent à acquérir et améliorer ses habiletés manuelles, techniques, comportementales et communicationnelles, qu'il soutienne la formation des équipes dans lesquelles il travaille pour améliorer le processus d'accompagnement, qu'il participe à la recherche scientifique, qu'il organise des supervisions, ou qu'il se fasse lui-même superviser. Où trouver le temps et les ressources quand ces démarches sont pas ou peu rétribuées ?Enfin, le médecin participe à la dimension organisationnelle des soins au sein de son institution, en prenant part aux rencontres stratégiques et opérationnelles avec la direction, et entre institutions, en rencontrant les autres acteurs de soins et en soutenant l'interconnaissance dans le réseau.S'il a encore le courage, le temps, l'énergie et l'envie, le médecin a également toute sa place dans l'organisation des soins de santé de façon plus large, où il peut soutenir et promouvoir la place centrale du patient pour recevoir des soins de qualité fourni par un médecin heureux et satisfait de ses conditions de travail...On a bien compris, malheureusement, qu'arrivé à ce stade, le médecin, lessivé, débordé , surmené, n'a qu'une envie : celle d'aller au lit devant un bon western (et s'endormir après le 1er quart d'heure) et on ne pourra pas l'en blâmer.On le voit, pour redonner l'envie au médecin de se consacrer à sa clinique et pour lui permettre de rester aussi un interlocuteur valable dans la gestion de soins, une solution s'impose : rémunérer son activité non clinique ! A bon entendeur...