Le site internet www.ar78.be, qui expose dans les grandes lignes la réforme de l'AR 78, est une excellente source d'inspiration pour l'auteur de ces lignes. L'une des plus grandes nouveautés réside dans la définition des soins de santé, qui comporteraient désormais deux grands volets.
Le premier recouvre "les services à visée diagnostique ou thérapeutique dispensés à un patient, en ce compris son accompagnement individuel". Notons au passage que la définition qui figure dans l'AR 78 actuel ("les services dispensés [...] en vue de promouvoir, de déterminer, de conserver, de restaurer ou d'améliorer l'état de santé d'un patient, de modifier son apparence corporelle à des fins principalement esthétiques ou de l'accompagner en fin de vie") recouvre bien plus que les services à visée diagnostique ou thérapeutique qui correspondent en réalité à la définition classique de la médecine - on songe par exemple ici aux services pharmaceutiques ou infirmiers. L'accompagnement individuel du patient représente par contre un élargissement assez curieux, puisqu'il relève davantage du "prendre soin" que des soins proprement dits et pourrait donc se comprendre comme un aspect de la compétence communautaire qu'est l'aide aux personnes.
Le second volet est plus problématique encore, puisque les soins de santé recouvriront également "les services sans objectif diagnostique ou thérapeutique dispensés à un patient pour lesquels un praticien professionnel des soins de santé a la compétence exclusive". Le site internet en mentionne neuf dont l'euthanasie, qui ressort de la compétence exclusive du corps médical en vertu de la loi spécifique qui lui est consacrée.
Le but explicite est que cette nouvelle définition des soins de santé soit également utilisée pour l'application "des autres lois relatives aux soins de santé", dont notamment celle qui concerne les droits du patient... la conséquence étant que le droit à des prestations de qualité (article 5 de ladite loi) s'appliquera également à l'euthanasie. En clair, il existera donc désormais un droit à l'euthanasie dans le chef du patient et donc, dans celui du médecin, une obligation de la pratiquer si "nécessaire" ou à tout le moins de référer l'intéressé à un confrère. Les auteurs des textes qui figurent actuellement sur le site objecteront sans doute que ce n'était pas du tout leur objectif, mais le résultat est là - et, si c'était en réalité bien le but poursuivi, mieux vaudrait jouer cartes sur table.
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"Personne ne sait très bien pourquoi il était nécessaire d'introduire une nouvelle définition des soins de santé : l'ancienne ne présentait aucun problème majeur... ce que l'on ne peut pas dire du texte actuellement sur la table."
Quel est donc le but de cette mention explicite de l'euthanasie et de certains autres actes dans la définition des soins de santé ? En première instance, une volonté de mettre un terme à un débat qui divise actuellement les juristes de notre pays : un acte comme l'euthanasie peut-il ou non être considéré comme "un acte médical normal" (plutôt que comme une prestation relevant des soins de santé) ? En réalité, le législateur avait déjà tranché la question en 2002 en décidant de régler la problématique de l'euthanasie en-dehors du cadre de l'AR 78... mais cela n'a pas suffi à clore le débat et rien ne permet de penser qu'il en ira autrement avec la nouvelle définition. Le législateur est capable de bien des choses, mais "mettre un terme au débat" est un objectif pour le moins ambitieux dans un état de droit démocratique qui garantit la liberté d'expression.
Un second objectif est que "les garanties de qualité qui seront déterminées pour les soins de santé [soient] également d'application pour ces actes". Il s'agit sans aucun doute d'une noble cause, mais qui n'impose pas pour autant automatiquement de considérer l'euthanasie et les autres prestations visées comme des actes relevant des soins de santé. Le praticien qui procède à une euthanasie sera de toute façon, en sa qualité de médecin, soumis à toutes les normes de qualité qui seront fixées à l'avenir dans les successeurs juridiques de l'AR 78, sans compter qu'il restera également soumis aux dispositions très strictes de la loi sur l'euthanasie.
En conclusion, personne ne sait très bien pourquoi il était nécessaire d'introduire une nouvelle définition des soins de santé : l'ancienne ne présentait aucun problème majeur... ce que l'on ne peut pas dire du texte actuellement sur la table.
Le premier recouvre "les services à visée diagnostique ou thérapeutique dispensés à un patient, en ce compris son accompagnement individuel". Notons au passage que la définition qui figure dans l'AR 78 actuel ("les services dispensés [...] en vue de promouvoir, de déterminer, de conserver, de restaurer ou d'améliorer l'état de santé d'un patient, de modifier son apparence corporelle à des fins principalement esthétiques ou de l'accompagner en fin de vie") recouvre bien plus que les services à visée diagnostique ou thérapeutique qui correspondent en réalité à la définition classique de la médecine - on songe par exemple ici aux services pharmaceutiques ou infirmiers. L'accompagnement individuel du patient représente par contre un élargissement assez curieux, puisqu'il relève davantage du "prendre soin" que des soins proprement dits et pourrait donc se comprendre comme un aspect de la compétence communautaire qu'est l'aide aux personnes.Le second volet est plus problématique encore, puisque les soins de santé recouvriront également "les services sans objectif diagnostique ou thérapeutique dispensés à un patient pour lesquels un praticien professionnel des soins de santé a la compétence exclusive". Le site internet en mentionne neuf dont l'euthanasie, qui ressort de la compétence exclusive du corps médical en vertu de la loi spécifique qui lui est consacrée.Le but explicite est que cette nouvelle définition des soins de santé soit également utilisée pour l'application "des autres lois relatives aux soins de santé", dont notamment celle qui concerne les droits du patient... la conséquence étant que le droit à des prestations de qualité (article 5 de ladite loi) s'appliquera également à l'euthanasie. En clair, il existera donc désormais un droit à l'euthanasie dans le chef du patient et donc, dans celui du médecin, une obligation de la pratiquer si "nécessaire" ou à tout le moins de référer l'intéressé à un confrère. Les auteurs des textes qui figurent actuellement sur le site objecteront sans doute que ce n'était pas du tout leur objectif, mais le résultat est là - et, si c'était en réalité bien le but poursuivi, mieux vaudrait jouer cartes sur table. "Personne ne sait très bien pourquoi il était nécessaire d'introduire une nouvelle définition des soins de santé : l'ancienne ne présentait aucun problème majeur... ce que l'on ne peut pas dire du texte actuellement sur la table."Quel est donc le but de cette mention explicite de l'euthanasie et de certains autres actes dans la définition des soins de santé ? En première instance, une volonté de mettre un terme à un débat qui divise actuellement les juristes de notre pays : un acte comme l'euthanasie peut-il ou non être considéré comme "un acte médical normal" (plutôt que comme une prestation relevant des soins de santé) ? En réalité, le législateur avait déjà tranché la question en 2002 en décidant de régler la problématique de l'euthanasie en-dehors du cadre de l'AR 78... mais cela n'a pas suffi à clore le débat et rien ne permet de penser qu'il en ira autrement avec la nouvelle définition. Le législateur est capable de bien des choses, mais "mettre un terme au débat" est un objectif pour le moins ambitieux dans un état de droit démocratique qui garantit la liberté d'expression.Un second objectif est que "les garanties de qualité qui seront déterminées pour les soins de santé [soient] également d'application pour ces actes". Il s'agit sans aucun doute d'une noble cause, mais qui n'impose pas pour autant automatiquement de considérer l'euthanasie et les autres prestations visées comme des actes relevant des soins de santé. Le praticien qui procède à une euthanasie sera de toute façon, en sa qualité de médecin, soumis à toutes les normes de qualité qui seront fixées à l'avenir dans les successeurs juridiques de l'AR 78, sans compter qu'il restera également soumis aux dispositions très strictes de la loi sur l'euthanasie.En conclusion, personne ne sait très bien pourquoi il était nécessaire d'introduire une nouvelle définition des soins de santé : l'ancienne ne présentait aucun problème majeur... ce que l'on ne peut pas dire du texte actuellement sur la table.