À l'approche de la Healthcare Week Luxembourg 2025, prévue en octobre prochain, le Pr Giovanni Briganti et le Dr Alexandre Hebert ont présenté leur vision de l'intelligence artificielle, de l'intégration dans le système de santé à l'intégration clinique.
"L'intelligence artificielle en santé touche à tous les domaines", pose d'emblée le Pr Giovanni Briganti. Le psychiatre spécialiste de l'IA (UMons) trace les contours d'un paysage en mutation rapide : soins cliniques, organisation hospitalière, logistique, recherche, formation. Aucun pan de la santé n'échappe à la pénétration de l'IA.
Certaines applications impressionnent, comme la surveillance à distance des patients à haut risque, grâce à des modèles idiographiques. "Un patient cardiaque, par exemple, peut être suivi en temps réel, avec une prédiction du prochain épisode aigu", illustre le chercheur. D'autres outils sont déjà devenus la norme, notamment dans la prise en charge du diabète de type 1. "L'IA constitue non pas une prise en charge optimale, mais la prise en charge de référence."
L'IA ne remplace pas pour autant l'humain, éternelle crainte. Giovanni Briganti prend l'exemple de trois métiers basé sur le diagnostic : la radiologie, l'anatomopathologie et la médecine d'urgence. "Ces trois métiers sont souvent ciblés par des articles de presse comparant l'efficacité du professionnel face à l'IA. Mais les études scientifiques actuellement disponibles ne permettent pas d'affirmer que l'IA dépasse l'humain, sauf dans des conditions expérimentales très précises."
Le terrain, lui, démontre un intérêt dans l'IA. "Au sein de mon laboratoire, nous avons mené une enquête nationale - la seule de ce genre au monde - pour étudier comment les professionnels adoptent les logiciels d'intelligence artificielle", explique le chercheur montois. Cela a montré que les professionnels souhaitent avant tout "améliorer la qualité des soins, gagner en précision et réduire la charge administrative". Ce dernier point est crucial : "Chez les médecins, l'administratif représente entre 50 et 80 % de la charge de travail. Chez les infirmiers et paramédicaux, c'est 20 à 40 %. C'est une perte de sens."
À Vivalia, une implémentation raisonnée
"L'IA fait déjà partie du quotidien des professionnels de santé. Le tout est de l'utiliser à bon escient", souligne le Dr Alexandre Hebert, directeur général aux affaires médicales chez Vivalia. L'implémentation ne peut être ni précipitée, ni dogmatique. Le groupe hospitalier a structuré sa stratégie autour du plan "PILOTE", où le "I" d'innovation donne une place claire aux technologies émergentes.
"Notre objectif est simple : redonner du temps aux soignants au chevet du patient." En période de pénurie, l'IA est vue comme un allié, non comme un substitut, ce qui vient corroborer les résultats de l'enquête menée par le Pr Briganti. Un partenariat avec un intégrateur de solutions permet d'adapter les outils aux besoins réels. "Nous ne voulons pas de gadgets, mais des réponses concrètes à des problématiques identifiées par nos équipes", spécifie l'urgentiste.
Parmi les projets en cours, on note l'aide au diagnostic en radiologie osseuse et thoracique, l'optimisation du flux patient aux urgences via un pré-encodage intelligent, et la structuration des données issues des dossiers médicaux. "Lors d'un hackathon, nous avons pu tester un algorithme capable d'extraire les informations les plus pertinentes pour les cliniciens, de manière claire et accessible."
Alexandre Hebert insiste sur la formation, essentielle. "Le meilleur outil du monde ne sert à rien si on ne sait pas l'utiliser." L'adhésion passe aussi par l'implication des chefs de service dès les premières étapes. "Ce sont eux qui valident les choix, testent les solutions et accompagnent leur déploiement."
Une convergence lucide entre vision et terrain
Si les approches du Pr Briganti et du Dr Hebert diffèrent - l'un penche vers la conceptualisation, l'autre vers l'opérationnel - elles convergent sur l'essentiel : l'IA ne peut être qu'un outil. "Le nec plus ultra de la technologie ne vaut que s'il s'appuie sur une ingénierie clinique solide", insiste Giovanni Briganti. Autrement dit, une vision, des valeurs, et une connaissance fine des priorités de chaque institution.
Le retour sur investissement est réel, "estimé à trois euros pour chaque euro investi dans le digital en santé", précise le chercheur. Mais il ne se mesure pas qu'en chiffres. Il s'incarne aussi dans le bien-être au travail, la fidélisation des équipes et la qualité de la relation soignant-soigné.
Le débat se poursuivra lors de la Healthcare Week Luxembourg, les 7 et 8 octobre prochain.
"L'intelligence artificielle en santé touche à tous les domaines", pose d'emblée le Pr Giovanni Briganti. Le psychiatre spécialiste de l'IA (UMons) trace les contours d'un paysage en mutation rapide : soins cliniques, organisation hospitalière, logistique, recherche, formation. Aucun pan de la santé n'échappe à la pénétration de l'IA.Certaines applications impressionnent, comme la surveillance à distance des patients à haut risque, grâce à des modèles idiographiques. "Un patient cardiaque, par exemple, peut être suivi en temps réel, avec une prédiction du prochain épisode aigu", illustre le chercheur. D'autres outils sont déjà devenus la norme, notamment dans la prise en charge du diabète de type 1. "L'IA constitue non pas une prise en charge optimale, mais la prise en charge de référence."L'IA ne remplace pas pour autant l'humain, éternelle crainte. Giovanni Briganti prend l'exemple de trois métiers basé sur le diagnostic : la radiologie, l'anatomopathologie et la médecine d'urgence. "Ces trois métiers sont souvent ciblés par des articles de presse comparant l'efficacité du professionnel face à l'IA. Mais les études scientifiques actuellement disponibles ne permettent pas d'affirmer que l'IA dépasse l'humain, sauf dans des conditions expérimentales très précises." Le terrain, lui, démontre un intérêt dans l'IA. "Au sein de mon laboratoire, nous avons mené une enquête nationale - la seule de ce genre au monde - pour étudier comment les professionnels adoptent les logiciels d'intelligence artificielle", explique le chercheur montois. Cela a montré que les professionnels souhaitent avant tout "améliorer la qualité des soins, gagner en précision et réduire la charge administrative". Ce dernier point est crucial : "Chez les médecins, l'administratif représente entre 50 et 80 % de la charge de travail. Chez les infirmiers et paramédicaux, c'est 20 à 40 %. C'est une perte de sens." "L'IA fait déjà partie du quotidien des professionnels de santé. Le tout est de l'utiliser à bon escient", souligne le Dr Alexandre Hebert, directeur général aux affaires médicales chez Vivalia. L'implémentation ne peut être ni précipitée, ni dogmatique. Le groupe hospitalier a structuré sa stratégie autour du plan "PILOTE", où le "I" d'innovation donne une place claire aux technologies émergentes."Notre objectif est simple : redonner du temps aux soignants au chevet du patient." En période de pénurie, l'IA est vue comme un allié, non comme un substitut, ce qui vient corroborer les résultats de l'enquête menée par le Pr Briganti. Un partenariat avec un intégrateur de solutions permet d'adapter les outils aux besoins réels. "Nous ne voulons pas de gadgets, mais des réponses concrètes à des problématiques identifiées par nos équipes", spécifie l'urgentiste.Parmi les projets en cours, on note l'aide au diagnostic en radiologie osseuse et thoracique, l'optimisation du flux patient aux urgences via un pré-encodage intelligent, et la structuration des données issues des dossiers médicaux. "Lors d'un hackathon, nous avons pu tester un algorithme capable d'extraire les informations les plus pertinentes pour les cliniciens, de manière claire et accessible."Alexandre Hebert insiste sur la formation, essentielle. "Le meilleur outil du monde ne sert à rien si on ne sait pas l'utiliser." L'adhésion passe aussi par l'implication des chefs de service dès les premières étapes. "Ce sont eux qui valident les choix, testent les solutions et accompagnent leur déploiement." Si les approches du Pr Briganti et du Dr Hebert diffèrent - l'un penche vers la conceptualisation, l'autre vers l'opérationnel - elles convergent sur l'essentiel : l'IA ne peut être qu'un outil. "Le nec plus ultra de la technologie ne vaut que s'il s'appuie sur une ingénierie clinique solide", insiste Giovanni Briganti. Autrement dit, une vision, des valeurs, et une connaissance fine des priorités de chaque institution.Le retour sur investissement est réel, "estimé à trois euros pour chaque euro investi dans le digital en santé", précise le chercheur. Mais il ne se mesure pas qu'en chiffres. Il s'incarne aussi dans le bien-être au travail, la fidélisation des équipes et la qualité de la relation soignant-soigné.Le débat se poursuivra lors de la Healthcare Week Luxembourg, les 7 et 8 octobre prochain.