L'absentéisme dans les services de police belges est bien plus élevé (8%) que dans le secteur privé (environ 5%). Les raisons de cet écart sont actuellement à l'étude. Afin de renverser la vapeur, la police s'apprête à recruter une série de médecins. Dans les prochaines années, vingt-cinq postes s'ouvriront en effet au service médical.
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Ces chiffres révèlent un monstre à plusieurs têtes, nous explique le docteur Dirk Wynsberghe, médecin-conseil au Centre médical provincial (CMP) de Flandre-Occidentale. "Nous avons besoin d'informations complémentaires pour comprendre les causes de l'absentéisme. Ne faut-il pas prendre en compte certains éléments spécifiques à la police comme l'agression, la présence 24h/24 sur le terrain, l'impact du niveau d'alerte 3, etc. Nous devons enquêter sur les implications de ces événements sur le rythme circadien et la vie sociale des agents. "Le docteur Wynsberghe pointe également du doigt l'organisation du travail au sein de la police. "Quel est le rôle des dirigeants? Un meilleur encadrement pourrait encourager les employés à prendre moins de congés de maladie et les aider à reprendre le travail. Prenons l'exemple d'un agent de police à la jambe cassée. Celui-ci reste pendant des mois chez lui, pendant que son service est en pleine refonte. C'est au dirigeant de le tenir au courant des changements opérés pendant son absence. Sinon, le taux de reprise du travail continuera de chuter. " L'idée de base, c'est qu'une politique RH raisonnée peut faire reculer l'absentéisme."Mais il faudrait d'abord définir très clairement ce qu'est l'absentéisme", souligne le docteur Wynsberghe. "Une étude sur la situation en Belgique et à l'étranger arrive actuellement à son terme. Nous entendons aussi analyser soigneusement les deux banques de données disponibles. L'une recense les heures, les prestations, les salaires des agents de police; l'autre constitue une banque de données médicales reprenant, entre autres, les absences. "Le docteur Wynsberghe avoue ressentir de la frustration quant au statut du policier. "Chaque agent a droit à 30 journées (transférables) de maladie pour chaque année à temps plein. Son salaire complet continue à lui être versé, et ce même s'il travaille à mi-temps. Rappelons tout de même qu'après six mois, l'intéressé ne reçoit plus que 60% de ses émoluments. Ensuite, nous évaluons sa disponibilité et son aptitude, avant d'envisager une reprise du travail." A l'avenir, Dirk souhaiterait que cette évaluation se fasse plus précocement, car cela faciliterait la recherche d'un job plus adapté.Néanmoins, tous ces efforts ne résoudront pas à eux seuls l'absentéisme. "Que se passera-t-il si les liens entre les gens d'un même service se trouvent rompus? Il faut trouver une solution statutaire à cela, dans la réglementation même. On peut par exemple procéder à une délocalisation dans une autre zone de police. Cette solution n'est bien sûr pas évidente à mettre en place. Il existe 189 zones de police locale, avec des employés. Muter un agent, c'est comme le changer d'entreprise ", explique Wynsberghe.Le service médical de la police compte huit CMP, une par province, à l'exception du Luxembourg, de Louvain et de Wavre. Les CMP de Bruxelles et du Brabant flamand et wallon se situent dans la Région de Bruxelles-Capitale. La structure d'un CMP est chapeauté par une direction médicale, chargé de la coordination. Celle-ci joue également un rôle dans la formation continue, les exercices catastrophe et la lutte contre le terrorisme. "A l'avenir ", explique Dirk Wynsberghe, "la direction devrait davantage s'occuper de régulation et d'évaluation, et veiller à ce que les agents de police aient les mêmes opportunités de réintégration partout en Belgique."Un CMP est composé, en théorie, de deux médecins-conseils, d'un infirmier et de trois ambulanciers. Dans la pratique, ces fonctions sont rarement toutes occupées. "A Anvers, qui compte le plus grand corps de police du pays, il n'y a par exemple qu'un seul médecin-conseil - à temps partiel - et un membre du personnel infirmier. "Les médecins du CMP sont surtout chargés de la médecine de contrôle, tiennent l'absentéisme à l'oeil et évaluent si les agents de police sont aptes à travailler à temps plein ou partiel. Ils ne s'occupent pas de médecine curative, mais donnent par contre des formations en premiers secours. Il leur arrive aussi de porter assistance sur le terrain, dans des manifestations ou des matches de foot par exemple.A l'avenir, ajoute le docteur Wynsberghe, le but est de mettre en place des équipes médicales à la pluridisciplinarité accrue, avec des psychologues, des assistants sociaux. "Une meilleure réintégration d'un agent absent depuis une courte ou une longue période passe par une concertation entre le médecin-conseil, le médecin du travail, l'assistant social et le dirigeant ", assure-t-il.Au cours des prochaines années, une dizaine de médecins seront engagés pour assurer le bon fonctionnement du service médical de la police. "On manque d'effectifs", déplore le docteur. "Les années suivantes, nous recruterons encore une dizaine d'autres personnes. Au total, 25 à 30 médecins seront engagés."Pour atteindre cette objectif, le ministre des Affaires intérieures, Jan Jambon (N-VA) devra par contre investir dans un salaire attractif pour les médecins du service médical. " Une mesure zéro est prévue pour le début de cette année 2018. Les premiers résultats seront ensuite annoncés pour l'été de l'année suivante. Le ministre aura alors une vue globale du coût et/ou saura s'il peut investir suffisamment. "Geert VerrijkenDirk Wynsberghe: " On manque d'effectifs. Au total, 25 à 30 médecins seront engagés ".JDB