La fin du remboursement des consultations téléphoniques entre en vigueur ce 15 février. Elle a suscité une vive opposition entre l'Absym et le GBO. Au milieu, de nombreux médecins se sont positionnés sur les réseaux contre la mesure...Et en faveur d'une trêve entre les deux syndicats, qui doivent, selon eux, s'atteler à défendre ensemble la profession. Retour sur les événements.
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Les membres de la Commission nationale médico-mutualiste (syndicats, organismes assureurs, Inami et gouvernement) ont l'obligation légale de maintenir à l'équilibre le budget des soins de santé, un budget dont certains postes ont explosé en 2024, contraignant le secteur médical à faire 71 millions d'économies pour compenser le dépassement budgétaire affectant les prévisions 2025. Dans le viseur de nos autorités : les 68 millions de budget représentés par les phono-consultations en 2024... alors qu'aucun budget n'y avait été affecté. L'Inami avait estimé que le remboursement des phono-consultations serait en théorie compensé par une diminution des consultations en cabinet et à domicile, sans prendre en compte une augmentation de la demande de soins de la part de la population."Si les syndicats avaient réussi à protéger ces indispensables phono-consultations jusqu'ici, c'était sans compter sur l'impossibilité de trouver un accord entre les membres de la médico-mut sur des mesures d'économie alternatives", explique le GBO par communiqué. "Une trêve bien courte concernant le remboursement des phono-consultations, victimes d'une politique budgétaire de santé en lieu et place d'une politique de santé, dans un non-système de soins érigé en système de soins."De son côté, l'Absym ajoute : "Cette décision est intervenue sur proposition de Solidaris, soutenue par les autres mutuelles et Domus Medica/AADM, qui a qualifié ces prestations de "sensibles à la fraude". Lors de la réunion du comité de l'assurance, l'Absym a été mise devant le fait accompli et a reçu un véritable couteau sous la gorge. Cependant, l'Absym a pu contester la fraude en soulignant que dans les tableaux soumis, sur un total de 10.935 médecins, il y avait tout au plus 29 valeurs aberrantes."Cette suppression des phono-consultations a suscité de vives tensions entre les syndicats. Dans un récent communiqué, l'Absym a reproché ouvertement au GBO et à AADM de ne pas l'avoir soutenue dans son souhait de supprimer purement et simplement ce code de la nomenclature."Ce qui nous met en colère, c'est que la prestation ait été mise à "0", mais pas abolie, ne laissant d'autre choix que de travailler gratuitement ou de ne plus proposer de consultations téléphoniques. La réponse du cabinet du ministre Vandenbroucke selon laquelle les médecins faisaient cela gratuitement avant l'existence du numéro de nomenclature pour les consultations téléphoniques est un pur mensonge. Auparavant, le médecin avait la liberté de facturer ou non cette prestation. C'est bien différent que d'imposer l'obligation de travailler gratuitement", expliquait encore l'Absym le 14 février, dans un autre communiqué.Le GBO a, entretemps, répondu à l'Absym. "Le GBO/Cartel a en effet fait le choix de privilégier la mise à zéro momentanée (jusqu'à fin juin au maximum, rappelons-le) du code de phono-consultation plutôt que d'accepter sa suppression pure et simple de la nomenclature. Certes, sa suppression aurait permis aux médecins généralistes de pouvoir facturer cette prestation au patient, quel que soit leur statut de conventionnement. Mais l'Absym ignore-t-elle que les généralistes ne facturaient déjà pas les deux euros de ticket modérateur dus par les patients pour une phono-consultation ? Imagine-t-elle qu'il serait plus facile pour les généralistes de facturer aux patients l'honoraire dû pour cette prestation à distance ?"Face à ces tensions, la question demeure : cette suppression est-elle définitive ? Malgré leurs dissensions, les deux syndicats misent sur le groupe de travail pour trouver une issue à l'impasse. "Nous nous battrons bec et ongles pour rétablir les consultations téléphoniques payantes. Pour nous préparer à cette discussion difficile, nous avons besoin d'arguments solides. Nous sommes actuellement en train de préparer cela. Selon nous, une augmentation du ticket modérateur fait déjà partie de la solution. Toute autre suggestion est la bienvenue", avance l'Absym.Le GBO, de son côté, "mettra tout en oeuvre pour que cette disposition inéquitable soit corrigée le plus rapidement possible et que des mesures pérennes soient mises en place : prestation avec un cadre mieux défini, un volume autorisé réaliste et un honoraire suffisant pour le prestataire".En attendant, le GBO prône la téléconsultation. Pour la continuité des soins, mais aussi comme un moyen de pression. "Nous ne pouvons pas accepter que les généralistes ne soient plus rémunérés pour le temps qu'ils consacrent aux consultations à distance. À défaut de pouvoir les faire par téléphone, nous rappelons qu'il existe d'autres solutions pour répondre aux demandes pressantes des patients (les besoins de la population et la pénurie n'ont pas disparu par magie) et recommandons donc de continuer à facturer des avis pour les interventions courtes et de proposer des vidéo-consultations pour remplacer les consultations téléphoniques. Ceci entraînera inévitablement une explosion du budget des vidéo-consultations et des avis en 2025, raison pour laquelle les travaux du groupe de travail téléconsultations devront aboutir rapidement à une solution structurelle pérenne et rationnelle pour les phono-consultations."Une chose est certaine : la profession attend des syndicats qu'ils dépassent leurs divisions pour construire ensemble une réponse adaptée aux besoins du terrain, comme le résume le Dr Thomas Orban : "Il serait peut-être temps d'unir plutôt que de désunir les forces pour un objectif commun : que le travail du médecin généraliste soit honoré justement. Il n'est pas normal que tout le travail que je fais hors consultation, à la demande du patient, ne soit pas honoré. Équilibrer le budget sur notre dos, c'est facile, mais c'est aux syndicats de nous défendre !"