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Le Venezuela, un des pays les plus riches au monde en pétrole, souffre depuis quelques années déjà d'une crise sociale et économique sans précédent, entraînant une crise sanitaire considérable. La chute du cours de l'or noir a entraîné une diminution de sa production, divisée en deux. Le pays ne produit actuellement plus que 1,5 million de barils par jour et en exporte le tiers. Et encore... les États Unis pourraient supprimer leur importation. Les différents programmes sociaux payés en partie par les bénéfices de ce brut se voient petit à petit supprimés. Mais le pays est aussi rongé par d'autres problèmes tels que la corruption et la violence.En 2018, les prix se sont envolés et l'inflation a atteint plus de 13.000 %. L'argent ne vaut plus rien. Les citoyens n'ont plus de quoi se nourrir, ni de quoi se soigner et préfèrent migrer vers la Colombie ou le Brésil. La corruption et le contrôle des prix ont dissuadé les entrepreneurs locaux et étrangers. Le pays a été exclu du marché de la dette et pourrait l'être du FMI. Même ses alliés, la Chine et la Russie, ne leur font plus de prêt. Dans ce pays totalitaire, les importations sont restreintes et hyper taxées et le marché noir s'est développé. Les habitants sont rationnés et seule une partie de la population a accès aux médicaments qui coûtent une fortune et se paient en dollars.C'est dans ce contexte que Codevida, une coalition d'ONG de droit à la santé au Venezuela, s'est organisée pour recevoir de l'aide de l'extérieur. Grâce à un système déployé depuis Madrid et Miami pour importer les médicaments au Venezuela, la distribution est coordonnée via les différentes organisations de la coalition vers les hôpitaux ou directement vers les patients." Nous sommes face à un État criminel ", s'exclame Francisco Valencia, directeur de la Coalition des organisations pour le droit à la santé et à la vie (Codevida). Le défenseur du droit à la santé, menacé et fiché par le gouvernement, lutte depuis des années à travers des manifestations de patients chroniques et des pourparlers, afin de réclamer des traitements, devenus introuvables ou impayables dans son pays.Francisco Valencia est atteint de mucoviscidose. On lui fait des transplantations rénales depuis l'âge de 17 ans. C'est en 2003 que tout s'organise. " À ce moment- là, il y avait déjà des problèmes de distribution de médicaments et on a commencé à faire une série d'actions afin de garantir l'arrivée des remèdes. A l'époque il n'y avait pas de fondation qui orientait les patients et donc avec d'autres collègues qui étaient dans la même situation, nous avons créé les amis " transplantés " du Venezuela. Ensuite nous avons été rejoint par d'autres organisations comme Action solidaire et l'Association vénézuélienne pour l'hémophilie, et ensemble nous avons décidé de créer Codevida ", raconte Francisco Valencia." L'objectif de la coalition était de veiller à ce que les droits pour la santé soient respectés pour tous. Parce que l'argument du gouvernement était alors qu'il n'y avait pas de budget pour tout le monde et qu'il mettait la priorité sur d'autres maladies. Depuis lors, nous nous sommes chargés de veiller sur le droit des malades chroniques dans un premier temps, et pour tous devant la crise humanitaire actuelle ", explique le directeur de Codevida. " Nous travaillons sur la visibilité de la crise humanitaire qui existe au Venezuela en enregistrant des témoignages, en présentant les chiffres, non seulement au niveau national mais aussi international, et nous recherchons des mécanismes pour que l'aide humanitaire arrive dans notre pays ", poursuit-il.La crise sanitaire s'est accentuée. Plus d'incidents se sont répertoriés ces derniers temps, non seulement chez les gens suivis par l'organisation mais aussi dans les hôpitaux. La pénurie a atteint les 90 % cette année. Elle met en danger la vie de plus de 300.000 personnes. Ajouté à cela, les personnes qui ont de l'hypertension et du diabète, soit plus de 10.000 personnes supplémentaires qui ont des difficultés sérieuses pour accéder aux remèdes. Sans parler des conditions d'infrastructures, des équipes réduites et le manque de diagnostic." Il y a quelques années, nous avons fait appels aux instances internationales pour qu'elles réagissent face au gouvernement vénézuélien. Nous avons assisté à quelques audiences à la Commission interaméricaine des droits de l'homme et au Nations unies, sur le thème de la santé au Venezuela. Il y a deux ans, des organisations et l'aide internationale ont commencé à nous contacter pour envoyer de l'aide. De là est né le programme d'aide humanitaire ", explique Francisco Valencia.Depuis, plus de septante tonnes de médicaments ont été distribuées, et quelques 40.000 personnes ont pu être sauvées grâce aux dons de médicaments. Des traitements spécifiques, mais également des fournitures médicales et des packs d'urgence médicales ont été distribués. À Caracas, mais aussi dans le reste du pays qui n'a pas été délaissé puisque la distribution s'est faite aussi dans les communautés indigènes plus éloignées, dans les centres hospitaliers et d'autres ONG ou associations qui s'occupent de leur communauté." Ceux qui ont encore quelques réserves, réduisent leur dose et espace la fréquence des prises pour en avoir pour plus longtemps. D'autres ont recours au troc avec des patients atteints de la même maladie, et ceux qui n'ont strictement rien sont simplement laissés à l'abandon. Dans mon cas, ça fait quatre mois que je suis sans traitement. Heureusement que j'ai de la famille en dehors du pays pour me faire parvenir mon traitement ", commente Francisco.Codevida a demandé au gouvernement de ne pas laisser la question humanitaire de côté. " Nous sommes en discussion avec le gouvernement, nous leur rappelons que l'aide humanitaire ne peut pas être l'objet d'une négociation gouvernementale. Nous émettons l'idée que la question humanitaire doit être la priorité du gouvernement, car les politiciens peuvent avoir de bonnes intentions et amener ces questions sur les tables de négociation, mais ce n'est pas la même chose que de recevoir de l'aide directe des ONG ", explique le directeur de Codevida.Nicolas Maduro a décidé de refuser toute aide humanitaire. "Nous vivons dans un gouvernement qui a décidé de nier la crise humanitaire parce que faire le contraire et admettre l'échec de la gestion présidentielle seraient une catastrophe. Nous sommes dans un État criminel parce qu'il est conscient de la situation critique et qu'il dispose des mécanismes pour s'occuper des problèmes. Mais il n'agit pas et les personnes sont condamnées à mort. Quand un État est en situation de crise humanitaire et qu'il n'a pas la capacité financière pour résoudre ses problèmes, il existe des mécanismes d'aide internationale auxquels il peut avoir accès via les Nations Unies et d'autres pays. Et de nombreux États et instances ont offert leur aide au gouvernement vénézuélien ", déclare le défenseur du droit à la santé.