Avec un enthousiasme certain, de nombreuses voix s'élèvent pour procéder à une révision de la nomenclature des actes médicaux. Pourquoi d'ailleurs se cantonnent-elles aux actes médicaux ? Il y a tout autant de problèmes dans les nomenclatures des actes infirmiers ou de kinésithérapies, sans parler du modèle de financement des hôpitaux, injuste et dépassé.
Les arguments avancés en faveur de cette révision sont multiples, souvent subjectifs, et ne tiennent délibérément pas compte de la modernisation constante, depuis 20 ans, de ce catalogue des actes, selon une méthodologie stricte, étayée scientifiquement et économiquement, permettant l'accès des patients à tous les progrès de la médecine.
Obsolescence ? Incohérence ?
Taxée d'obsolescence, d'iniquité dans la constitution des revenus des praticiens, elle se fait aussi reprocher un manque de cohérence dans la valeur des actes au sein d'une même spécialité ou entre plusieurs d'entre elles.
Rappelons que les déséquilibres les plus flagrants entre actes d'une même spécialité sont le résultat des réductions drastiques d'honoraires imposées à de multiples reprises par les ministres des Affaires sociales successifs, pour réduire des déficits réels ou potentiels du budget des soins de santé, ou pour accorder les dépenses estimées à des budgets volontairement rendus insuffisants : l'actuelle législature agonisante a imposé une norme de croissance de 1,5 %, et des économies d'environ 4% sur les honoraires médicaux.
Mais revenons à la révision de la nomenclature. L'équipe des professeurs Leclercq et Pirson a proposé une méthodologie intéressante, dont la validité à ce jour a été confirmée au sein des spécialités (hors biologie clinique et imagerie). L'échelle des valeurs des prestations de chaque spécialité devra encore être confrontée à celle des autres spécialités. Les travaux devraient se poursuivre, avec la difficulté de trouver une méthode réconciliant les différentes échelles. Ayant tenté l'exercice, les Français s'y sont cassé les dents.
Tous ces travaux partent cependant d'un postulat qui ne reflète qu'imparfaitement la réalité : ils considèrent en effet que la valeur des actes constitue le revenu du médecin. Simplification commode, mais abusive.
Modèle inchangé depuis 1964
Depuis 1964, la nomenclature est élaborée selon le même modèle : chaque acte est décrit (libellé), assorti de règles de non cumul, de diagnostic, ou d'application, et pourvu d'honoraires dont la valeur résulte de la multiplication d'une lettre-clé (dont la valeur en euros peut être indexée, revalorisée ou réduite) et d'un coefficient relatif, censé refléter un degré relatif de difficulté, de temps passé à effectuer la prestation, etc. L'honoraire permet en partie la rémunération du médecin, ainsi que la couverture des frais liés à cet acte : investissement et entretien du matériel et des bâtiments, frais de personnel, frais administratifs (facturation, etc.). Le revenu du médecin dépendra de la hauteur des frais qu'il a à couvrir et du genre d'actes qu'il effectue au sein de sa propre nomenclature.
Des exceptions existent à la règle de la couverture des frais par les honoraires : ainsi la nomenclature stipule que les honoraires de l'anesthésiste ne contiennent aucune charge. Bien sûr, les gestionnaires hospitaliers n'ont en cure. De même, les coûts du matériel en cas d'intervention sous contrôle d'imagerie médicale ne sont pas inclus dans l'honoraire (article 34), idem pour les bandes plâtrées en orthopédie.
Plus fondamentalement, la Loi sur les hôpitaux précise en son article 151 que les honoraires ne peuvent être appelés à couvrir des charges qui sont font partie du Budget des Moyens Financiers de l'hôpital, par exemple les frais de salle d'hospitalisation, frais de quartier opératoire ou des services de soins intensifs ou d'urgence. En bref, les honoraires pour les prestations au lit du malade sont exempts de frais.
Mise à plat
Par conséquent, toute proposition de rénovation de la nomenclature devra être confrontée au problème des charges. La ministre De Block a proposé de scinder l'honoraire des prestations en une part du médecin, et une part couvrant les frais. Elle a précisé que la part couvrant les frais restaient des honoraires, propriété du médecin.
Il faudra donc être très attentif aux modèles qui seront proposés, puisque les actes ambulatoires (en consultation/polyclinique, dans ou hors de l'hôpital) ne sont pas porteurs de la même charge de frais que ceux réalisés en hospitalisation (de jour ou classique) en raison des dispositions de la loi sur les hôpitaux évoquées plus haut.
La mise à plat de la nomenclature devra nécessairement s'accompagner de la réduction des montants indûment perçus par les hôpitaux aux dépens des honoraires. Il faudra donc une gestion sévère des dépenses du Budget des Moyens financiers, et un refinancement significatif de ce budget. Il est temps que les honoraires cessent d'être la variable d'équilibre des budgets hospitaliers, et que la transparence s'impose.
L'Assurance Soins de Santé devra être particulièrement vigilante, répondre positivement aux revendications légitimes des médecins pour une rémunération décente. Il faudra aussi voir dans quelle mesure on peut inclure , dans la grille de valeur des prestations, des paramètres comme l'expérience, la fonction et les responsabilités du médecin dans son groupe de praticiens, son statut académique, etc., toutes qualités qui ne sont actuellement pas prises en compte par la nomenclature.
Ce sera un très rude combat. Espérons que les professionnels du secteur des soins de santé sauront faire cause commune pour obtenir le refinancement de leurs métiers.
Les arguments avancés en faveur de cette révision sont multiples, souvent subjectifs, et ne tiennent délibérément pas compte de la modernisation constante, depuis 20 ans, de ce catalogue des actes, selon une méthodologie stricte, étayée scientifiquement et économiquement, permettant l'accès des patients à tous les progrès de la médecine.Taxée d'obsolescence, d'iniquité dans la constitution des revenus des praticiens, elle se fait aussi reprocher un manque de cohérence dans la valeur des actes au sein d'une même spécialité ou entre plusieurs d'entre elles.Rappelons que les déséquilibres les plus flagrants entre actes d'une même spécialité sont le résultat des réductions drastiques d'honoraires imposées à de multiples reprises par les ministres des Affaires sociales successifs, pour réduire des déficits réels ou potentiels du budget des soins de santé, ou pour accorder les dépenses estimées à des budgets volontairement rendus insuffisants : l'actuelle législature agonisante a imposé une norme de croissance de 1,5 %, et des économies d'environ 4% sur les honoraires médicaux.Mais revenons à la révision de la nomenclature. L'équipe des professeurs Leclercq et Pirson a proposé une méthodologie intéressante, dont la validité à ce jour a été confirmée au sein des spécialités (hors biologie clinique et imagerie). L'échelle des valeurs des prestations de chaque spécialité devra encore être confrontée à celle des autres spécialités. Les travaux devraient se poursuivre, avec la difficulté de trouver une méthode réconciliant les différentes échelles. Ayant tenté l'exercice, les Français s'y sont cassé les dents.Tous ces travaux partent cependant d'un postulat qui ne reflète qu'imparfaitement la réalité : ils considèrent en effet que la valeur des actes constitue le revenu du médecin. Simplification commode, mais abusive.Depuis 1964, la nomenclature est élaborée selon le même modèle : chaque acte est décrit (libellé), assorti de règles de non cumul, de diagnostic, ou d'application, et pourvu d'honoraires dont la valeur résulte de la multiplication d'une lettre-clé (dont la valeur en euros peut être indexée, revalorisée ou réduite) et d'un coefficient relatif, censé refléter un degré relatif de difficulté, de temps passé à effectuer la prestation, etc. L'honoraire permet en partie la rémunération du médecin, ainsi que la couverture des frais liés à cet acte : investissement et entretien du matériel et des bâtiments, frais de personnel, frais administratifs (facturation, etc.). Le revenu du médecin dépendra de la hauteur des frais qu'il a à couvrir et du genre d'actes qu'il effectue au sein de sa propre nomenclature.Des exceptions existent à la règle de la couverture des frais par les honoraires : ainsi la nomenclature stipule que les honoraires de l'anesthésiste ne contiennent aucune charge. Bien sûr, les gestionnaires hospitaliers n'ont en cure. De même, les coûts du matériel en cas d'intervention sous contrôle d'imagerie médicale ne sont pas inclus dans l'honoraire (article 34), idem pour les bandes plâtrées en orthopédie.Plus fondamentalement, la Loi sur les hôpitaux précise en son article 151 que les honoraires ne peuvent être appelés à couvrir des charges qui sont font partie du Budget des Moyens Financiers de l'hôpital, par exemple les frais de salle d'hospitalisation, frais de quartier opératoire ou des services de soins intensifs ou d'urgence. En bref, les honoraires pour les prestations au lit du malade sont exempts de frais.Par conséquent, toute proposition de rénovation de la nomenclature devra être confrontée au problème des charges. La ministre De Block a proposé de scinder l'honoraire des prestations en une part du médecin, et une part couvrant les frais. Elle a précisé que la part couvrant les frais restaient des honoraires, propriété du médecin.Il faudra donc être très attentif aux modèles qui seront proposés, puisque les actes ambulatoires (en consultation/polyclinique, dans ou hors de l'hôpital) ne sont pas porteurs de la même charge de frais que ceux réalisés en hospitalisation (de jour ou classique) en raison des dispositions de la loi sur les hôpitaux évoquées plus haut.La mise à plat de la nomenclature devra nécessairement s'accompagner de la réduction des montants indûment perçus par les hôpitaux aux dépens des honoraires. Il faudra donc une gestion sévère des dépenses du Budget des Moyens financiers, et un refinancement significatif de ce budget. Il est temps que les honoraires cessent d'être la variable d'équilibre des budgets hospitaliers, et que la transparence s'impose.L'Assurance Soins de Santé devra être particulièrement vigilante, répondre positivement aux revendications légitimes des médecins pour une rémunération décente. Il faudra aussi voir dans quelle mesure on peut inclure , dans la grille de valeur des prestations, des paramètres comme l'expérience, la fonction et les responsabilités du médecin dans son groupe de praticiens, son statut académique, etc., toutes qualités qui ne sont actuellement pas prises en compte par la nomenclature.Ce sera un très rude combat. Espérons que les professionnels du secteur des soins de santé sauront faire cause commune pour obtenir le refinancement de leurs métiers.