Cher Président Obama,
Nous sommes les derniers médecins au service des 300.000 habitants vivant encore dans l'est d'Alep. Les troupes du régime ont tenté d'encercler et de totalement bloquer cette partie de la ville. Leur échec a permis de laisser filtrer un peu de nourriture pour la première fois depuis des semaines. Si le siège a été levé, probablement temporairement, ce n'est pas par diplomatie. Notre vie et notre mort dépendent des flux et reflux du champ de bataille.
Depuis cinq ans, nous affrontions au quotidien la mort venant du ciel. Mais désormais, nous la rencontrons partout. Depuis cinq ans, nous témoignons du nombre incalculable de patients, amis et collègues suppliciés, frappés par une mort violente. Depuis cinq ans, le monde est resté là, à observer à quel point la Syrie est "compliquée", en faisant peu pour nous protéger. Les récentes propositions d'évacuation lancées par le régime ou la Russie ont sonné comme des menaces à peine voilées aux habitants - fuir maintenant ou faire face au destin ?
Le mois dernier, 42 attaques ont été perpétrée sur des infrastructures de soins en Syrie, 15 d'entre elles étaient des hôpitaux dans lesquels nous travaillons. Actuellement, il y a un raid sur un poste médical toutes les 17 heures. À ce rythme, nos installations à Alep pourraient être totalement détruites en un mois, vouant 300.000 personnes à une mort certaine.
Quelle souffrance pour nous, médecins, de devoir choisir qui vivra et qui disparaîtra. De jeunes enfants arrivent parfois dans nos salles d'urgence si gravement blessés que nous devons donner priorité à ceux qui ont les meilleures chances de survie ou simplement pour lesquels nous avons l'équipement pour les aider. Il y a deux semaines, quatre nouveau-nés ont gaspé, étouffés par la coupure de l'arrivée d'oxygène dans leur couveuse après un bombardement.
Malgré l'horreur, nous choisissons d'être ici. Nous avons fait le serment d'aider ceux dans le besoin.
Non, Alep n'est pas le nouveau Srebrenica.
Notre dévouement à ce serment est absolu. Certains d'entre-nous visitaient leur famille quand ils ont appris que la ville était assiégée. Nous sommes donc revenus en urgence - certains à pieds car les routes principales étaient trop dangereuses. Car en notre absence encore plus de nos amis et voisins mourront. Nous avons pour devoir de rester et prêter secours.
Monsieur le Président, nous vous demandons de faire votre devoir aussi.
À moins qu'un couloir humanitaire permanent soit ouvert, ce n'est plus qu'une question de temps avant que nous soyons de nouveau encerclés par l'armée syrienne, que la famine réapparaisse et que les hôpitaux retombent complètement en pénurie.
La mort se présente de plus en plus inévitable. Il n'est pas nécessaire de vous rappeler que le fait que les avions de combat syriens et russes ciblent systématiquement les hôpitaux est un crime de guerre. Il n'est pas non plus nécessaire de vous dire qu'ils commettent des atrocités à Alep.
Nous n'avons pas besoin de larmes, de compassion ni même de prières: nous avons désespérément besoin d'une zone de cessez-le-feu à l'est d'Alep et d'une intervention internationale pour garantir qu'Alep ne soit plus jamais assiégée.
Bien à vous,
Dr Abu Al Baraa, pédiatre
Dr Abu Tiem, pédiatre
Dr Hamza, directeur médical hospitalier
Dr Yahaya, pédiatre, directeur du programme de nutrition
Dr Khalid, chirurgien orthopédiste
Dr Muhannad, chirurgien orthopédiste
Dr Hamza, chirurgien
Dr Mohammed, chirurgien
Dr Rasoul, chirurgien urologue
Dr Muhammad, chirurgien vasculaire
Dr Wassim, chirurgien plastique
Dr. Ammar, chirurgien
Dr Nidal, urgenstiste
Dr Amir, urgenstiste
Dr Jamal, urgenstiste
Dr Faraj, urgenstiste
Dr Yousef, généraliste
Dr Abu al-Hasan, chirurgien
Dr Ahmed, généraliste
Dr Abdul Khaleq, interniste
Dr Abu Al Said, chirurgien
Dr Abu Ziad, cardiologue
Dr Munther Al Saleh, chirurgien orthopédiste
Dr Abu Mohammad, chirurgien
Dr Abu Abdo, chirurgien
Dr Abd Al Rahman, urologue
Dr Abu Tareq, urgenstiste
Dr Abu Maryam, neurochirurgien
Dr Farida, gynécologue-obstétricien