Il a manqué énormément de choses à la Belgique pour affronter la crise : pas de plan pandémique, pas d'unité de commandement, des politiciens hors-sol engoncés dans leur sous-régionalisme, un système sanitaire qui ressemble à un rubik's Cube multicolore, pas de communication centralisée, une population et des médecins paumés... Et ça continue, hélas. Le président de la SSMG a livré un diagnostic sévère à la Chambre.
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" Dès février 2020, nous avons eu un fort sentiment d'urgence ", explique le président de la SSMG, le MG bruxellois Thomas Orban. " La ministre fédérale de la Santé Maggie De Block partait avec une confiance très limitée de sa population de médecins. Elle paya sa politique sur les quatre dernières années, celle de n'avoir pas créé des liens. Elle a même traité les uns et les autres de drama queens et de pleurnichards. "Les MG se sont vite organisés autour de la cellule Covid du Collège de médecine générale (CMG). La SSMG a été finalement invitée au RAG (Risk Assessment Group).Le Dr Orban observe que l'administration et les politiques connaissent finalement assez mal leur système sanitaire et ses rouages politiques. " On n'a pas beaucoup vu le SPF au premier plan même s'ils ont beaucoup travaillé. Ils connaissent peu le terrain avec lequel ils travaillent. Ça a posé problème. Ce manque de confiance, de plan global, a miné le temps de réactivité. Cela nous a fait perdre un temps précieux en début de première vague. Idem pour la deuxième vague. On aurait pu tirer les leçons de la 1ère mi-septembre mais, à ce moment, il fallait créer un gouvernement... 450 jours pour commencer à former un gouvernement en pleine crise pandémique, rendez-vous compte ! Le gouvernement sortant aux pouvoirs limités n'a pas bien préparé la 2e vague. La vaccination n'a pas non plus été bien planifiée... "Les politiques font un peu ce qu'ils veulent dans leur coin, estime Orban. " Ils se mettent des bâtons dans les roues. On doit naviguer à vue, et participer parfois à trois réunions pour parler des mêmes choses. C'est extrêmement compliqué à gérer et cela a débouché sur une cacophonie qu'on a payée cher. "Le déficit de communication est abyssal. " Il manque une cellule de communication fédérale de haut niveau qui explique ce qui se passe et qui soit active pour toutes les régions afin de mettre en place des flux de communication vers les professionnels de soins et la population pour expliquer, faire de la pédagogie. " Pourquoi prend-on telle décision ? " Aujourd'hui encore, on ferme un pays sans explication, on a l'impression qu'on restreint nos libertés, on n'explique pas l'alternative, ou l'absence d'alternative sur la table. A-t-on réfléchi suffisamment ? Est-ce la solution ? Y en avait-il une autre ? Il n'y a pas d'argument... " Thomas Orban se demande vraiment qui dirige notre pays... Quant au Commissaire Covid, Pedro Facon, dont la nomination était une idée tardive mais excellente, il a vite jeté l'éponge." À Liège, le 112 nous donnait le nom d'un hôpital pour envoyer le malade", explique de son côté le Dr Devos, président de l'Absym, pour illustrer le casse-tête belge . "Le médecin de l'hôpital demandeur cherchait à trouver le responsable des soins intensifs receveur via un dédale de transferts téléphoniques et de secrétariats divers. On proposait le transfert. Souvent le receveur nous annonçait que la place venait d'être prise. On téléphonait à nouveau au 112 qui nous orientait vers un second hôpital, et ainsi de suite. Il a parfois fallu 6 heures de temps médical au téléphone pour trouver une place. Côté Allemand, on téléphonait au numéro de régulation : l'opérateur nous envoyait dans les dix minutes l'hélicoptère et pendant le vol de l'hélicoptère imposait la prise en charge à un hôpital et nous mettait en relation avec le numéro direct du médecin receveur des soins intensifs. Ce fut la preuve qu'une autre organisation était possible."