"Les arrêtés royaux concernant le personnel soignant ont été suspendus et seront abrogés samedi 23 mai, après l'accord des dix partis qui les avaient approuvés à l'époque. La concertation doit continuer pour trouver des solutions rapides à la revalorisation de la profession", a annoncé jeudi Sophie Wilmès.
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Ces deux arrêtés royaux (AR) publiés au Moniteur Belge le 4 mai avaient provoqué la colère de plusieurs associations représentatives des infirmières et fédérations hospitalières. En signe de protestation, le Setca et la CNE avaient déposé un préavis de grève pour couvrir des actions de la base à partir du 1er juin dans les hôpitaux. Pour rappel, le premier AR prévoit la réquisition des professionnels des soins de santé et le second ouvre l'exercice de l'art infirmier aux professionnels de soins de santé non qualifiés.A la Chambre, la première ministre, Sophie Wilmès (MR) a souligné que ces deux arrêtés étaient "des mesures exceptionnelles dont l'objectif visait à pouvoir mobiliser du personnel pour venir en renfort, si besoin, d'équipes dont on connaît le degré de fatigue et qui avaient besoin de soutien. Il s'agissait bien d'un cadre de soutien juridique qui permettait d'assurer la continuité du fonctionnement des hôpitaux et des maisons de repos auxquels nous aurions pu devoir faire appel en cas de nécessité et... seulement en cas de nécessité. Je rappelle aux parlementaires qui s'étonnent et qui critiquent lourdement le contenu de ces arrêtés de pouvoirs spéciaux que, pour la plupart, ils ont fait l'objet d'un accord de leur président de parti. Il en est autre chose du timing, je n'en disconviens pas, mais je voudrais qu'on ait au moins la correction intellectuelle lorsqu'on a en son temps validé des choses." Unessa salue la sage décision du gouvernement Wilmès. " Nous comprenons parfaitement la colère exprimée par les infirmières/ers du pays vis-à-vis des arrêtés royaux permettant qu'elles/ils puissent être remplacés/es par du personnel de santé non-infirmier et leur réquisition en cas de nécessité en période de Covid-19. ces Arrêtés témoignaient du manque de concertation et de pédagogie attendues pour de telles matières. Il en a résulté des textes précipités et maladroits. Nous sommes donc tout à fait satisfaits de leur suspension", déclare Christophe Happe, directeur général de la fédération. "Il faut maintenant s'attaquer de manière décisive au manque de personnel infirmier au chevet des patients."La fédération rappelle que cette problématique est ancienne dans les hôpitaux, MR(S), à domicile... "En moyenne, un/e infirmière/er belge prend en charge à l'hôpital 9,4 patients, contre huit dans l'ensemble de l'Europe, avec les risques que l'on imagine sur la qualité des soins et l'état de stress généré chez les soignants. Le nombre d'infirmières/ers a augmenté ces dix dernières années, mais il reste insuffisant pour faire face à la croissance des besoins. Dans le seul milieu hospitalier, pour les services de chirurgie, de médecine interne, de gériatrie, de revalidation et de pédiatrie, un renfort d'environ 5.500 infirmiers à temps plein serait nécessaire pour une prise en charge optimale des patients, estimait récemment le KCE. "Selon Unessa, le manque d'infirmières/ers trouve son origine principalement dans le manque de moyens financiers prévus pour permettre d'augmenter le cadre infirmier. "En outre, la profession pâtit d'une perte d'éclat dans les yeux de l'opinion publique : des conditions de travail difficiles, l'allongement des études... 'Un infirmier sur quatre n'est pas satisfait de son travail actuel, et 36% sont même menacés d'épuisement professionnel. Par ailleurs, 10% envisagent de quitter la profession', rapportait encore le KCE." Cette situation inquiète Unessa et les gestionnaires d'hôpitaux. "La crise du Coronavirus a sans doute apporté une reconnaissance méritée et légitime aux infirmières/ers, mais à quel prix ? Et peu de chance que celle-ci suscite suffisamment de vocations pour (re)gonfler les effectifs... " " Une fois de plus, la situation prouve que le temps des tergiversations est révolu. Il est temps de prendre des mesures décisives pour attaquer le problème du manque de personnel infirmier à la racine et renforcer la pérennité financière du secteur. Nous demandons dès lors : un plan structurel pluriannuel, concerté et ambitieux pour restaurer l'attractivité de la profession d'infirmière/er, une décision définitive du fédéral quant à l'utilisation du fonds blouses blanches en faveur de la dotation infirmière, à traduire dans le financement des hôpitaux via le BMF pour augmenter le cadre soignant et une concertation accrue avec les autorités compétentes et les partenaires sociaux pour dégager rapidement toutes les solutions voulues," conclut Christophe Happe.