Vieillissement de la population oblige, on estime qu'un Belge sur cinq sera confronté à l'insuffisance cardiaque (IC). Pour le moment, 250.000 personnes en souffrent déjà, et 1.500 nouveaux diagnostics sont posés chaque année. Les hospitalisations récurrentes, les diagnostics qui tombent tard dans l'évolution de la pathologie et les prises en charge non encore optimales expliquent notamment que l'insuffisance cardiaque représentent à elle seule quelque 2% des dépenses de santé publique.

Un nouvel outil, à l'initiative du Belgian Working Group on Heart Failure, est mis à disposition des prestataires de soins pour mieux encadrer cette maladie. L'occasion de faire le point avec le Dr Pierre Troisfontaines, chef du service de cardiologie du CHR de la Citadelle (Liège). Le centre de l'insuffisance cardiaque du CHR de la Citadelle a débuté en 2005. Il dispose désormais de deux infirmières spécialisées en IC qui assurent le suivi et l'éducation thérapeutique des patients. Depuis sa création, le centre a inclus plus de 2.000 patients. Le centre dispose également de deux infirmiers pour le suivi par télécardiologie.

Le journal du Médecin : cette plateforme d'accompagnement de l'IC est l'aboutissement de longues années d'actions...

Dr Pierre Troisfontaines : Le lancement officiel a lieu à l'occasion des 20 ans du groupe de travail sur l'insuffisance cardiaque, le BWGHF, créé en 2004 à l'initiative du Pr Walter Van Mieghem (ZOL Genk) et du Pr Jean-Luc Vachiéry (HUB). Le BWGHF (Pr Ana Roussoulières, présidente, et Dr Philippe Timmermans, président-elect) rassemble les cardiologues spécialisés et orientés vers cette pathologie. Ce groupe a pour objectif principal de promouvoir la qualité de la prise en charge de l'insuffisance cardiaque en Belgique, ainsi que de favoriser les échanges scientifiques et la recherche clinique dans ce domaine.

Au cours des dernières années, le groupe de travail a développé le premier trajet de soins multidisciplinaire pour l'insuffisance cardiaque. Ce projet est né à l'initiative du Dr David Derthoo (lire ci-dessous) et du parcours de soins transmural de l'insuffisance cardiaque développé à l'hôpital AZ Groeninge (Courtrai). Il est le fruit d'une collaboration des membres du BWGHF, du Dr Miek Smeets et de Domus Medica. L'objectif de la plateforme nationale de trajet de soins en insuffisance cardiaque est d'aider toutes les personnes impliquées dans la prise en charge d'un patient atteint d'insuffisance cardiaque : patients et familles, médecins généralistes, médecins hospitaliers, infirmières, pharmaciens, kinésithérapeutes,... Il permet d'obtenir des conseils et des informations de qualité, parallèlement aux recommandations internationales de la Société européenne de cardiologie, informations adaptées à la situation belge par rapport au remboursement des molécules et à la prise en charge des patients. La plateforme sera actualisée régulièrement par le groupe de travail, qui dispose d'un comité scientifique, les données seront donc toujours d'actualité et pertinentes. L'outil est aussi accessible aux patients et à leurs proches pour répondre à leurs questions, notamment quand tombe le diagnostic.

Le but est aussi de permettre aux professionnels de la santé d'accompagner le patient dans toutes les facettes de cette maladie chronique : le patient doit être pris en charge dans sa globalité avec, notamment, ses comorbidités. Il faut aussi être vigilant face aux interactions médicamenteuses. Enfin, il est important de veiller à l'optimisation du traitement. Tous ces versants-là sont abordés dans la plateforme développée par le groupe de travail.

Et donc concrètement, c'est un outil essentiellement numérique ?

C'est un site internet (https://heartfailurepathway.com/fr/accueil/), accessible en néerlandais, français et anglais. Il peut fonctionner sur smartphone, avec la possibilité de télécharger des documents ou encore des fiches explicatives pour interpréter des résultats et gérer les traitements. On peut aussi y vérifier les ruptures de stock de certaines molécules.

L'insuffisance cardiaque requiert une prise en charge pluridisciplinaire, donc l'outil est conçu tant pour les cardiologues que les médecins généralistes, les infirmièr(e)s hospitalier(e)s ou à domicile, les pharmaciens, les kinésithérapeutes ou encore tout autre professionnel qui pourrait être amené à prendre en charge des insuffisants cardiaques.

Les infirmières spécialisées dans cette maladie ne sont pas encore reconnues ?

Dans les pays qui nous entourent, les infirmières en pratique avancée ou spécialisées en insuffisance cardiaque bénéficient d'une reconnaissance et d'un financement par les autorités compétentes. L'éducation thérapeutique du patient fait partie des recommandations de la Société européenne de cardiologie depuis de nombreuses années. En Belgique, malgré des formations certifiantes organisées aussi bien côté francophone que néerlandophone, ces infirmières ne sont toujours pas reconnues ni financées, les hôpitaux doivent donc financer le travail de ces infirmières sur fonds propres...

Ce n'est pas faute d'avoir interpellé à plusieurs reprises les différents ministres de la Santé... Depuis plus de dix ans, le groupe de travail interpelle les différents niveaux de pouvoir sur l'importance du travail d'éducation thérapeutique du patient : quand un patient devient acteur de sa santé, on évite des hospitalisations et on améliore sa qualité de vie. Or, ce qui coûte cher dans l'insuffisance cardiaque, ce sont justement les hospitalisations à répétition. Donc, tout ce qui permet de prévenir des hospitalisations devrait être soutenu. Une hospitalisation pour insuffisance cardiaque coûte environ 6.000 à 7.000 euros. Des études réalisées dans de nombreux pays montrent qu'une prise en charge pluridisciplinaire, avec l'aide d'infirmières spécialisées, réduit de 20 à 30 % les hospitalisations.

Il faudrait aussi rembourser le dépistage des peptides natriurétiques ?

Le dosage de ces marqueurs (BNP ou des NT-proBNP) permettrait entre autres aux médecins généralistes qui suspectent une insuffisance cardiaque de dépister beaucoup plus précocement la maladie et d'orienter plus rapidement les patients chez le spécialiste. Cela fait aussi partie des recommandations de la Société européenne de cardiologie. En 2014, dans une charte de l'IC, nous proposions déjà le remboursement de ce dosage réalisé par les généralistes, c'est malheureusement resté lettre morte. Notre demande n'était pas excessive... Le test est actuellement à charge du patient, à raison de 35 à 40 euros par dosage. Dans le contexte économique actuel, cette somme n'est pas anodine pour les patients. Et, de nouveau, un diagnostic précoce permet d'instaurer rapidement un traitement, d'éviter des passages aux urgences et des hospitalisations qui coûtent beaucoup plus cher. Normalement, le bon sens devrait l'emporter quand on met en balance une hospitalisation à 7.000 euros et un dosage sanguin à 25 euros... Au delà des généralistes, le remboursement devrait aussi être possible dans le cadre d'un parcours de soins et dans les services d'urgence.

Qu'en est-il du remboursement de la télémédecine ?

Elle n'est pas encore remboursée, mais des discussions au sein d'une Taskforce avec l'Inami sont en cours pour arriver à un système de remboursement du télésuivi de certains patients IC les plus fragiles et les plus sévères, ceux qui ont, entre autres, déjà été hospitalisés. De nouveau, si on met en place ce type de suivi, on pourrait éviter des hospitalisation et donc faire des économies.

Dans la littérature, aussi bien en Europe qu'aux États-Unis, il y a des preuves que la télécardiologie, bien encadrée, permet d'éviter des hospitalisation et d'améliorer le devenir des patients. Un projet de convention avec l'Inami est en voie de finalisation. Ce projet devrait voir le jour d'ici 2025, avec une plateforme qui permettrait de suivre les paramètres des patients (pression artérielle, fréquence cardiaque et poids) au quotidien.

La télésurveillance avec suivi des stimulateurs cardiaques et des défibrillateurs permet également de détecter et de traiter plus rapidement, par exemple les nouvelles arythmies ou les dysfonctionnements de ces appareils pendant des années. Ce suivi devrait également être assuré par des infirmières et des médecins qualifiés. Un cadre et un financement devraient également être fournis par le gouvernement à cet effet.

------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Dr David Derthoo: "La prise en charge des patients souffrant d'insuffisance cardiaque reste un défi dans la pratique"

"Au cours des dernières décennies, des 'Cliniques de l'insuffisance cardiaque' ont été créées dans plusieurs hôpitaux en Belgique afin d'améliorer le traitement et le suivi des patients souffrant d'insuffisance cardiaque, en partie grâce aux infirmières spécialisées dans l'insuffisance cardiaque et à la télésurveillance. Dans la pratique, malheureusement, il existe encore de grandes différences entre les hôpitaux, en partie à cause de l'absence persistante d'un parcours de soins et d'un financement public pour les infirmières spécialisées dans l'insuffisance cardiaque et la télésurveillance", explique le Dr David Derthoo (AZ Groeninge, Courtrai) qui a lancé, en mai 2017, en Flandre occidentale, en collaboration avec les médecins généralistes et les hôpitaux du coin, le 'parcours de soins locorégional transmural insuffisance cardiaque'.

"Les nouvelles lignes directrices de l'ESC fin 2021 ont permis de compléter davantage ce parcours de soins, en collaboration avec la BWGHF, les médecins généralistes (dont le Dr Miek Smeets), les infirmières à domicile, les pharmaciens... Ce qui a permis d'aboutir, au cours de l'année écoulée, à ce nouveau site web unique, accessible à tous, où l'on peut rapidement trouver les informations souhaitées et qui peut être facilement adapté pour l'améliorer encore et le maintenir à jour. Chaque prestataire de soins et chaque patient peuvent utiliser ce parcours de soins pour trouver rapidement ce qu'ils doivent surveiller et ce, pour chaque patient."

Deux questions en particulier restent un défi dans la pratique : le suivi et le traitement des patients souffrant d'insuffisance cardiaque.

"Les modalités de suivi sont très variables d'un médecin à l'autre, et d'un hôpital à l'autre. Il est nécessaire d'uniformiser l'organisation des soins de l'insuffisance cardiaque en Belgique, et d'améliorer la coopération entre la médecine de première et de deuxième ligne", poursuit le Dr Derthoo. "Si tout va bien, le patient ne voit le cardiologue que quelques fois par an. Mais entre-temps, beaucoup de choses peuvent se passer: décompensation cardiaque, arythmie, hypotension, détérioration de la fonction rénale, dysfonctionnement ionique... S'ils ne sont pas détectés à temps et traités correctement, ces problèmes peuvent entraîner davantage d'hospitalisations, voire de décès. Les patients, leur entourage, les médecins généralistes, les médecins hospitaliers, les infirmières, les professionnels de santé, les pharmaciens, les kinésithérapeutes,... jouent tous un rôle important dans ce suivi pour détecter rapidement et traiter correctement les changements dans l'état du patient afin que le traitement chronique reste le plus optimal possible, adapté à l'évolution du patient." La télésurveillance et le suivi téléphonique par des infirmières spécialisées dans l'insuffisance cardiaque constituent une aide importante à cet égard.

Le degré de formation et d'expérience en matière d'insuffisance cardiaque varie également considérablement d'un prestataire de soins à l'autre.

"Dans la pratique, cela conduit encore souvent à une mise en oeuvre sous-optimale des lignes directrices internationales et donc à un traitement sous-optimal. Les patients sont suivis par des cardiologues, mais aussi par de nombreux autres médecins, y compris des généralistes et, par exemple, des services de gériatrie, de pneumologie ou de néphrologie... Tout le monde doit suivre les mêmes lignes directrices. Les recommandations de l'ESC et les nouvelles recommandations belges de WOREL restent des documents longs et détaillés d'une grande valeur scientifique. Cependant, les lignes directrices de l'ESC sont mises à jour beaucoup plus fréquemment, ce qui fait que les autres lignes directrices sont parfois rapidement dépassées. Par ailleurs, ces documents ne sont pas vraiment pratiques à utiliser pour les prestataires de soins primaires ou les non-cardiologues. Il existe donc depuis longtemps un besoin de traduction pratique de ces lignes directrices en un document de travail pour tous ceux qui s'occupent de patients souffrant d'insuffisance cardiaque. Une plateforme dans laquelle les informations peuvent être trouvées rapidement et commodément avec des conseils faciles à suivre."

Le nouveau site web fournit des informations pratiques sur le diagnostic, le traitement optimal, le suivi multidisciplinaire, la détection de nouveaux problèmes et ce qu'il convient de faire dans certaines circonstances. Une page web spécifique décrit le rôle du médecin généraliste, avec des organigrammes et des tableaux pratiques pour aider le médecin généraliste à titrer le traitement de l'insuffisance cardiaque dans son cabinet. Il existe également des pages web spécifiques pour les infirmières et les pharmaciens, entre autres, avec des points d'intérêt spécifiques et leur rôle possible dans le suivi des patients souffrant d'insuffisance cardiaque. Pour les patients, il existe également des lignes directrices spécifiques sur ce qu'il faut faire, ce qu'il faut surveiller, ce que font les médicaments et comment vivre avec l'insuffisance cardiaque.

Les principaux protagonistes à l'origine du parcours de soins dans l'insuffisance cardiaque.
Les principaux protagonistes à l'origine du parcours de soins dans l'insuffisance cardiaque.

Vieillissement de la population oblige, on estime qu'un Belge sur cinq sera confronté à l'insuffisance cardiaque (IC). Pour le moment, 250.000 personnes en souffrent déjà, et 1.500 nouveaux diagnostics sont posés chaque année. Les hospitalisations récurrentes, les diagnostics qui tombent tard dans l'évolution de la pathologie et les prises en charge non encore optimales expliquent notamment que l'insuffisance cardiaque représentent à elle seule quelque 2% des dépenses de santé publique.Un nouvel outil, à l'initiative du Belgian Working Group on Heart Failure, est mis à disposition des prestataires de soins pour mieux encadrer cette maladie. L'occasion de faire le point avec le Dr Pierre Troisfontaines, chef du service de cardiologie du CHR de la Citadelle (Liège). Le centre de l'insuffisance cardiaque du CHR de la Citadelle a débuté en 2005. Il dispose désormais de deux infirmières spécialisées en IC qui assurent le suivi et l'éducation thérapeutique des patients. Depuis sa création, le centre a inclus plus de 2.000 patients. Le centre dispose également de deux infirmiers pour le suivi par télécardiologie. Le journal du Médecin : cette plateforme d'accompagnement de l'IC est l'aboutissement de longues années d'actions...Dr Pierre Troisfontaines : Le lancement officiel a lieu à l'occasion des 20 ans du groupe de travail sur l'insuffisance cardiaque, le BWGHF, créé en 2004 à l'initiative du Pr Walter Van Mieghem (ZOL Genk) et du Pr Jean-Luc Vachiéry (HUB). Le BWGHF (Pr Ana Roussoulières, présidente, et Dr Philippe Timmermans, président-elect) rassemble les cardiologues spécialisés et orientés vers cette pathologie. Ce groupe a pour objectif principal de promouvoir la qualité de la prise en charge de l'insuffisance cardiaque en Belgique, ainsi que de favoriser les échanges scientifiques et la recherche clinique dans ce domaine.Au cours des dernières années, le groupe de travail a développé le premier trajet de soins multidisciplinaire pour l'insuffisance cardiaque. Ce projet est né à l'initiative du Dr David Derthoo (lire ci-dessous) et du parcours de soins transmural de l'insuffisance cardiaque développé à l'hôpital AZ Groeninge (Courtrai). Il est le fruit d'une collaboration des membres du BWGHF, du Dr Miek Smeets et de Domus Medica. L'objectif de la plateforme nationale de trajet de soins en insuffisance cardiaque est d'aider toutes les personnes impliquées dans la prise en charge d'un patient atteint d'insuffisance cardiaque : patients et familles, médecins généralistes, médecins hospitaliers, infirmières, pharmaciens, kinésithérapeutes,... Il permet d'obtenir des conseils et des informations de qualité, parallèlement aux recommandations internationales de la Société européenne de cardiologie, informations adaptées à la situation belge par rapport au remboursement des molécules et à la prise en charge des patients. La plateforme sera actualisée régulièrement par le groupe de travail, qui dispose d'un comité scientifique, les données seront donc toujours d'actualité et pertinentes. L'outil est aussi accessible aux patients et à leurs proches pour répondre à leurs questions, notamment quand tombe le diagnostic.Le but est aussi de permettre aux professionnels de la santé d'accompagner le patient dans toutes les facettes de cette maladie chronique : le patient doit être pris en charge dans sa globalité avec, notamment, ses comorbidités. Il faut aussi être vigilant face aux interactions médicamenteuses. Enfin, il est important de veiller à l'optimisation du traitement. Tous ces versants-là sont abordés dans la plateforme développée par le groupe de travail.Et donc concrètement, c'est un outil essentiellement numérique ?C'est un site internet (https://heartfailurepathway.com/fr/accueil/), accessible en néerlandais, français et anglais. Il peut fonctionner sur smartphone, avec la possibilité de télécharger des documents ou encore des fiches explicatives pour interpréter des résultats et gérer les traitements. On peut aussi y vérifier les ruptures de stock de certaines molécules. L'insuffisance cardiaque requiert une prise en charge pluridisciplinaire, donc l'outil est conçu tant pour les cardiologues que les médecins généralistes, les infirmièr(e)s hospitalier(e)s ou à domicile, les pharmaciens, les kinésithérapeutes ou encore tout autre professionnel qui pourrait être amené à prendre en charge des insuffisants cardiaques. Les infirmières spécialisées dans cette maladie ne sont pas encore reconnues ?Dans les pays qui nous entourent, les infirmières en pratique avancée ou spécialisées en insuffisance cardiaque bénéficient d'une reconnaissance et d'un financement par les autorités compétentes. L'éducation thérapeutique du patient fait partie des recommandations de la Société européenne de cardiologie depuis de nombreuses années. En Belgique, malgré des formations certifiantes organisées aussi bien côté francophone que néerlandophone, ces infirmières ne sont toujours pas reconnues ni financées, les hôpitaux doivent donc financer le travail de ces infirmières sur fonds propres... Ce n'est pas faute d'avoir interpellé à plusieurs reprises les différents ministres de la Santé... Depuis plus de dix ans, le groupe de travail interpelle les différents niveaux de pouvoir sur l'importance du travail d'éducation thérapeutique du patient : quand un patient devient acteur de sa santé, on évite des hospitalisations et on améliore sa qualité de vie. Or, ce qui coûte cher dans l'insuffisance cardiaque, ce sont justement les hospitalisations à répétition. Donc, tout ce qui permet de prévenir des hospitalisations devrait être soutenu. Une hospitalisation pour insuffisance cardiaque coûte environ 6.000 à 7.000 euros. Des études réalisées dans de nombreux pays montrent qu'une prise en charge pluridisciplinaire, avec l'aide d'infirmières spécialisées, réduit de 20 à 30 % les hospitalisations. Il faudrait aussi rembourser le dépistage des peptides natriurétiques ?Le dosage de ces marqueurs (BNP ou des NT-proBNP) permettrait entre autres aux médecins généralistes qui suspectent une insuffisance cardiaque de dépister beaucoup plus précocement la maladie et d'orienter plus rapidement les patients chez le spécialiste. Cela fait aussi partie des recommandations de la Société européenne de cardiologie. En 2014, dans une charte de l'IC, nous proposions déjà le remboursement de ce dosage réalisé par les généralistes, c'est malheureusement resté lettre morte. Notre demande n'était pas excessive... Le test est actuellement à charge du patient, à raison de 35 à 40 euros par dosage. Dans le contexte économique actuel, cette somme n'est pas anodine pour les patients. Et, de nouveau, un diagnostic précoce permet d'instaurer rapidement un traitement, d'éviter des passages aux urgences et des hospitalisations qui coûtent beaucoup plus cher. Normalement, le bon sens devrait l'emporter quand on met en balance une hospitalisation à 7.000 euros et un dosage sanguin à 25 euros... Au delà des généralistes, le remboursement devrait aussi être possible dans le cadre d'un parcours de soins et dans les services d'urgence.Qu'en est-il du remboursement de la télémédecine ?Elle n'est pas encore remboursée, mais des discussions au sein d'une Taskforce avec l'Inami sont en cours pour arriver à un système de remboursement du télésuivi de certains patients IC les plus fragiles et les plus sévères, ceux qui ont, entre autres, déjà été hospitalisés. De nouveau, si on met en place ce type de suivi, on pourrait éviter des hospitalisation et donc faire des économies.Dans la littérature, aussi bien en Europe qu'aux États-Unis, il y a des preuves que la télécardiologie, bien encadrée, permet d'éviter des hospitalisation et d'améliorer le devenir des patients. Un projet de convention avec l'Inami est en voie de finalisation. Ce projet devrait voir le jour d'ici 2025, avec une plateforme qui permettrait de suivre les paramètres des patients (pression artérielle, fréquence cardiaque et poids) au quotidien.La télésurveillance avec suivi des stimulateurs cardiaques et des défibrillateurs permet également de détecter et de traiter plus rapidement, par exemple les nouvelles arythmies ou les dysfonctionnements de ces appareils pendant des années. Ce suivi devrait également être assuré par des infirmières et des médecins qualifiés. Un cadre et un financement devraient également être fournis par le gouvernement à cet effet.