Richard Duport, étudiant en médecine à l'ULg qui représente les étudiants depuis plusieurs années raconte les difficultés de cette entreprise entre doutes et peur.
Qu'est-ce que la représentation ?
La représentation, une activité tantôt louée, car il s'agit d'un don de soi ; tantôt décriée en raison des dérives typiques du suffrage.
Voilà six ans que je contribue à la représentation des étudiants de ma faculté. Ma réflexion s'est étoffée de nouvelles questions et d'un peu moins de réponses sur ce qu'est la représentation. Au milieu de nombreuses zones d'ombres, un principe demeure incontournable : le représentant est l'intermédiaire entre les étudiants et tout décideur le concernant.
De ce principe découle ce qui suit : le représentant doit rendre compte, de façon spontanée, de son action (communication descendante) et doit retransmettre fidèlement l'avis des étudiants (communication ascendante). Tant que son action s'inscrit dans ce cadre, l'éthique de son action sera, je pense, incontestée.
Au-delà des principes, ce qui caractérise un bon représentant est la proactivité. Afin d'améliorer la condition de ceux qu'il prétend défendre, le représentant doit faire avancer les dossiers. C'est dans la méthode, très souvent, que pourront être comparés deux représentants.
Enfin, et c'est là un des points les plus délicats, il me semble que le représentant doit stimuler le débat sans jamais chercher à imposer ses idées. C'est parfois en contradiction avec les raisons et le profil de celui qui s'engage. Toutefois, lorsque les idées s'insinuent dans la représentation, vous pouvez être certains que la confiance de la base s'effritera. Alors viendront les méthodes sournoises, car le représentant frustré cherchera à convaincre sa base par tous les moyens, notamment populistes.
Or, si le représentant doit promouvoir le débat afin de faire ressortir les arguments et les positions dominantes de sa base, il me semble que c'est dans la méthode et non dans les idées qu'il doit oeuvrer.
Les difficultés de la représentation en médecine ?
Je ne crains pas de l'affirmer : les étudiants en médecine évoluent dans des conditions absolument déplorables. De façon typique, évoquer ce constat devant des infirmiers ou des représentants d'autres secteurs professionnels, voire des médecins plus avancés dans leur carrière, soulèvera un sourire moqueur : "oui, enfin vous n'allez pas gagner le même salaire à la fin !" ou encore "mais avant c'était bien pire, ne vous plaignez pas !".
Ces arguments me font voir rouge, car dans mes rangs je vois régulièrement des dépressions ou des burnouts. Je vois des horaires inhumains, jugés illégaux dans la majorité des secteurs professionnels. Je vois une humanité qui s'effrite au profit du rendement. Tant que je verrai cela, je continuerai à clamer que la condition étudiante en médecine est insuffisante.
Pourtant, les étudiants en médecine sont largement représentés au sein de leurs conseils étudiants universitaires ou facultaires.
La première difficulté est de faire bouger la base sur des sujets qui la révolte pourtant. Malheureusement, la peur est omniprésente. A tout moment, un étudiant qui dérange pourrait être "vaporisé", un peu comme dans 1984. C'est du moins la sanction que semble redouter tout étudiant en médecine un minimum intéressé par son devenir. Les décideurs de son avenir sont un et unique : professeur et recruteur, évaluateur et employeur. On a bien vu en 2014 comment la menace d'un "0" à une cote de stage a efficacement dissuadé les stagiaires d'une certaine discipline à ne pas aller manifester pour défendre leur droit d'accès à la profession après 7 ans d'études.
Puis viennent les difficultés d'expression. Les idées apportées sont souvent étouffées dans l'oeuf à coup de rires en plein conseil des études. Autant vous dire que le représentant peine à s'exprimer de nouveau après avoir subi pareille honte. A tous les échelons de l'université et de l'hôpital, le phénomène se reproduit.
Pour autant, je pense que le vent est favorable à la cause étudiante. De nombreux professeurs sont de plus en plus enclins à les soutenir pourvu qu'ils fassent preuve de patience et de raison. Le ministère s'inquiète de la qualité de la formation en stage. Par ailleurs, le formatage imposé depuis de nombreuses années commence à s'effriter : l'étudiant sort doucement de ses livres et demande à vivre, sans se cacher. Par à-coups, il sort la tête de l'eau et s'exprime. C'est là que le représentant doit saisir l'occasion et canaliser la colère de la foule pour faire avancer les dossiers. C'est dans la durée que se trouve le sens de ses efforts
Qu'est-ce que la représentation ?La représentation, une activité tantôt louée, car il s'agit d'un don de soi ; tantôt décriée en raison des dérives typiques du suffrage. Voilà six ans que je contribue à la représentation des étudiants de ma faculté. Ma réflexion s'est étoffée de nouvelles questions et d'un peu moins de réponses sur ce qu'est la représentation. Au milieu de nombreuses zones d'ombres, un principe demeure incontournable : le représentant est l'intermédiaire entre les étudiants et tout décideur le concernant. De ce principe découle ce qui suit : le représentant doit rendre compte, de façon spontanée, de son action (communication descendante) et doit retransmettre fidèlement l'avis des étudiants (communication ascendante). Tant que son action s'inscrit dans ce cadre, l'éthique de son action sera, je pense, incontestée. Au-delà des principes, ce qui caractérise un bon représentant est la proactivité. Afin d'améliorer la condition de ceux qu'il prétend défendre, le représentant doit faire avancer les dossiers. C'est dans la méthode, très souvent, que pourront être comparés deux représentants.Enfin, et c'est là un des points les plus délicats, il me semble que le représentant doit stimuler le débat sans jamais chercher à imposer ses idées. C'est parfois en contradiction avec les raisons et le profil de celui qui s'engage. Toutefois, lorsque les idées s'insinuent dans la représentation, vous pouvez être certains que la confiance de la base s'effritera. Alors viendront les méthodes sournoises, car le représentant frustré cherchera à convaincre sa base par tous les moyens, notamment populistes.Or, si le représentant doit promouvoir le débat afin de faire ressortir les arguments et les positions dominantes de sa base, il me semble que c'est dans la méthode et non dans les idées qu'il doit oeuvrer.Les difficultés de la représentation en médecine ?Je ne crains pas de l'affirmer : les étudiants en médecine évoluent dans des conditions absolument déplorables. De façon typique, évoquer ce constat devant des infirmiers ou des représentants d'autres secteurs professionnels, voire des médecins plus avancés dans leur carrière, soulèvera un sourire moqueur : "oui, enfin vous n'allez pas gagner le même salaire à la fin !" ou encore "mais avant c'était bien pire, ne vous plaignez pas !".Ces arguments me font voir rouge, car dans mes rangs je vois régulièrement des dépressions ou des burnouts. Je vois des horaires inhumains, jugés illégaux dans la majorité des secteurs professionnels. Je vois une humanité qui s'effrite au profit du rendement. Tant que je verrai cela, je continuerai à clamer que la condition étudiante en médecine est insuffisante. Pourtant, les étudiants en médecine sont largement représentés au sein de leurs conseils étudiants universitaires ou facultaires. La première difficulté est de faire bouger la base sur des sujets qui la révolte pourtant. Malheureusement, la peur est omniprésente. A tout moment, un étudiant qui dérange pourrait être "vaporisé", un peu comme dans 1984. C'est du moins la sanction que semble redouter tout étudiant en médecine un minimum intéressé par son devenir. Les décideurs de son avenir sont un et unique : professeur et recruteur, évaluateur et employeur. On a bien vu en 2014 comment la menace d'un "0" à une cote de stage a efficacement dissuadé les stagiaires d'une certaine discipline à ne pas aller manifester pour défendre leur droit d'accès à la profession après 7 ans d'études. Puis viennent les difficultés d'expression. Les idées apportées sont souvent étouffées dans l'oeuf à coup de rires en plein conseil des études. Autant vous dire que le représentant peine à s'exprimer de nouveau après avoir subi pareille honte. A tous les échelons de l'université et de l'hôpital, le phénomène se reproduit. Pour autant, je pense que le vent est favorable à la cause étudiante. De nombreux professeurs sont de plus en plus enclins à les soutenir pourvu qu'ils fassent preuve de patience et de raison. Le ministère s'inquiète de la qualité de la formation en stage. Par ailleurs, le formatage imposé depuis de nombreuses années commence à s'effriter : l'étudiant sort doucement de ses livres et demande à vivre, sans se cacher. Par à-coups, il sort la tête de l'eau et s'exprime. C'est là que le représentant doit saisir l'occasion et canaliser la colère de la foule pour faire avancer les dossiers. C'est dans la durée que se trouve le sens de ses efforts