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Walter Rombouts: "Grâce à mes années d'expérience en communication dans le secteur des soins de santé, la divulgation ouverte est un sujet qui me tient à coeur. Je suis psychologue clinicien de formation et, au cours des 20 dernières années de ma pratique clinique, j'ai travaillé à temps partiel à l'UZ Leuven en soins palliatifs. J'y ai acquis une grande expérience des conversations difficiles avec les mourants et leurs familles. À la KULeuven, j'ai également collaboré à la formation à la communication des médecins spécialistes en formation.""L'autre moitié de mon temps était consacrée à la formation à la communication pour les prestataires de soins au sein de l'agence de formation Perspectief. Aujourd'hui, je m'occupe à plein temps de cette dernière activité. Grâce à la collaboration et à l'expérience de l'UZ Leuven, le Pr Kris Vanhaecht est venu frapper à ma porte il y a dix ans pour mettre en place une formation pratique sur la divulgation ouverte."La divulgation ouverte implique un changement cognitif majeur. "Avant que le LIGB n'élabore le cadre sur la divulgation ouverte, il était recommandé - en particulier par les assureurs - aux médecins de garder le silence sur les incidents liés à la sécurité des patients. Mais soudain, on dit qu'il faut en discuter avec le patient." Selon Walter Rombouts, un changement est en cours depuis un certain temps: le paternalisme dans lequel le médecin décidait seul du traitement du patient est bel et bien révolu. "Pourtant, les médecins n'ont pas toujours appris dans leur formation à avoir des conversations aussi approfondies. Vous devez prendre une grande respiration, aller vers le patient et lui dire que les choses ont mal tourné. C'est difficile. Les médecins ne savent pas trop comment s'y prendre. Comment avoir une telle conversation tout en se sentant bien dans le processus?"En effet, un facteur aggravant est que le médecin est souvent très impliqué personnellement. "Le médecin se sent souvent coupable vis-à-vis de son patient. En même temps, il est en fait la seconde victime. Dans cette situation, il arrive qu'il agisse de manière inadéquate." Il est recommandé d'entamer une divulgation ouverte peu de temps après l'incident. Cela n'empêche qu'il faut d'abord prendre de la distance et réfléchir, estime Wouter Rombouts. "Un commandant de pompier m'a dit que la première leçon qu'il devait enseigner à ses hommes était de ne pas courir tout droit vers la maison en feu. Je dis toujours aux médecins qu'ils doivent noter la première phrase qu'ils veulent dire au patient."L'une des conditions essentielles d'une divulgation ouverte est qu'elle soit soutenue par l'ensemble de l'organisation, par l'équipe. "Lors des formations, je remarque assez bien que certains médecins hésitent à se lancer dans une conversation en divulgation ouverte parce qu'ils craignent que cela les discrédite aux yeux de leur entourage collégial. D'autres médecins pensent que les incidents n'arrivent qu'aux collègues incompétents et qu'ils en sont à l'abri. L'équipe doit être suffisamment soudée: tout le monde fait des efforts, mais il arrive que les choses tournent mal. Le patient victime d'un incident a besoin de soutien, mais le prestataire de soins impliqué dans l'incident - la seconde victime - a lui aussi besoin de soutien. Les médecins ne sont pas toujours formés pour se soutenir mutuellement dans ce domaine.""Dans les formations que nous dispensons, nous insistons sur le fait qu'il faut être préparé à ce que les gens réagissent émotionnellement lorsqu'on leur dit que les soins ne se sont pas déroulés comme ils le souhaitaient. C'est quelque chose que je connais bien dans le domaine des soins palliatifs. Les gens sont en crise. Il faut s'attendre à de la peur, de la tristesse et de la colère, mais pas à ce que les gens réagissent logiquement et posent des questions sensées. L'erreur fondamentale consiste à ignorer l'expérience de l'autre: 'Il ne faut pas se mettre en colère.' Ou encore: 'Il n'y a pas de raison de vous sentir anxieux.' Ces exhortations n'aident en rien.""Pour ces sentiments, le médecin doit laisser de la place et faire preuve de compréhension: 'Je comprends, vous n'êtes pas venu ici pour subir cela'. Pour les prestataires de soins, cela va parfois à l'encontre de leur intuition. Ces réactions sont également loin d'être agréables. Le médecin sent que le patient lui en veut ou qu'il est très triste. La réaction est alors souvent la suivante: 'J'aurais mieux fait de me taire, car j'aggrave encore la situation'. Mais non, ces réactions sont tout à fait normales et constituent un point de départ pour la suite du processus pour faire face aux difficultés.""Lorsqu'un médecin s'engage dans une démarche de divulgation ouverte, il est important de garder à l'esprit certains schémas de base. Les patients et leur entourage ont cinq besoins, soit des choses qu'ils veulent entendre. Premièrement, ils veulent savoir exactement ce qui s'est passé - les faits tels que vous les connaissez. Deuxièmement, ils veulent entendre un "pardon", c'est-à-dire que vous êtes désolé. Ils veulent aussi entendre que vous vous sentez responsable de ce qui est arrivé au patient, et que vous voulez travailler avec lui pour faire face aux conséquences et faire tout ce qui est en votre pouvoir pour les atténuer. Quatrièmement - étrange mais vrai -, ils veulent aussi savoir ce que vous ferez pour éviter que cela n'arrive à d'autres personnes. Enfin, ils veulent savoir comment le processus se poursuit - quand le dialogue se poursuivra.""Vous ne devez pas avouer que vous êtes en tort. Ce n'est pas non plus ce que le patient veut entendre. Vous lui dites que les soins ne se sont pas déroulés comme prévu et que cela vous affecte beaucoup. Quant à savoir s'il y a eu erreur et s'il y a lieu d'indemniser le patient, c'est à l'assureur et aux tribunaux de le faire.""Nous donnons ce type de schéma de base en guise d'introduction à la formation. Pour éviter que les participants ne discutent pendant la formation de l'opportunité d'une conversation ou d'une divulgation ouverte, nous présentons d'abord le contexte juridique à l'aide d'une vidéo du Pr Steven Lierman, ou d'un bref exposé d'un expert juridique de l'un des assureurs.""La formation consiste en des exercices interactifs qui permettent aux participants de se mettre à la place non seulement du prestataire de soins qui divulgue les informations, mais aussi du patient et des membres de sa famille. Les participants sont ensuite invités à parler de ce qu'ils ont découvert au cours de cet exercice. Par exemple, lorsque les gens vous disent de ne pas vous mettre en colère, c'est à ce moment que vous allez vous sentir en colère! Nous préférons ensuite organiser une deuxième session, parce qu'il ne s'agit pas de choses que l'on connaît et que l'on maîtrise pour de bon en s'étant entraîné une fois.""Nous disposons de quelques cas que nous utilisons pour les sessions, comme: le patient tombe lors de son transfert du lit d'hôpital à la table d'opération et se casse la hanche. Mais nous préférons travailler avec un cas que les participants apportent eux-mêmes. Malgré toutes les mesures de contrôle visant à améliorer la sécurité des patients, des incidents se produisent encore trop régulièrement dans un environnement hospitalier complexe, comme lorsqu'un patient reçoit un mauvais médicament. Nous n'utilisons pas de cas 'sans dommage' pour éviter que les participants ne discutent de l'opportunité d'une divulgation ouverte dans ce cas. Tous les hôpitaux ne choisissent pas d'assurer une transparence totale, même dans les cas d'incidents sans préjudice."L'un des enseignements que Wouter Rombouts aimerait encore transmettre aux spécialistes est de considérer la divulgation ouverte non pas comme une conversation unique, mais comme un processus. "Les spécialistes ne sont pas encore habitués à cela. Un processus exige de la prévisibilité et de la vérifiabilité. Ne dites pas au patient: nous vous contacterons plus tard lorsque nous en saurons plus. Avant que vous puissiez lui fixer un rendez-vous, il aura déjà appelé sept fois. Donnez-lui de suite un jour et une heure précis pour un rendez-vous - lesquels pourront encore être déplacés si nécessaire.""Parmi les participants à la session, la discussion débouche souvent sur une vaste réflexion. Les membres d'une équipe se demandent pourquoi ils n'ont pas géré un incident d'une manière différente, comment ils peuvent mieux organiser le suivi, comment ils peuvent mieux soutenir non seulement le patient, mais aussi se soutenir les uns les autres - et en particulier la 'seconde victime' de l'équipe."Qui participe à la formation, qui en fait la demande, où est-elle dispensée? "Nous nous déplaçons généralement à l'hôpital pour cette formation. Parfois, ce sont quelques médecins qui demandent la formation, mais il peut aussi s'agir d'une équipe hospitalière qui suit la formation. Il arrive que la direction de l'hôpital décide de faire de la divulgation ouverte un fer de lance et demande aux cadres - médecins et infirmières en chef, coordinateur qualité - de suivre une formation. Le LIGB à Leuven organise aussi régulièrement des ateliers sur la divulgation ouverte, qui comportent notamment une formation à la communication.""Chaque hôpital cherche sa propre voie, à son propre rythme. Un incident grave peut également être à l'origine de la mise en place de la divulgation ouverte et de la formation des membres du personnel."Il y a aussi une sorte de principe de "formation du formateur" qui entre en jeu. Les personnes qui ont suivi la formation peuvent transmettre leurs nouvelles compétences - elles peuvent coacher d'autres prestataires de soins. "Un incident peut survenir à tout moment, il est bon de faire appel à des personnes qui ont suivi la formation et qui savent comment gérer un processus de divulgation ouverte. Mais il est préférable de procéder de manière réfléchie", estime M. Rombouts. "Il n'est pas évident qu'une personne ayant suivi la formation puisse aider à lancer une procédure de divulgation ouverte à tout moment et dans n'importe quelle situation au sein du service."