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Suite à sa rencontre avec des associations de patientes l'été dernier, le ministre Vandenbroucke avait demandé au Centre fédéral d'expertise des soins de santé les résultats de son étude en cours sur l'endométriose pour le printemps 2024. Objectif avoué: avoir une base scientifique sur laquelle construire une meilleure prise en charge de la maladie. Le KCE vient de publier son rapport [1], dans lequel il examine les soins de l'endométriose proposés dans les hôpitaux belges et la manière dont les patientes vivent ces traitements. Le KCE propose notamment la création, dans chaque réseau hospitalier, de "cliniques de l'endométriose et des douleurs pelviennes chroniques". Le rapport, intitulé "L'endométriose, un calvaire à prendre au sérieux", propose plusieurs pistes d'amélioration de la prise en charge dont, notamment: - Une meilleure formation de la première ligne: les patientes atteintes d'endométriose parlent d'une méconnaissance de cette maladie, même au sein du corps médical. Le KCE suggère de mettre en place une sensibilisation renforcée pendant la formation médicale, mais aussi une sensibilisation ou un rafraîchissement des connaissances pour les médecins généralistes en activité. - Des cliniques d'endométriose multidisciplinaires dans chaque réseau hospitalier: une fois l'endométriose détectée, les patientes seraient envoyées par leur généraliste ou gynécologue dans une clinique d'endométriose locorégionale. Ces cliniques seraient officiellement reconnues comme telles. Elles mettraient l'accent sur une consultation multidisciplinaire entre un gynécologue et un spécialiste de la douleur, entre autres, puisque la douleur est la plainte principale. - Des centres de référence spécialisés pour concentrer et augmenter l'expertise devraient être mis en place en mettant l'accent sur l'expertise chirurgicale particulière en équipes (gynécologue, chirurgien abdominal, urologue) pour l'endométriose profonde (les cas les plus lourds). Les centres de références et les cliniques d'endométriose seraient liés pas un dialogue permanent et une collaboration structurée pour renforcer la qualité des soins. Les témoignages des patientes recueillis par le Centre fédéral d'expertise révèlent une errance diagnostique de six à dix ans. Et lorsqu'elles sont enfin traitées, les femmes sont souvent déçues, soit que les symptômes ne disparaissent pas (complètement), soit qu'ils finissent par réapparaître. Frank Vandenbroucke va demander au président et au coprésident du CTM, à l'Inami, de mettre en place un groupe de travail chargé d'élaborer plus concrètement les différents points à améliorer. Ce groupe de travail sera composé des deux présidents du CTM, de quatre représentants de la Société royale belge de gynécologie, ainsi que de deux représentants des fédérations de médecine générale (CMG et Domus Medica), en respectant un équilibre linguistique et de genre. "Ce groupe de travail déterminera les conditions à remplir par ces centres pour être reconnus comme tel (cliniques et centres d'expertise). Dans le même temps, il est aussi demandé au groupe de travail de faire une proposition d'élaboration de nouveaux numéros de nomenclature qui prévoient une rémunération appropriée pour les procédures d'endométriose et les consultations multidisciplinaires, limitées aux cliniques d'endométriose et aux centres de référence", explique le cabinet du ministre dans un communiqué. Conformément aux recommandations du KCE, le groupe de travail examinera également les mesures qui peuvent être prises en vue de mesurer la qualité des soins fournis. Le ministre souhaite que ce groupe de travail lui revienne avec un plan d'action et un calendrier concret d'ici la mi-mai 2024, pour pouvoir atterrir avec des propositions concrètes d'amélioration d'ici la fin de l'année et que les fonds nécessaires puissent être inclus dans les discussions budgétaires de 2025. Selon le rapport du KCE, l'endométriose (avec l'adénomyose qui lui est apparentée) concerne, en moyenne par an, 162 hospitalisations pour 100.000 femmes (données 2016-2020). Le nombre moyen d'admissions varie toutefois fortement d'un hôpital à l'autre: de moins d'une admission à plus de 300 par an. Environ trois quarts des admissions concernaient des femmes en âge de procréer (15-49 ans). Les soins et l'organisation des soins aux patientes peuvent être très différents d'un hôpital à l'autre: 30 des 77 hôpitaux qui ont répondu à l'enquête du KCE ont pris l'initiative de créer eux-mêmes une "clinique de l'endométriose". "En l'absence de critères d'agrément, ce terme recouvre toutefois des réalités très diverses", souligne le KCE. "Ainsi, 13 cliniques de l'endométriose n'accueillent par exemple que 20 nouvelles patientes par mois, voire moins. Sept déclarent qu'elles n'organisent pas de concertations multidisciplinaires pour discuter de la prise en charge. Par ailleurs, 47 hôpitaux sans clinique de l'endométriose rapportent qu'ils pratiquent également la chirurgie de l'endométriose. Certains opèrent même des cas d'endométriose profonde, alors qu'il peut s'agir d'une intervention très complexe" (lire par ailleurs l'opinion du Dr Cusumano sur notre site). Le KCE propose que les codes de nomenclature des traitements chirurgicaux (à créer) ne puissent être attestés que par les cliniques de l'endométriose et les centres d'expertise. Enfin, le programme de financement d'essais cliniques non commerciaux "KCE trials" lancera, le 21 mai, un appel à projets d'études touchant spécifiquement à la prise en charge de l'endométriose.