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Le monde des technologies médicales est en effervescence depuis quelques années déjà. Si certaines applications ont montré leurs limites, d'autres laissent envisager des potentialités infinies.Petit cocorico, dans ce milieu, la Belgique est plutôt active. De nombreux projets, souvent des spin-offs universitaires, portent aujourd'hui leurs fruits. C'est le cas par exemple de Fibricheck, une application médicale de surveillance et de contrôle des arythmies cardiaques, notamment de la fibrillation auriculaire (FA). Aujourd'hui, plus besoin de dispositif spécifique, ni même d'ECG : le smartphone suffit, grâce à la photopléthysmographie (PPG). Derrière cette trouvaille, une start-up belge qui emploie aujourd'hui près de 20 personnes. Dans le même domaine, l'entreprise Kantify et Iridia, le laboratoire de l'ULB dédié à la recherche sur l'intelligence artificielle (IA) ont mis au point un modèle capable de prédire un épisode de fibrillation auriculaire dans les 30 secondes précédant l'incident cardiaque avec une précision dépassant les 80%. Une première mondiale.On citera également Bloomlife, une start-up liégeoise qui propose un medical device connecté qui, combiné à l'intelligence artificielle, permet de réduire l'incidence des complications de grossesse, en commençant par les naissances prématurées. Le tout, à l'aide d'un capteur et d'un patch jetable posés sur le ventre de la future maman. Une aubaine pour cette dernière qui peut être monitorée à domicile et une aubaine pour le médecin qui reçoit des informations médicales récoltées sur une période bien plus large qu'un simple monitoring à l'hôpital.Enfin, s'il ne s'agit pas d'une application médical per se, Seek & Care propose tout simplement de devenir l'Amazon médical, soit une plateforme en ligne reliant médecins et fournisseurs médicaux. " Le but est de créer la première plateforme mondiale qui permette de créer un one stop shop - comprenez un lieu qui offre au consommateur la possibilité de réaliser la majorité de ses achats en un même endroit - "pour tous les médecins qui doivent acheter leurs fournitures médicales", explique Alexandre Dewulf, un des deux fondateurs de la société basée à Nivelles." Il est impossible de prédire ce que nous réserve l'avenir ", expliquait lors d'un récent colloque Olivier Wathelet, docteur en anthropologie (Université de Nice) spécialisé en innovation. La raison ? En résumé, cela peut partir dans tous les sens tant les possibilités offertes par la technologie sont grandes.Néanmoins, deux domaines atteignent aujourd'hui une certaine maturité et sont promis à un bel avenir : ceux de l'imagerie et des capteurs.Grâce à l'intelligence artificielle, les technologies de l'imagerie permettront demain d'analyser ce que le médecin seul ne peut faire aujourd'hui. C'est typiquement le discours tenu par le Pr Philippe Coucke (Uliège) depuis des années : l'intelligence artificielle permet une fréquence d'analyse inatteignable pour le cerveau humain. 2019 a vu naître bon nombre de projets liés à l'imagerie, de la dermatologie à la médecine d'urgence. Mais d'ici 2025, des projets tels que Surgelight (oncologie) ou Depist-eye (autisme) seront certainement mûrs.Surgelight, projet porté par la VUB, a pour objectif de développer un système de guidage chirurgical capable de visualiser simultanément et en temps réel des tissus présentant un intérêt, tels que les tumeurs, les nerfs et les vaisseaux sanguins. Pour y arriver, la solution associe deux technologies clés : des agents de contraste fluorescents à base de nanocorps et un système d'imagerie à vie par fluorescence. " Le but est d'aider le chirurgien pendant l'opération en éclairant des tissus spécifiques grâce aux produits de contraste ", détaille Hans Ingelberts, porteur du projet. La tumeur est l'exemple le plus évident, mais il ne s'agit pas de la seule application possible. " Cela peut également être très intéressant de voir les nerfs par contraste. Par exemple, lors de l'opération d'un patient atteint d'un cancer de la prostate, il peut arriver qu'un nerf soit endommagé et que la fonction érectile soit compromise. "Les technologies liées à l'image ne se résument pas à l'opératoire. Le centre de recherche de l'ULB " Acte ", dédié à l'autisme, travaille sur un outil de dépistage du trouble, basé sur l'oculométrie - ou eye-tracking - et des mesures précises du développement linguistique précoce. Son nom : Depist-Eye. Son objectif : orienter plus tôt vers un spécialiste. L'outil se compose d'une plateforme informatique et d'une caméra. La session commence par une phase de calibration permettant à la caméra d'adapter ses mesures à l'oeil de l'enfant. Ce dernier est ensuite invité à regarder des vidéos. Les unes proposent un son coordonné à l'image, les autres non. Une récompense visuelle survient lorsque le regard de l'enfant s'attarde sur la vidéo synchrone. " Le but est de vérifier si l'enfant est capable d'intégrer l'information auditive et visuelle ", explique Fanny Stercq, assistante de recherche au sein d'Acte. " L'enfant aura envie de voir la récompense et sera tenté de regarder là où elle va apparaître. Mais il le fera uniquement s'il fait bien la distinction entre les deux séquences. " L'outil permet in fine de savoir si l'enfant présente ou non un risque lié à l'autisme.L'autre domaine porteur est lié aux capteurs. On pense évidemment aux capteurs qui permettent de faire du monitoring via des toilettes intelligentes ou des pyjamas intelligents par exemple. Mais cela concerne également l'équipement des chirurgiens. Sensendo, par exemple, travaille sur un endoscope avec retour de force, car le chirurgien ne dispose pas du sens du toucher pendant l'opération. Un sens bien utile pour être précis lors d'injection ou pour ne pas percer de parois. " Pour arriver à développer l'outil, nous avons collaboré avec des médecins ", explique Nicolas Geuens, porteur du projet. " Ils ont voulu que l'on résolve le problème de perte de sensation lors de l'utilisation de l'endosccope, qui est long et mou. "D'autres applications sont également envisagées, notamment grâce aux biocapteurs, qui permettront demain de pouvoir réaliser un bilan sanguin voire de déceler des protéines cancéreuses à partir d'une simple goutte de sang, à l'instar de ce qui se pratique déjà avec le finger-prick pour les patients diabétiques. Un des nombreux exemples de ce qu'il sera possible de faire dans un futur très proche.