Si l'activité physique et sportive (sans aller jusqu'aux excès de type Ironman) ont démontré depuis longtemps leurs bienfaits sur le plan somatique, leur efficacité dans de nombreux troubles mentaux comme l'excès de stress et la dépression s'est également affirmée depuis plusieurs années. Les effets positifs chez les patients cancéreux sont globalement moins connus, bien qu'ils soient également démontrés.
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Dans le cas de la dépression (y compris de sa prévention), l'effet bénéfique de l'activité physique passe par plusieurs voies biologiques. Elles ne sont probablement pas encore toutes connues en détails, mais on peut citer la production accrue, par le cerveau, de facteurs de croissance comme le VEGF (qui favorise la vascularisation) et le BDNF (brain-derived neurotrophic factor), qui favorise la neurogenèse. Il en résulte notamment un volume de matière grise plus important en comparaison avec celui des personnes sédentaires. Plus classiquement connue, l'augmentation des taux sanguins d'endorphines et de neuromédiateurs opiacés endogènes chez le sportif au cours de l'effort contribue à une stimulation globale qui accompagne une sensation d'euphorie, comme cela a été observé chez les personnes pratiquant au moins une heure d'activité physique par semaine. Par ailleurs, l'impact positif sur la qualité du sommeil participe à la prévention du stress chronique et de la dépression. Les données sont également très positives dans le domaine de l'oncologie. Dans le cas du cancer du sein par exemple, une activité physique suffisante peut réduire jusqu'à 50% le risque de décès, en comparaison avec les patientes qui restent trop sédentaires. De même, le risque de rechute serait statistiquement diminué d'environ 20%. Cet effet bénéfique en oncologie est largement démontré, comme l'explique le Pr Didier Maquet [1], entouré du Pr Guy Jérusalem [2] et du Pr Jean-François Kaux [1]. Le journal du Médecin: Que dit la littérature au sujet de l'impact de l'activité physique chez les patients cancéreux? Didier Maquet: Elle parle de l'activité physique non seulement en termes de prévention primaire mais également de traitements en périodes hospitalière et ambulatoire, jusqu'à la pratique d'activités physiques à long terme. Des recommandations ont progressivement été établies pour les personnes touchées par un cancer. Ainsi, selon l'American College of Sports Medicine, l'inactivité physique devrait être évitée autant que possible, et les activités quotidiennes devraient être reprises le plus rapidement possible après une éventuelle chirurgie et pendant les traitements adjuvants. En l'absence de contre-indications, les recommandations sont globalement identiques à celles relatives à une population en bonne santé et de même catégorie d'âge, mais avec une adaptation en fonction du niveau d'activité physique antérieur au traitement, des comorbidités, de la réponse thérapeutique et des éventuels effets indésirables rencontrés. Qu'est-il recommandé plus précisément comme type et niveau d'activité physique dans ce contexte? Il est conseillé d'initier, par semaine et de manière homogène, un entraînement aérobie de 150 minutes à une intensité modérée, ou de 75 minutes à une intensité plus élevée. Les recommandations comprennent également un entraînement des principaux groupes musculaires (2 à 3 séries de 8 à 12 répétitions, 2 à 3 fois par semaine), avec une charge très faible au départ et si possible augmentée par petits incréments, ainsi que des étirements (2 à 4 séries de 10 à 30 secondes à raison de 2 à 3 fois par semaine). Comment expliquer le manque relatif d'activité physique? Pour être en mesure d'accroître l'adoption et le maintien à long terme d'un mode de vie physiquement actif, il est important de prendre en considération les nombreux obstacles possibles à la pratique régulière. Ces obstacles peuvent être d'ordre physique (comme la fatigue, les douleurs, les nausées, les raideurs articulaires...), d'ordre psychologique (comme le manque de motivation, le manque d'intérêt, la peur de se blesser, l'anxiété...), d'ordre social (manque de compagnie et/ou de soutien, contraintes et responsabilités familiales...), d'ordre environnemental (manque d'infrastructures appropriées et/ou de moyens de transports, information insuffisante, manque de temps disponible...) ou encore, en relation avec l'existence de fausses croyances sur la pratique de l'activité physique. À l'inverse et outre la prise en compte de ces obstacles possibles, que peut-on présenter comme arguments à ces patients pour les inciter à bouger? De nombreux facteurs motivationnels à la pratique d'activités physiques sont répertoriés dans la littérature. Il s'agit de facteurs physiques (amélioration de la santé globale, gestion du poids corporel, amélioration de l'image corporelle...), de facteurs psychologiques (amélioration de la qualité de vie, diminution de la dépression et/ou du stress, amélioration de l'estime de soi...), de facteurs sociaux (rencontres de nouvelles personnes, sorties...) et de facteurs environnementaux (individualisation de l'entraînement, informations par l'équipe médicale, facilité d'accès...). Au travers de la prise en charge du cancer, que peuvent proposer les hôpitaux? Les centres hospitaliers développent progressivement des programmes de prise en charge des patients oncologiques non seulement au cours de l'hospitalisation, mais également durant les phases ambulatoires. Les programmes de réadaptation ambulatoire proposent idéalement une approche multidisciplinaire, comprenant bien entendu la phase d'évaluation du patient, suivie d'un programme individualisé de réentraînement progressif, et qui s'appuie sur les diverses recommandations internationales. S'y ajoutent des séances éducationnelles avec des thématiques diverses comme, outre les bénéfices procurés par l'activité physique, notamment la gestion du stress et de l'anxiété, les troubles de la sexualité, les troubles du sommeil ou encore la peur de la rechute de la pathologie cancéreuse. J'insisterai sur un point: dans le cadre de l'intégration de l'activité physique dans le trajet de soins du patient en oncologie, il apparaît primordial de l'informer sur l'intérêt, les bienfaits et les modalités de pratique d'activités physiques à privilégier à court, moyen et long termes. Qu'observe-t-on sur le terrain? On constate fréquemment une réduction de l'activité physique après le diagnostic de cancer et durant le traitement. Le niveau d'activité peut également rester faible alors que le traitement s'achève. C'est regrettable car, de manière générale, les effets positifs de l'activité physique post-cancer tiennent non seulement dans l'amélioration de la qualité de vie mais également de la fatigue ressentie, de la fonction cardiopulmonaire, de la composition corporelle, ainsi que du bien-être émotionnel, physique et psychique. Sans oublier une réduction potentielle du risque de récurrence et du taux de mortalité, tant de cause générale que liée à la maladie.