Le comité Hospital & Transport Surge Capacity a demandé le mardi 30 novembre à tous les hôpitaux généraux et universitaires de supprimer obligatoirement, avec effet immédiat et pour une période de deux semaines, le programme électif, tout en préservant les soins urgents et nécessaires. Le lendemain, le comité leur permettait tout de même de continuer dans certaines conditions. Des directives contradictoires qui ne facilitent pas le travail des directions médicales.
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Dans sa circulaire du 30 novembre, le comité HTSC constatait que "l'évolution au sein des hôpitaux et des unités de soins intensifs est très précaire" et qu'il faut "prendre les mesures de régulation nécessaires en fonction de l'évolution épidémiologique et de la lourde charge qui pèse sur le secteur hospitalier."Le 30 novembre 2021, les hôpitaux belges comptaient 3.750 patients Covid et 780 patients Covid-USI. "Les modèles de prévision suggèrent toujours que cette tendance à la hausse se poursuivra. D'ici le 6 décembre 2021, nous dépasserons probablement la barre des 900 patients Covid-USI et, si la tendance ne s'inverse pas, celle des 1.000 patients Covid-USI d'ici le 10 décembre 2021", prévenait le HTSC. Au moment de boucler cette édition, le 7 décembre, Sciensano recensait 816 patients en USI. Pour le HTSC, il n'est pas réaliste de descendre en dessous d'un minimum de 800 lits dans les soins intensifs non-Covid. "En outre, les hôpitaux, comme d'autres secteurs, sont confrontés à une importante pénurie de personnel, ce qui entraîne la fermeture de lits. En raison du manque de personnel, plus de 220 lits USI sont fermés aujourd'hui. Cela signifie que le nombre de lits de soins intensifs théoriquement disponibles aujourd'hui est inférieur à 1.800. Ces constats et prévisions signifient qu'à très court terme, il n'y aura plus de marge de manoeuvre dans nos unités de soins intensifs sans intervention. Cela nous oblige à prendre des mesures avec effet immédiat", a annoncé le comité aux directions hospitalières le 30 novembre. Le HTSC a donc demandé le 30 novembre à tous les hôpitaux généraux et universitaires de faire tout leur possible pour mettre à disposition l'intégralité de la phase 1B et pour rouvrir les lits USI fermés. "Si, pour des raisons de ressources humaines, il n'est pas possible d'ouvrir un lit "full-high care-ICU", il faut au moins en faire un lit middle-care dans lequel les patients peuvent être pris en charge pré- ou post-soins intensifs", recommandait le comité. Et de rappeler que les soignants asymptomatiques vaccinés peuvent, à condition de respecter les mesures de protection nécessaires, travailler dans une unité Covid. Les hôpitaux généraux et universitaires devaient, à cette date, supprimer immédiatement, pour une période de deux semaines, le programme électif. Cette mesure concerne: les activités pouvant être reportées et nécessitant des soins intensifs ; les hospitalisations classiques qui ne font pas appel aux soins intensifs et les activités chirurgicales en hôpital de jour qui ne font pas appel aux soins intensifs, ceci afin de pouvoir déployer le personnel du bloc opératoire et de la salle de réveil dans l'encadrement de la pleine capacité des soins intensifs de la phase 1B. Par contre, les activités non chirurgicales en hôpital de jour, les consultations, activités d'hospitalisation à domicile et équipes mobiles étaient maintenues. Le comité encourageait une consultation optimale avec les collègues à l'intérieur et à l'extérieur du réseau en ce qui concerne la répartition efficace et en temps voulu des patients Covid. "Seules la solidarité et une répartition optimale entre tous les hôpitaux peuvent garantir un maximum de soins réguliers pour les patients non-Covid."Les réactions à cet arrêt des activités n'ont pas tardé. Pour Gilbert Bejjani, secrétaire général de l'Absym: "Cela devient ridicule. C'est cela la stratégie de réponse au Covid? Empêcher les autres patients d'être soignés? Aucun soutien structurel au secteur! Des médecins spécialistes traités comme des vauriens corvéables et sous tutelle. Ce n'est ni bon sur le fond ni sur la forme." Pour Stephan Mercier, CEO du Groupe Jolimont : "C'est intenable et incompréhensible avec ce que l'on sait! Les patients nécessitant des soins aigus et urgents sont toujours pris en charge prioritairement et nous passons spontanément en mode crise lorsque la situation l'exige." "Cela n'a aucun sens", commente Sylvie Brichard, directrice générale de la Clinique Notre-Dame de Grâce. "La situation actuelle ne le nécessite pas, et nous sommes capables de nous préparer et de réagir rapidement au cas où cela deviendrait nécessaire. Et nos autres patients ont besoin de leurs soins!"Ces réactions des gestionnaires hospitaliers sont rapidement arrivées aux oreilles du ministre de la Santé publique et des experts du HTSC. FrankVandenbroucke a déclaré lors d'une conférence de presse qui s'est tenue le 1er décembre que "les hôpitaux capables de passer à la phase 2a, et de faire preuve de solidarité, peuvent continuer à maintenir une activité programmée. Il y a une certaine flexibilité." Les hôpitaux ont reçu un nouveau courrier du HTSC précisant en effet que "si un hôpital parvient à garantir la pleine capacité de la phase 1B, se prépare à passer à la phase 2A(-) et coopère solidairement dans le cadre du plan de répartition, nous ne pouvons que nous réjouir, en tant que comité, qu'il continue également à offrir à ses patients autant d'autres soins que possible. Le comité ne s'y opposera jamais. Toutefois, le comité devra s'opposer aux situations dans lesquelles la solidarité et la disponibilité demandées ne seraient pas respectées en raison d'activités pouvant être reportées."Dans son courrier, le HTSC tient à rassurer les directions hospitalières: le ministre et le Commissariat corona ont pris les contacts nécessaires avec l'Inami et le SPF afin d'assurer la compensation financière de ces mesures. "Cette communication ambivalente est problématique car les hôpitaux sont des paquebots difficiles à manoeuvrer", regrette François Burhin, CEO d'Epicura. Un avis que partagent certainement de nombreux gestionnaires hospitaliers qui ont dû prendre le matin du 1er décembre des mesures pour réduire l'activité médicale non-urgente et puis les modifier dans le courant de la journée. Les directions médicales du Réseau hospitalier namurois et les directions générales du réseau Phare ont d'ailleurs pris la plume (lire l'édito en page 2 et les tribunes publiées sur notre site) pour alerter les autorités sur la gestion de la quatrième vague et les choix éthiques qui en découlent.