Le 9 et le 16 novembre dernier, la note de politique générale Santé publique de Frank Vandenbroucke a été disséquée à la Chambre. D'aucuns notent une meilleure reconnaissance de la santé mentale et des soins palliatifs notamment, mais nombreux pointent également les manques de la note de politique générale: peu de choses sur la première ligne, sur la revalorisation des professions médicales.
...
"Notre système de santé a été résilient", explique Frank Vandenbroucke, ministre fédéral de la Santé, lorsqu'il présente sa note de politique générale, le 9 novembre dernier (lire jdM n°2693). L'homme axe son discours avant tout sur la pandémie mais n'oublie pas le reste. "La pandémie a montré les points faibles de notre système de santé." Concrètement, le budget 2022 est supérieur de 5,6% à celui de 2021, soit une augmentation de 1,7 milliard d'euros. Frank Vandenbroucke définit quelques priorités rassemblées autour des thématiques de la prévention, de la qualité et de l'accessibilité des soins. "L'accent sera mis sur les trajets de soins, la réduction du maximum à facturer pour les bas revenus, le tiers-payant, une plus grande accessibilité des soins bucco-dentaires, davantage d'hospitalisations de jour et la digitalisation des soins via le Dossier médical intégré."Ensuite, cela part tous azimuts, du renforcement de la première ligne à l'e-santé, en passant par une réforme du financement hospitalier. C'est le problème inhérent aux notes de politique générale, il y a beaucoup matière, mais peu de détails. Avec une majorité Vivaldi rassemblant sept partis, les réactions sont mièvres. Côté PS, Patrick Prévot se dit "réjoui" par l'investissement du gouvernement dans les soins de santé. "Une attention particulière a été portée sur l'accessibilité aux soins de santé mentale, au Fonds Blouse blanche. Le fonds a permis de créer 4.500 emplois dans le secteur et a toutes les raisons d'être poursuivi."L'intérêt des remarques vient, comme souvent, davantage de l'opposition qui s'est voulu constructive. Sophie Rohonyi (Défi) note ainsi également une meilleure prise en charge de la santé mentale, des soins palliatifs et l'attention portée à l'accès financier aux soins de santé. Elle émet toutefois quelques réserves, notamment sur la gestion de la crise sanitaire et sur le soutien au personnel soignant. "Il y a un hiatus entre vos déclarations et vos actes. Les généralistes sont fatigués, et c'est un constat qui ne date pas d'hier. Le problème persiste et le burnout guette." Une problématique soulevée par la majorité des parlementaires, tout groupe confondu. "Les infirmiers également se sentent toujours laissés pour compte, et ce malgré les mesures prises. Ces dernières sont insuffisantes, en particulier au regard de la crise à gérer. Le Fonds Blouse blanche ne permet pas d'éviter la fuite de personnel. Mettre de l'argent sur la table est utile, mais il faut également trouver des soignants."La plus piquante - et la plus longue - sera Catherine Fonck. La députée cdH pose, dans le détail, plusieurs questions sur l'accessibilité et la qualité des soins. Elle estime qu'il y a "beaucoup d'études, beaucoup d'examens, beaucoup d'évaluations, et on est à deux ans de la fin de la législature. Il y a pourtant beaucoup d'éléments connus. Cela me donne une impression générale de flou, qu'il y a beaucoup de principes et énormément de chantiers sans mesures concrètes." Comme Sophie Rohonyi, la néphrologue pointe le manque de soutien à la première ligne, aux infirmiers. Elle souligne également la problématique des numéros Inami. "Les politiques ont toujours flingué la commission de planification fédérale, et maintenant que chaque communauté a sa commission, on va remettre en place un organe interfédéral. C'est surréaliste. On scinde, pour remettre une structure fédérale. C'est inefficient. On perd un temps fou et on aggrave les difficultés d'une approche cohérente."Franck Vandenbroucke a pris le temps de répondre. Il aura pris plus de deux heures, dont 35 minutes rien que pour la gestion de la crise sanitaire. Preuve s'il en est du poids de cette crise sur la politique menée en santé. On retiendra, de tous les sujets abordés, la réforme du financement des hôpitaux. "Je prévois de disposer d'un plan d'action détaillé d'ici la fin de ce mois", détaille le ministre Vooruit. "Je sais qu'il aurait été mieux d'être plus avancé, mais le Covid a accaparé beaucoup d'énergie et de temps. On peut d'ailleurs dire que la pandémie a montré à quel point le financement des hôpitaux est anachronique et désespérément compliqué. Ça l'était déjà lorsque je gérais ce département il y a 20 ans. Le système est devenu encore plus complexe entre-temps. Une nouvelle réforme majeure est donc nécessaire. Mais il faudra beaucoup de temps, peut-être dix ans."Concernant la pénurie de médecins généralistes, Franck Vandebroucke admet que le problème est "sérieux". "Il faut augmenter le nombre de généralistes formés, mais aussi revaloriser la profession. Cela passe par un changement des pratiques, davantage de collaborations et de digitalisation." L'homme mise clairement sur les pratiques de groupe, de quoi alimenter les discussions au sein de l'Absym notamment, qui défend la pratique médicale en solo (lire jdM n°2693). Inévitablement, le ministre est revenu sur le contingentement. "Nous devons sortir du débat persistant sur les approches différentes au nord et au sud du pays. Idéalement, j'aimerais parvenir le plus rapidement possible à un accord avec le gouvernement des communautés sur la manière dont nous pouvons garder la situation sous contrôle dans les deux parties du pays. Des contacts bilatéraux sont prévus. Si cette méthode ne fonctionne pas, la décision sera fédérale. Quoi qu'il en soit, j'ai dans mes tiroirs une proposition entièrement élaborée concernant des attestations fédérales de contingentement. La méthode que nous utilisons pour fixer les quotas est révolue. Il faut la moderniser."