Le KCE (Centre d'expertise des soins de santé) a reçu la mission de réévaluer deux listes mentionnant les maladies concernées pour le droit à l'oubli, soit la possibilité d'échapper aux radars de certaines assurances (solde restant dû pour un crédit hypothécaire) dix ans après un cancer, par exemple. La première mission concerne le cancer du sein dont les délais d'oubli sont amenés à être fortement réduits. Si toutefois les ministres compétents suivent l'avis du KCE.
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Pour ceux qui l'ignoreraient, les personnes souffrant de maladies chroniques ou qui ont subi des traitements contre le cancer peuvent rencontrer des réticences de la part de compagnies d'assurance. Celles-ci craignent que l'état de santé de l'emprunteur ne lui permette pas de rembourser la totalité de l'emprunt (solde restant dû en matière de crédit hypothécaire, crédit professionnel...). L'assureur peut tout simplement refuser ou exiger des primes importantes. Pour ces malades, l'accès à la propriété est difficile voire impossible. Le "droit à l'oubli" consiste à faciliter l'accès à ce type d'assurance, généralement après dix ans pour les cancers, sans payer de surprime liée aux antécédents de santé. La loi ad hoc date en Belgique d'avril 2019. "Deux grilles de référence annexes à cette loi prévoient même des modalités plus "soft" pour certains cancers et maladies chroniques: des délais inférieurs à dix ans, une surprime plafonnée, voire une interdiction de refus d'assurance."Tenant compte de l'évolution rapide de la médecine, ces deux listes doivent être adaptées. Le KCE a reçu pour mission de réaliser cette adaptation. Le Centre commencera par le cancer du sein aux stades précoces. "Sur la base d'une analyse minutieuse des courbes de survie de ce type de cancer, nos chercheurs ont émis des propositions de raccourcissement du délai d'attente qui concerneraient potentiellement environ une femme sur deux atteintes d'un cancer du sein."En décembre 2020, a démarré l'identification des pathologies devant être étudiées "en priorité". En fin de compte, douze pathologies ont été considérées comme prioritaires. Après le cancer du sein, place au diabète de type 1, au cancer de la thyroïde, au mélanome de stade I et au VIH. La première évaluation porte sur le carcinome du sein in situ ou infiltrant à un stade précoce. "Dans le cas du cancer du sein, la grille de référence prévoit actuellement un délai d'attente d'un an après la fin du traitement pour le cancer in situ et un délai de dix ans pour tous les autres stades. La question qui se pose est de savoir si ces délais ne sont pas excessifs pour des petites tumeurs sans signes de gravité, et ce d'autant plus qu'elles représentent une proportion importante des cancers du sein diagnostiqués - et traités avec succès - aujourd'hui." Les chercheurs du KCE ont travaillé en étroite collaboration avec la Fondation Registre du cancer qui couvre pratiquement 98% de tous les cancers, et plus de 99% des cancers du sein. "Sur un total de 132.425 diagnostics de cancer du sein (depuis 2007) dans la base de données du Registre du cancer, des analyses statistiques ont été réalisées sur les données de survie de 93.368 personnes, à savoir 10.452 avec un cancer in situ et 82.916 avec un carcinome de stade I ou II."L'indicateur retenu le plus pertinent dans le contexte étudié a été le "point de guérison statistique", soit "le plus court délai depuis le diagnostic où l'on observe que le risque de mortalité des personnes atteintes de cancer est similaire à celui de la population générale de même sexe et de même tranche d'âge". Cette notion est purement statistique. Certains patients sont considérés comme guéris alors qu'ils n'ont pas atteint ce fameux "point de guérison". "Sur la base des 10.452 cas de cancer in situ recensés, aucune surmortalité n'a été observée jusqu'à 14 ans après la date de diagnostic. Par conséquent, les chercheurs proposent de ne plus imposer de délai d'attente pour les personnes atteintes de ce type de cancers. Pour les carcinomes infiltrants de petite taille (T0 ou T1) et précoces (stade I), les courbes de survie se rapprochent de celles de la population générale à partir d'un an et ce tout au long des 10 années suivantes. Les chercheurs proposent d'envisager un délai d'attente d'un an, au lieu de 10 ans actuellement." En plus, le KCE propose que le délai d'attente court à partir de la date du diagnostic plutôt que de la date de fin de traitement comme actuellement, cette dernière étant difficile à évaluer contrairement à celle du diagnostic forcément plus précise. Cette modification concernerait environ une femme sur deux diagnostiquée avec un cancer du sein. Dans quel délai tout ceci sera-t-il appliqué? Légalement, le KCE transmet ces propositions au Bureau du suivi de la tarification assurance solde restant dû, "qui devra ensuite les communiquer, assorties de son propre avis, aux autorités politiques compétentes (Secrétaire d'État à la Protection des consommateurs, ministre des Affaires sociales et ministre de l'Économie)". Le KCE n'émet qu'un avis, ce sont les ministres compétents qui implémenteront ces modifications.