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Aucours du dernier week-end de septembre, les services de police de la province d'Anvers ont mené une action coordonnée. Son nom : Drugs, no way. Entre le vendredi 27 septembre 18 h et le lundi 30 septembre 6 h, 6.264 conducteurs ont été soumis à un test de dépistage d'alcool et de drogues. Au total, 130 conducteurs dépassaient la dose autorisée d'alcool dans le sang (0,5 pour mille). Un test salivaire a été réalisé chez 86 conducteurs, pour détecter la présence éventuelle de substances. Parmi ceux-ci, trente-trois personnes ont été testées positives. Au total, 65 permis ont été retirés (31 pour consommation abusive d'alcool et 34 pour consommation de drogue).Les contrôles ont permis de réaliser que les chauffeurs sous l'emprise de cannabis étaient ceux qui manquaient le plus de clairvoyance quant aux risques de la conduite " sous influence ". Selon la chercheuse Bieke François et son collègue Ludo Kluppels de l'institut Vias, il y a là une différence majeure avec les consommateurs d'alcool. " Ces derniers ont bien conscience du danger potentiel de leur comportement, même s'ils se sentent, pour la plupart, encore assez " en forme " pour conduire de manière sûre. Les consommateurs d'alcool vont également compenser leur ivresse par une conduite plus lente, sur des axes moins fréquentés. " A l'inverse, les consommateurs de drogues estiment que leur pratique a un effet positif sur leur conduite. " Les fans de cannabis invoquent souvent une conduite plus détendue, alors que les consommateurs de cocaïne et d'amphétamines se pensent plus à l'affût du danger. "Par ailleurs, les consommateurs de cannabis jugent cette drogue différente de l'alcool. Il est vrai que la consommation d'alcool est plus courante et qu'elle a des conséquences plus graves au volant, tant au niveau du nombre que de la gravité des accidents. Cela ne signifie pas, estiment les chercheurs, que son usage est sans risques. " Le cannabis donne une sensation de calme, mais il n'en altère pas moins le temps de réaction. Le conducteur sous l'emprise de cette drogue a aussi tendance à s'écarter de sa bande de conduite, à mal estimer les distances et à voir son attention chuter. Quant aux produits stimulants, ils rendent certes plus alertes, mais donnent également lieu à une surestimation, une prise de risque déraisonnable, voire à de l'agressivité. "Autre distinction par rapport à l'alcool, les consommateurs de cannabis connaissent mal la législation actuelle. Les conducteurs pensent que sa consommation est " légale " et s'attendent au même seuil de tolérance qu'avec l'alcool. De par son usage médicinal (la plupart du temps par vaporisation ou infusion), ils pensent aussi souvent qu'il est une drogue " sûre ".Par ailleurs, il est parfois difficile d'évaluer le temps d'attente nécessaire avant de pouvoir reprendre le volant après avoir fumé un joint. Le THC, la substance active du cannabis, est relativement longtemps détectable dans le corps, et le consommateur ne connait jamais l'exacte teneur en THC de son joint. Il n'existe donc aucune valeur de référence auquel se raccrocher comme pour l'alcool. Le foie met environ une heure et demi à dégrader une unité standard d'alcool. Dans les faits, toute personne ayant consommé du cannabis dans les 12 heures sera testée positive.Les consommateurs d'amphétamines et de cocaïne savent très bien qu'ils franchissent une limite, tant en matière de consommation que de conduite sous influence. Ces personnes ont souvent déjà eu à faire avec la police et la justice pour d'autres faits.Au vu de l'augmentation de l'usage de cannabis et d'autres drogues, le Vias plaide pour des contrôles plus ciblés, doublés d'une communication claire sur les conséquences potentielles de la drogue au volant. La rapidité du test salivaire devrait permettre la multiplication des contrôles.De surcroît, l'institut Vias en appelle à davantage de réhabilitation. L'usage de drogue doit être abordé dans sa globalité, pas seulement pour ses conséquences sur la sécurité routière. Il faut étudier l'impact sur la conduite des nouvelles substances comme le gaz hilarant ou les dérivés du cannabis, et savoir si elles peuvent être décelées avec les tests actuels.