Jacques de Toeuf, président honoraire de l'Absym, commente le budget Inami tel que voté au Conseil général (lire notre dernière édition). La pilule la plus difficile à avaler est l'aide réservée aux seuls médecins conventionnés... sous condition, en plus, de prester des soins "appropriés".
...
Le journal du Médecin: L'aide pour les surcoûts liés à la crise énergétique a été réservée aux seuls médecins conventionnés. L'Absym a réagi négativement à cette mesure... Jacques de Toeuf: En effet. Pour les hôpitaux, 80 millions d'euros sont prévus. Plus une série d'aide pour les dispensateurs en pratique ambulatoire. Ils ont fait le choix de réserver cette aide aux praticiens entièrement conventionnés en pratique ambulatoire (pas les partiellement déconventionnés). Et d'autres conditions s'ajoutent: ils doivent s'inscrire dans une trajectoire de "appropriate care" en vue de transferts possibles (lire supra, ndlr). Les spécialistes n'auront droit à quasiment rien. Et dans les 83% de conventionnés officiels, on somme les conventionnés totaux et les partiels. Or nous ne savons pas combien il y a de conventionnés partiels dans ce pays. Ces chiffres ne sont pas donnés par l'Inami... Ils doivent en outre appartenir à un secteur qui utilise la masse d'index sélective (et non linéaire). Donc pour recevoir cette aide "énergie", le corps médical doit accepter d'utiliser l'index sélectivement. Comme d'habitude, il faudra ponctionner jusque 100 millions chez les spécialistes pour financer la médecine générale. Quatrième condition: il faut, comme je le disais, avoir progressé suffisamment sur la voie de l'appropriate care (càd: avoir mis le doigt sur des soins "inappropriés"). En résumé: ce ne sera pas évident! Les non-conventionnés ont autant de problèmes de déplacement, de chauffage, si pas plus puisqu'ils ont en général plus de frais de personnel. D'ailleurs, le Cartel a émis également un non catégorique. En 2023, vous aurez l'index en totalité? Oui. Il est inscrit dans le budget: +8,14% moins ce qu'on a déjà reçu et moins 1% mis dans l'accord pour des budgets spécifiques dont l'assistant de pratique du MG. Ceci représente quand même 80 millions. Et les 5% restants feront l'objet de discussions en médico-mut très prochainement: indexation linéaire ou sélective. À décider. L'Absym s'oppose également à l' "IRM conventionné"... Disons que puisque les hôpitaux ont le monopole sur ces machines, on trouve logique que le malade ne soit pas confronté à un service dans lequel on pratique des suppléments sur la totalité des résonances magnétiques en ambulatoire (en hospitalier, c'est réglé). Nous avons donc accepté dans l'accord médico-mut qu'en matière de Pet-scan, CT-scan et résonance magnétique, l'hôpital offre un service au tarif [conventionné]. Notre problème, c'est la forme que cela prend dans la Loi-programme de Frank Vandenbroucke: elle nous oblige de soigner tout le monde aux tarifs [conventionnés]. Notons que ceci concerne les BIM pour qui les suppléments d'honoraires sont supprimés... Le New Deal pour les MG est pour votre syndicat de mauvais augure, mais s'annonce déjà un New Deal pour les spécialistes... C'est la première fois qu'on en a entendu parler pour les spécialistes! Le New Deal pour les MG a été publié par Frank Vandenbroucke (ndlr: en juin dernier). En soi, pourquoi pas? Le problème est qu'on n'a jamais eu l'occasion d'en discuter. Un groupe de travail "New Deal" travaille sous l'égide du Pr Belche (ULiège). Ce groupe prépare tout cela avec le Pr De Maeseneer et toute la bande des gauchos généralistes bien connus favorables au forfait. Mais on nous avait parlé d'une troisième voie (choix du forfait ou à l'acte pour le généraliste). On verra ce qui en sortira. Pour les spécialistes, ce serait aberrant, évidemment. D'autant qu'ils mélangent des choses qu'on ne peut réduire en un concept unique. On mélange tous les points non résolus par le groupe Annemans de l'UGent dont les honoraires de surveillance. Ce groupe s'était arrêté sur un constat d'échec. Toutefois, la majorité des experts concluaient qu'il fallait absolument garder une médecine à l'acte hormis les forfaits existants de pratique. Très loin de la position de De Maeseneer, de Ri De Ridder, de AADM et tous ces gens-là. Vandenbroucke a tout arrêté et a confié le dossier à Belche et consorts. Pour les MG et les Sp, il y aura des groupes de travail en médico-mut. Mais ils ne se pencheront pas sur les honoraires de surveillance car là n'est pas le problème... On pourrait simplement analyser des coûts moyens par cabinet (modèle Pirson). Les experts vont analyser la disponibilité d'un médecin non nécessairement liée au traitement d'un malade comme la permanence 24h/24 des médecins dans les hôpitaux qui n'existe pas, le temps passé aux réunions multi-disciplinaires (supervision). On est un peu perdu car tout cela est très neuf... Mais ce n'est pas forcément négatif... On verra... Ce qui nous a heurtés, c'est "l'appropriate care". Il y a à boire et à manger. Comme la prose, on fait des "soins appropriés" depuis toujours. On réduit le prix d'actes pour financer autre chose comme les montants réservés par exemple. Ce qui choque c'est le ministre Vandenbroucke qui, pour tous les secteurs, demande 20 millions d'économies en 2023 et 80 millions en 2024, sans savoir ce que les soins appropriés recoupent réellement. Et si on ne fait pas, on vous met le bonnet d'âne comme à l'école primaire: ces montants seront retirés du budget. Si on y arrive, par contre, un montant sera pour nous et un autre pour alimenter la nébuleuse transversale multidisciplinaire (le "rêve éveillé" de Vandenbroucke). Y a-t-il une note positive? Comme l'enveloppe bien-être de 150 millions pour les dispensateurs de soins par exemple? D'abord, la garantie de l'index pour les médecins eux-mêmes même si on sait qu'il y aura cinq sauts d'index entre juillet 2022 et juillet 2023. 8,14% d'index, c'est l'index du passé... Félicitons-nous de tout ce qui a été fait en termes d'accessibilité pour le patient comme la non-indexation des plafonds du Maximum à facturer. Ce qu'on regrette, en revanche, c'est que la concertation médico-sociale est devenue une simple consultation: vendredi, on reçoit la proposition du conseil général du lundi. Et débrouillez-vous...