En 2022, si les connaissances scientifiques ne manquent pas pour objectiver et traiter la dénutrition chez les personnes âgées, il n'en reste pas moins que les conditions pour que son incidence augmente sont nombreuses.
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A l'inflation provoquée par la forte reprise économique globalement observée en Occident depuis plus d'un an s'ajoutent les conséquences croissantes de la guerre en Ukraine et de la détérioration de nos relations avec Moscou, ce qui tend à renchérir l'alimentation. Comme si cela ne suffisait pas, la pénurie de soignants et les révélations sur des pratiques douteuses au sein des maisons de repos se conjuguent à un isolement croissant des seniors, avec un éparpillement de la famille aux quatre coins du pays quand ce n'est pas du monde. Si les médecins que nous sommes ont peu prise sur ces différents facteurs sociétaux de risque, des outils de dépistage, de prévention et de traitement peuvent les compenser au moins partiellement. C'est ce qui ressort du webinaire organisé le 24 avril dernier par Rampe-âge 2.3 (SSMG) en collaboration avec l'Aviq, notamment avec l'exposé d'Oana Monica Bantea, gériatre au CHR Site Meuse. Au domicile, le dépistage de la dénutrition chez la personne âgée devrait être réalisé au moins une fois par an. Il passe par le repérage des situations à risques (altération de la santé, polymédication, isolement social, douleurs chroniques, difficultés masticatoires et de déglutition, etc) et de signes d'appel variés: un appétit diminué, une diminution de la qualité et de la diversité alimentaires, une perte de poids (avec une alerte lorsqu'elle est supérieure à 5% en un mois ou à 10% en six mois). Un repère souvent cité pour le diagnostic de dénutrition est un IMC < 21. Cependant, un IMC > 21 n'exclut pas toujours le diagnostic, notamment en cas d'obésité au départ. Le score MNA peut également être utilisé: un risque de dénutrition s'observe clairement entre 17 et 23,5/30, et est nettement élevé en-dessous de 17. Enfin, le critère majeur de morbi-mortalité est l'albuminémie inférieure à 35 g/l. La prise en charge de la dénutrition commence évidemment par celle de ses causes, dont les pathologies sous-jacentes et d'autres facteurs comme l'affaiblissement de l'odorat et du goût ainsi que des troubles de la déglutition. Viennent ensuite les conseils nutritionnels et/ou une alimentation enrichie, si possible avec l'aide d'une diététicienne. Les CNO (compléments nutritionnels oraux) ne sont à envisager qu'en cas d'échec des mesures de base ou si le patient est en état de dénutrition sévère (albuminémie < 30 g/l). L'alimentation entérale sera discutée en cas d'insuffisance de la nutrition orale, tandis que la voie parentérale sera réservée aux cas de malabsorption sévère, d'occlusion intestinale ou d'échec de l'alimentation entérale. Elle sera également à prescrire en première intention en cas de dénutrition sévère avec apport oral très faible et/ou de troubles sévères de la déglutition. Son initiation se fera en milieu hospitalier, avec un retour à domicile idéalement coordonné avec le médecin généraliste et les paramédicaux - diététicienne y comprise. Deux situations particulières peuvent également être difficiles à appréhender sur le terrain: la fin de vie et la démence. Dans la première, l'objectif sera d'assurer autant que possible le confort du patient. La nutrition par voie entérale ou parentérale n'est pas recommandée ; il s'agira avant tout de soulager les symptômes pouvant altérer l'envie ou le plaisir de s'alimenter, comme les nausées ou la sécheresse buccale. Dans la démence légère ou modérée s'accompagnant d'une perte de poids, on veillera tout particulièrement aux divers troubles alimentaires associés (souvent au niveau de la déglutition). La prise en charge sera généralement orale, et parentérale en cas d'échec. Quant à la nutrition entérale, elle n'est pas recommandée en cas de démence sévère.