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Originaire d'Ostende, baigné par l'oeuvre de Spilliaert, Ensor, ses concitoyens, et le surréalisme de Delvaux et Magritte, Raoul Servais a constitué une oeuvre cinématographique originale, faite essentiellement de courts métrages, si l'on excepte Taxandria en 1994, ce film qui utilisait la technique de la servaisgraphie, détaillée dans l'expo que le musée Belvue lui consacre. Une oeuvre certes esthétiquement superbe qui mélangeait donc animation et prises de vue réelles, mais dont le résultat fut un naufrage narratif doublé d'une catastrophe industrielle auquel contribua François Schuiten au niveau des décors. Pas rancunier, celui-ci met en scène les trois salles que le musée consacre à l'Ostendais aujourd'hui âgé de 93 ans. Expo chronologique qui voit sa technique évoluer du style dépouillé et basique de La fausse note et La lumière du port au début en passant par Pégasus, ode à l'école de peinture de Laethem-Saint-Martin et Permeke. Au travers de rushs de films, de celluloïds et d'extraits (le cinéaste a légué ses archives à la Fondation Roi Baudouin), l'on voit le style de Servais en perpétuelle évolution, l'amenant avec Harpya à décrocher la Palme d'or à Cannes en 1979. L'échec cuisant de Taxandria n'empêchera pas ce poète expérimentateur que l'on voit au travail dans un documentaire qui lui est consacré (sa table de montage est également exposée), de continuer à explorer dans Papillons de nuit en 1998 et jusqu'au Grand Gaillard consacré à la Première Guerre mondiale et qui vient de sortir en novembre... Illustrée de toiles de Spilliaert, Ensor et Delvaux, cette petite mais éloquente exposition met en lumière le talent d'un artisan qui a traversé toute l'épopée du cinéma d'animation, de ses débuts fait-main aux technologies dernier cri, en conservant constamment sa vision poétique d'une peinture animée au travers de sa lanterne magique.