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Comme un signe des dieux (égyptiens), cette année coïncide également avec la découverte de la tombe de Toutankhamon, cent ans après la présentation de sa découverte à l'Académie des Belles-Lettres par Jean-François Champollion, qui marque également la naissance de l'égyptologie. L'exposition, qui choisit le bleu en arrière-fond dans sa partie initiale consacrée aux premières découvertes du jeune Champollion, décrit d'abord l'enfance de ce surdoué, initié par son aîné de 12 ans, Jacques-Joseph, aux merveilles de l'Égypte ancienne. Jean-François a 10 ans lorsque son frère le confronte, en 1801, aux premiers objets rapportés de la campagne d'Égypte. L'exposition explique ensuite le contexte familial et éducatif du scientifique, avant de plonger dans l'héritage égyptien ancien tel qu'il fut propagé par les Grecs puis les Romains, avant d'être oublié dans les sables du temps. Au passage, on découvre le célèbre portrait de Champollion par Léon Cogniet, derrière lequel on distingue les deux colosses de Memnon de Thèbes. La période romaine est l'occasion d'admirer comment la déesse Isis fut romanisée au travers de diverses sculptures, ou comment la célébration du dieu Bacchus, illustré d'un camée somptueux, se faisait en présence de lions pharaoniques, comparés à des statues de lions de Saqqarah datant du Nouvel Empire. La Renaissance italienne voit l'intérêt pour l'Égypte ancienne, lié au retour à l'époque classique, ressurgir, notamment grâce au cardinal Albani, grand collectionneur. Dans cette partie d'un vert bronze, au sein d'une présentation fluide et aérienne, l'expo propose notamment le Ramsès II en albâtre daté du 18e siècle, dit "Albani". Le jeune Champollion, mort à 41 ans à peine, déboule dans ce contexte post-campagne d'Égypte, se passionne pour l'époque pharaonique et entreprend, sur base d'une copie de la pierre de Rosette, de déchiffrer les hiéroglyphes. Il deviendra ensuite conservateur du musée égyptien et signera le catalogue du tout nouveau Museo Egizio de Turin. Dans les espaces en rouge, le propos de l'exposition illustre le combat de Champollion contre les résistances de l'Église - qui craint que ses découvertes n'invalident la version biblique, notamment concernant le rôle de Pharaon dans le Livre -, celles des savants - l'occasion d'admirer une pendule de Lépine représentant le temple de Hathor à Dendéra -, et la concurrence de Thomas Young, l'Anglais qui tenta en même temps que lui de déchiffrer la pierre de Rosette. Cette pierre que les Français découvrirent, mais qui leur fut ravie par les Anglais à la bataille de Canope, laquelle scelle le désastre de la campagne d'Égypte. Heureusement, Champollion sauvera l'honneur des Français en déchiffrant les hiéroglyphes à partir d'une copie de la stèle. Toute une partie de cette belle exposition, qui multiplie les statues, stèles, papyrus et documents précieux, explique comment les inscriptions en démotique (égyptien manuscrit cursif et rapide, par opposition à l'écriture hiératique et aux hiéroglyphes) et en grec lui permirent le déchiffrement de cette écriture destinée aux happy few de l'ancienne Égypte. Le copte, langue liturgique des chrétiens égyptiens (et ancien idiome de l'Égypte), permit également à Champollion de venir à bout de cette énigme, comme l'expliquent fort bien les cartels et bornes interactives permettant de saisir le sens des symboles et dessins. Comme l'écrivait Young, beau joueur, "la clé anglaise pour comprendre les hiéroglyphes se révéla inopérante sur une serrure rouillée" (une expo a lieu également au British Museum, détenteur de la vraie pierre de Rosette). Vengeant l'honneur français, Champollion - qui fut exilé à Figeac, sa ville natale, pour avoir soutenu l'Empereur lors de son retour - devint en 1826 conservateur du musée d'Égypte. Il participa à une expédition franco-toscane en 1828, quelques années avant sa mort (on peut découvrir en immersion virtuelle, en compagnie du scientifique, le temple d'Abou Simbel). Lui qui connut le Haut-Empire, ne connut pas le 'bas empire' de Napoléon III, mais bien les Trois Glorieuses de la révolution de 1830, laquelle chassa son mécène, le roi Charles X, et donna lieu à un pillage du musée par les révolutionnaires, pillage illustré par un tableau de Bézard. Cette partie, toujours d'un vert bronze, montre l'importance du développement des collections privées et publiques. Elle déborde de sarcophages, statues et stèle du Nouvel Empire (égyptien celui-là). Elle présente un somptueux masque funéraire en or de la même époque, et même une chaise en bois incrustée d'ivoire intacte, découverte dans une tombe. L'expo se termine sur le monument L'Égypte éclairant l'Orient, projet conçu par Bartholdi pour le canal de Suez qui servit de modèle pour la statue de la Liberté.