Posons d'emblée une balise importante. Zoothérapie et médiation animale sont deux choses différentes. La zoothérapie consiste en une thérapie assistée par l'animal, dans laquelle des professionnels sélectionnent des animaux pour interagir de manière ciblée avec des patients. Contrairement à la médiation animale, orientée bien-être général, la zoothérapie s'appuie sur des objectifs thérapeutiques précis définis pour chaque patient, avec un suivi comparable aux thérapies traditionnelles. Audrey Desrosiers, zoothérapeute, co-autrice de l'ouvrage "Zoothérapie: L'animal, une révolution dans le domaine du soin" et figure de proue de la discipline au Québec, insiste sur l'importance de cette distinction: "En zoothérapie, on ne laisse pas le choix de l'animal au patient. En tant que thérapeutes, c'est nous qui le sélectionnons en fonction de l'objectif, du comportement et des préférences du patient."

Audrey et son équipe ont également recours aux cochons d'Inde et aux tourterelles pour des interventions plus délicates.

Audrey Desrosiers et sa collègue belge Mélissa Snauwaert, alignent ainsi le choix des animaux sur les objectifs cliniques: "Si un patient autiste, par exemple, montre des signes d'anxiété en présence de gros animaux, nous allons introduire un petit chien ou un lapin pour réduire les réactions de stress", explique-t-elle. Le rôle de l'animal ne se limite pas à celui d'un "outil" ou d'un "moyen". Chaque animal est entraîné et considéré comme un partenaire thérapeutique à part entière.

Briser le mutisme

Les troubles du spectre autistique comptent parmi les indications les plus fréquentes en zoothérapie. Plusieurs études et retours d'expérience montrent des effets positifs des interactions animales sur les compétences sociales et la gestion des émotions de certains patients autistes. Audrey Desrosiers observe des progrès concrets en matière de communication et d'autonomie, parfois même dès les premières séances: "On voit souvent des enfants qui, réfractaires à des séances de psychothérapie classique, s'ouvrent naturellement dès qu'un chien, un lapin ou même un cochon d'Inde est présent. Cette approche est pertinente pour des patients en mutisme sélectif ou en opposition passive: certains enfants vont ignorer des questions d'un thérapeute humain, mais répondent immédiatement aux sollicitations d'un animal."

La tourterelle rieuse trouve une place dans les troubles d'apprentissage., Getty Images
La tourterelle rieuse trouve une place dans les troubles d'apprentissage. © Getty Images

En pratique, les zoothérapeutes commencent souvent par une évaluation du profil de chaque patient afin de sélectionner l'animal et de déterminer le protocole de soins. Par exemple, pour un enfant autiste souffrant de phobies, un petit chien non envahissant peut être introduit progressivement, avec des exercices de renforcement positif. Pour d'autres, des animaux plus imposants, comme des poneys ou des moutons, peuvent jouer un rôle de médiateur en encourageant l'enfant à interagir et à contrôler son impulsivité. Selon Audrey Desrosiers, la flexibilité de la zoothérapie permet d'adapter l'interaction au rythme de chaque patient: "Les animaux sont choisis et préparés en fonction des pathologies, mais aussi de la personnalité et des besoins de chaque patient."

Des applications pour les maladies neurodégénératives

Dans les soins gériatriques, la zoothérapie est particulièrement utilisée auprès de patients atteints de la maladie d'Alzheimer ou d'autres formes de démence. Les témoignages, corroborés par des données cliniques, attestent des effets bénéfiques de l'interaction animale sur l'apaisement et la réduction des comportements agressifs. En Belgique, cette thérapie commence à intégrer certains services de gériatrie. Les chiens et les chats, mais aussi des animaux plus inhabituels, tels que des oiseaux et des lapins, sont utilisés pour stimuler les sens des patients et susciter des réponses émotionnelles positives.

"Pour les patients en stade avancé de démence, même un simple contact avec un animal peut provoquer des réactions émotionnelles fortes, comme un sourire ou un éclat de rire", explique Audrey Desrosiers. "L'animal devient une sorte de catalyseur qui permet au patient de réagir au monde extérieur, même lorsque les interactions humaines deviennent de plus en plus difficiles. Cette réaction positive aux animaux s'expliquerait, d'après certaines études, par des déclenchements d'hormones favorisant le bien-être, comme l'ocytocine."

La zoothérapie est pertinente pour des patients en mutisme sélectif ou en opposition passive: certains enfants vont ignorer des questions d'un thérapeute humain, mais répondent immédiatement aux sollicitations d'un animal." - Audrey Desrosiers

Animaux variés, compétences ciblées

Les animaux choisis pour la zoothérapie sont sélectionnés selon des critères stricts d'évaluation comportementale et physique. Audrey Desrosiers mentionne diverses espèces qui vont des plus familières, comme les chiens et les chats, aux plus rares dans un cadre thérapeutique, comme les poneys ou même les poules. "Les chiens restent les plus populaires pour des interventions de proximité, mais nous avons aussi des poneys pour les jeunes enfants qui ont besoin d'un contact rassurant sans être envahis", explique-t-elle. Ces animaux doivent afficher une solide stabilité comportementale et être capables de tolérer différents environnements et manipulations.

Le cochon d'Inde est d'une grande patience et a un contact rassurant., Getty Images
Le cochon d'Inde est d'une grande patience et a un contact rassurant. © Getty Images

Audrey et son équipe ont également recours aux cochons d'Inde et aux tourterelles pour des interventions plus délicates, notamment auprès de patients souffrant de phobies animales ou de jeunes enfants. "Le cochon d'Inde, en particulier, est d'une grande patience et a un contact rassurant pour des enfants en phase de socialisation. Nous l'utilisons dans des classes d'intégration pour des jeunes avec troubles du comportement, car sa douceur permet de canaliser les émotions tout en restant discret." Quant à la tourterelle, il en existe une race particulière, la tourterelle rieuse, qui trouve une place en thérapie de patients qui souffrent de troubles d'apprentissage. "On va faire des moments de lecture accompagnés par l'animal. Il y a plein de moments où ces patients, adultes comme enfants, butent sur un mot ou prononcent un mot de travers. Spontanément, la tourterelle se met à rire, littéralement, parce que c'est son cri. Ça dédramatise complètement le fait de faire des erreurs!"

Desrosiers, A. & Snauwaert, M. (2024) Zoothérapie: L'animal, une révolution dans le domaine du soin. éd. Guy Trédaniel.

Recommandations pratiques pour les médecins

Si la zoothérapie séduit de plus en plus de professionnels, son intégration en milieu médical demande une approche méthodique, d'autant que la Belgique commence seulement à structurer ce secteur. Voici des recommandations concrètes pour les médecins souhaitant inclure cette thérapie dans leur réseau de soins.

1. Sélectionner des zoothérapeutes formés et expérimentés : vérifiez que le zoothérapeute dispose d'une formation rigoureuse, idéalement dans un programme reconnu. "Les zoothérapeutes doivent posséder une expertise spécifique, car il ne s'agit pas simplement d'amener un animal au patient, mais de mener une intervention avec des objectifs thérapeutiques bien définis", souligne Audrey Desrosiers. Les praticiens doivent aussi être titulaires d'une assurance professionnelle couvrant les soins avec des animaux.

2. Collaborer avec des établissements spécialisés : en Belgique, les partenariats commencent à se structurer. Des hôpitaux et des maisons de repos font appel à des zoothérapeutes pour des séances régulières ou, dans certains cas, forment leurs employés à la zoothérapie pour une plus grande autonomie. Audrey Desrosiers et Mélissa Snauwaert se sont spécialisées dans l'accompagnement des établissements: "Nous intervenons dès la conception pour que l'environnement prenne en compte la présence d'animaux, ce qui permet d'éviter des erreurs de structure nuisibles au bien-être animal", précise la première.

3. Établir des protocoles clairs et un suivi thérapeutique : la zoothérapie implique un suivi rigoureux, comparable à celui de toute autre approche thérapeutique. Un protocole de prise en charge est établi, avec des objectifs définis et une réévaluation régulière, souvent tous les deux à trois mois, pour ajuster les interventions. Les médecins référents seront attentifs aux rapports sur l'évolution des patients, leur permettant d'intégrer les résultats dans une perspective de soins globale.

4. Évaluer les contre-indications : tous les patients ne sont pas réceptifs à la zoothérapie. Les phobies, les allergies graves ou un manque d'intérêt pour les animaux limitent l'utilisation de cette approche. "La zoothérapie demande une forme d'adhésion naturelle de la part du patient", rappelle Audrey Desrosiers. Pour des patients souffrant d'allergies, les zoothérapeutes peuvent proposer des animaux hypoallergéniques, comme certains chiens, mais la sélection reste essentielle pour ne pas forcer un patient à interagir avec un animal.

Posons d'emblée une balise importante. Zoothérapie et médiation animale sont deux choses différentes. La zoothérapie consiste en une thérapie assistée par l'animal, dans laquelle des professionnels sélectionnent des animaux pour interagir de manière ciblée avec des patients. Contrairement à la médiation animale, orientée bien-être général, la zoothérapie s'appuie sur des objectifs thérapeutiques précis définis pour chaque patient, avec un suivi comparable aux thérapies traditionnelles. Audrey Desrosiers, zoothérapeute, co-autrice de l'ouvrage "Zoothérapie: L'animal, une révolution dans le domaine du soin" et figure de proue de la discipline au Québec, insiste sur l'importance de cette distinction: "En zoothérapie, on ne laisse pas le choix de l'animal au patient. En tant que thérapeutes, c'est nous qui le sélectionnons en fonction de l'objectif, du comportement et des préférences du patient."Audrey Desrosiers et sa collègue belge Mélissa Snauwaert, alignent ainsi le choix des animaux sur les objectifs cliniques: "Si un patient autiste, par exemple, montre des signes d'anxiété en présence de gros animaux, nous allons introduire un petit chien ou un lapin pour réduire les réactions de stress", explique-t-elle. Le rôle de l'animal ne se limite pas à celui d'un "outil" ou d'un "moyen". Chaque animal est entraîné et considéré comme un partenaire thérapeutique à part entière. Les troubles du spectre autistique comptent parmi les indications les plus fréquentes en zoothérapie. Plusieurs études et retours d'expérience montrent des effets positifs des interactions animales sur les compétences sociales et la gestion des émotions de certains patients autistes. Audrey Desrosiers observe des progrès concrets en matière de communication et d'autonomie, parfois même dès les premières séances: "On voit souvent des enfants qui, réfractaires à des séances de psychothérapie classique, s'ouvrent naturellement dès qu'un chien, un lapin ou même un cochon d'Inde est présent. Cette approche est pertinente pour des patients en mutisme sélectif ou en opposition passive: certains enfants vont ignorer des questions d'un thérapeute humain, mais répondent immédiatement aux sollicitations d'un animal."En pratique, les zoothérapeutes commencent souvent par une évaluation du profil de chaque patient afin de sélectionner l'animal et de déterminer le protocole de soins. Par exemple, pour un enfant autiste souffrant de phobies, un petit chien non envahissant peut être introduit progressivement, avec des exercices de renforcement positif. Pour d'autres, des animaux plus imposants, comme des poneys ou des moutons, peuvent jouer un rôle de médiateur en encourageant l'enfant à interagir et à contrôler son impulsivité. Selon Audrey Desrosiers, la flexibilité de la zoothérapie permet d'adapter l'interaction au rythme de chaque patient: "Les animaux sont choisis et préparés en fonction des pathologies, mais aussi de la personnalité et des besoins de chaque patient."Dans les soins gériatriques, la zoothérapie est particulièrement utilisée auprès de patients atteints de la maladie d'Alzheimer ou d'autres formes de démence. Les témoignages, corroborés par des données cliniques, attestent des effets bénéfiques de l'interaction animale sur l'apaisement et la réduction des comportements agressifs. En Belgique, cette thérapie commence à intégrer certains services de gériatrie. Les chiens et les chats, mais aussi des animaux plus inhabituels, tels que des oiseaux et des lapins, sont utilisés pour stimuler les sens des patients et susciter des réponses émotionnelles positives. "Pour les patients en stade avancé de démence, même un simple contact avec un animal peut provoquer des réactions émotionnelles fortes, comme un sourire ou un éclat de rire", explique Audrey Desrosiers. "L'animal devient une sorte de catalyseur qui permet au patient de réagir au monde extérieur, même lorsque les interactions humaines deviennent de plus en plus difficiles. Cette réaction positive aux animaux s'expliquerait, d'après certaines études, par des déclenchements d'hormones favorisant le bien-être, comme l'ocytocine."Les animaux choisis pour la zoothérapie sont sélectionnés selon des critères stricts d'évaluation comportementale et physique. Audrey Desrosiers mentionne diverses espèces qui vont des plus familières, comme les chiens et les chats, aux plus rares dans un cadre thérapeutique, comme les poneys ou même les poules. "Les chiens restent les plus populaires pour des interventions de proximité, mais nous avons aussi des poneys pour les jeunes enfants qui ont besoin d'un contact rassurant sans être envahis", explique-t-elle. Ces animaux doivent afficher une solide stabilité comportementale et être capables de tolérer différents environnements et manipulations. Audrey et son équipe ont également recours aux cochons d'Inde et aux tourterelles pour des interventions plus délicates, notamment auprès de patients souffrant de phobies animales ou de jeunes enfants. "Le cochon d'Inde, en particulier, est d'une grande patience et a un contact rassurant pour des enfants en phase de socialisation. Nous l'utilisons dans des classes d'intégration pour des jeunes avec troubles du comportement, car sa douceur permet de canaliser les émotions tout en restant discret." Quant à la tourterelle, il en existe une race particulière, la tourterelle rieuse, qui trouve une place en thérapie de patients qui souffrent de troubles d'apprentissage. "On va faire des moments de lecture accompagnés par l'animal. Il y a plein de moments où ces patients, adultes comme enfants, butent sur un mot ou prononcent un mot de travers. Spontanément, la tourterelle se met à rire, littéralement, parce que c'est son cri. Ça dédramatise complètement le fait de faire des erreurs!"