Au départ, il y a la chloroquine, un anti-malarien. Mais depuis, on a fait mieux et avec moins d'effets secondaires. Surtout, le parasite hôte de la maladie a développé une résistance à la chloroquine, devenue moins efficace. Le médicament n'est même plus disponible en Belgique.
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Mais lors de l'épidémie du Sras en 2002-2003, la chloroquine démontre une efficacité in vitro contre le virus responsable, le Sars-CoV1 (qui partage 80 % de son patrimoine génétique avec l'actuel virus). L'épidémie passée, les fonds avaient manqué pour un essai clinique robuste... qui aurait été pourtant bien utile aujourd'hui.La molécule avait pourtant confirmé son efficacité face au Mers-Cov, quelques années après l'épidémie du Sras. Elle la confirme même contre le virus actuel, à en croire quelques premières études rétrospectives sur des malades traités, mais non encore publiées. Une étude clinique est en cours.Pourtant, la molécule n'a pas été retenue par le comité scientifique du consortium français REACTing, qui lance ce lundi un essai clinique de grande taille. Trois traitements potentiellement efficaces y seront comparés avec les simples traitements de soutien visant à alléger les symptômes.Ce consortium est présidé par le professeur Jean-François Delfraissy, actuel président du Comité consultatif français d'éthique (CCNE). Il estime que " nous aurions pu inclure la chloroquine, cela a été sérieusement envisagé, mais nous avons considéré qu'elle présentait trop de problèmes d'interactions médicamenteuses". Un avis qui laisse perplexe d'autres spécialistes : " Les interactions médicamenteuses sont bien plus nombreuses avec le lopinavir, que REACTing a inclus dans deux des trois schémas thérapeutiques testés", souffle une de nos sources.Ce sont manifestement les " anti-chloroquine" qui ont pu imposer leur vision. Comme Martin Hirsch, directeur général de l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris : " Tous les spécialistes que j'ai vus disent de la chloroquine : 'à chaque fois qu'il y a un nouveau virus, il y a un type qui dit que ça va marcher'", a-t-il déclaré sur Europe 1. Hirsh reconnaît que la chloroquine peut fonctionner, mais pas sur un individu porteur du virus. " La chloroquine marche très bien dans une éprouvette mais n'a jamais marché chez un être vivant". Gilbert Deray, néphrologue à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière, juge sur Europe 1 ce médicament "inutile et dangereux. Il faut y faire très attention parce qu'il donne beaucoup d'effets secondaires, et en particulier il donne des atteintes de la rétine avec des pertes de la vision qui peuvent être irréversibles".A noter que le médicament préconisé par Sciensano est bien l' hydroxychloroquine (HCQ), un métabolite de la chloroquine, nettement mieux toléré que cette dernière. Les partisans de la chloroquine/hydroxychloroquine restent profondément convaincus qu'ils tiennent là ce qui pourrait devenir un levier majeur de lutte contre la maladie.C'est tellement vrai qu'un essai clinique évaluant l'hydroxychloroquine portant sur 24 malades atteints du Covid-19 a commencé à l'Institut hospitalo-universitaire (IHU) Méditerranée Infection de Marseille, par les équipes du professeur Didier Raoult, virologue au pedigree impressionnant. " J'utilise la chloroquine depuis vingt ans, notamment contre les infections. Car au niveau intracellulaire, il agit contre les bactéries comme il agit contre les coronavirus. C'est le même mécanisme d'entrée dans la cellule. Des équipes chinoises de haut niveau ont publié des résultats très clairs dans Cell Research, le 4 février, qui démontrent en effet que la chloroquine présente une activité antivirale en empêchant les étapes d'entrée et de sortie du virus dans des cellules cultivées in vitro, stoppant ainsi efficacement sa réplication et sa propagation. Et, in vitro, la molécule était efficace contre le Sras. On peut faire confiance aux Chinois, ils ont 20 essais en cours sur le sujet. Mais entre les résultats bruts et une publication par peer review, il peut s'écouler des mois. On ne peut pas attendre. On connaît les doses adaptées, sans risque pour le patient. D'ailleurs, les Chinois en ont fait une instruction officielle: les malades doivent être traités avec de la chloroquine", explique Didier Raoult dans une vidéo postée par l'IHU. A la question " Si vous étiez touché par le corona, en prendriez-vous ?", le spécialiste répond clairement par l'affirmative.