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Artiste finlandais présent à la Biennale de Venise de 2013, Antti Laitinen est un plasticien finnois qui met à mal notre vision romantique de la nature que l'homme a voulu domestiquer. C'est dire si son travail, en symbiose cette fois avec le végétal et les arbres en particulier, a trouvé sa place dans le magnifique cadre du parc Tournay Solvay, lequel abrite justement l'Espace européen pour la sculpture, initiatrice de l'exposition.Cinq installations, qui s'intègrent, se glissent discrètement et sans heurs dans l'écrin de verdure de l'entrée de parc. Et pour cause, les deux premières en sont deux arbustes du domaine dont les branches sont soutenues entre elles par des tiges de métal (que l'on se rassure, ils étaient condamnés) : métaphore d'une nature assistée médicalement, d'un imaginaire humain échafaudé à son sujet et " sculptures " qui, au travers des tiges flottantes, au " membre " parfois amputé, possèdent un côté profondément absurde, surréaliste et quasi magrittien.L'un des deux petits arbres paraît d'ailleurs tout à fait mort et évoque un squelette voire un fossile, une sorte de dinosaure reconstitué, à qui il manquerait au squelette quelques os...Intégré également dans le paysage, la silhouette de la Villa blanche, joli pavillon situé à l'entrée du parc et siège de l'association : au travers d'une de ses fenêtres, l'on peut voir une vidéo montrant l'artiste débitant un arbre en 2012 (ce qui fait partie de son installation vénitienne en 2013) pour tenter laborieusement, et même piteusement, de le reconstruire au moyen d'outils humains. Le résultat est volontairement minable et cette nature morte largement moins gracieuse que l'oeuvre vivante et au... naturel. Une autre vidéo "Marionnette" exhibe un arbre peuplé de fils tendus (non, pas un saule pleureur) qui transforme l'arbre en " pantin " ; preuve que l'arbre est souvent le polichinelle du castelet de nos envies : pour poétique qu'elle soit, cette vidéo démonte le romantisme dont nos visions sylvestres sont embuées.La dernière installation consiste en un tronc d'hêtre (rappelons que la Finlande est grande exportatrice de bois) posé à même une pelouse qui évoque les sculptures de bronze, imitant en tout point la flore, de Penone. Sauf qu'ici l'hêtre, qui échappe au néant, a lui bien vécu, victime d'une tempête à Woluwe-Saint-Pierre. Son tronc est désormais couvert de clous plantés tout l'été par l'artiste, des élèves d'une école d'art Bruxelloise et par les visiteurs invités à emprunter ce passage clouté. 50.000 clous qui lui font comme un tapis de mousse de métal sur son coté verso, et qui, symboliquement, représente de façon traditionnelle le transfert de force d'énergie voir de stress par celui qui le plante. Un rituel chamanique qui rend à l'arbre, même mort, la place qui l'occupait précédemment dans la vie de l'homme ; d'Yggdrasil, immense frêne de la mythologie nordique, au chêne sous lequel Saint Louis rendait justice, l'arbre redevient ce qu'il était : un organisme vivant et, aux yeux des hommes, lien entre ces derniers et le cosmos ; un " être " qui sans le ou la " H " renvoie... à l'humain.La galerie Valérie Bach a présenté des vidéos et photos de l'artiste en juillet et également au cours du salon A performance affair du 5 au 8 septembre derniers aux anciens magasins Vanderborght de Bruxelles.