La " Commission spéciale chargée d'évaluer la gestion de la crise sanitaire de la Covid-19 par la Wallonie " a pour objectif d'évaluer la gestion de la crise sanitaire en Wallonie. L'occasion de tirer un premier bilan à l'aube d'un potentiel rebond et de tirer des enseignements de la pandémie.

Conquistadors de lasagne

Premier appelé à la barre, le ministre-président régional, Elio Di Rupo. On apprend de l'ancien Premier ministre que la Wallonie a consacré 1,59 milliard d'euros à la gestion de la crise hors les 260 millions d'euros prévus pour la revalorisation des travailleurs des secteurs de la santé et du social prévu dans le plan Rebond wallon. " En tout, le Gouvernement wallon a adopté 374 décisions. Nous avons dû passer à mon avis quelques centaines d'heures sur le Covid. "

Les débats sont essentiellement institutionnels avec un rappel de la répartition des compétences dans la gestion de la crise du Covid. Le principal enseignement ? La capacité exceptionnelle qu'ont nos décideurs à naviguer au sein des couches de la lasagne institutionnelle que constitue le pays.

Pour la gestion du Covid, et pour ne parler qu'en acronymes, il y a le CNS, le RAG, le RMG, le Celeval, le GEES, le COFECO et la CellInfo. Rien qu'au niveau fédéral ! Comme le dira André Frédéric, député PS, " tout cela n'est pas facile à expliquer au commun des mortels ". Pas plus pour les parlementaires, qui sont unanimes à se demander s'il n'y a pas des doublons, des retards dans la transmission de l'information.

La réponse du ministre-président ne sera hélas pas à la hauteur du questionnement des parlementaires : " Il y a maintenant des discussions, depuis quand même un certain temps, pour former un gouvernement fédéral. Laissons nos collègues qui oeuvrent décider avec la sagesse qu'il sied dans le monde dans lequel nous vivons. La seule chose que je voudrais vous rappeler : personnellement, je n'ai pas vécu le chaos, je vous le dis très sincèrement. Pourquoi n'ai-je pas vécu le chaos ? Simplement parce que je connais très bien notre pays, je connais très bien le rôle des uns et des autres. Je dois dire que nous avons eu, avec tous les niveaux de pouvoir, des relations qui ont permis de travailler. " Eminemment politique comme réponse, à l'évidence.

Christie Morreale sur le grill

Vendredi dernier, c'était au tour de Christie Morreale de faire le bilan de la crise. 45 minutes après, elle a terminé son tour d'horizon. Mais ce ne sont pas moins de quatre heures de questions et trois heures trente de réponses qui l'attendent. Un véritable one woman show. Elle a heureusement pu compter sur ses fardes, ses fiches bien préparées et la présence de sa cheffe de cabinet adjointe en charge des matières santé, Yolande Husden, au passage médecin généraliste.

Les parlementaires ont abordé tous les sujets, ou presque, à tel point que l'on ne retient parfois que le détail. Exemple avec la problématique de l'achat des masques non conformes : certains masques n'étaient pas de la qualité attendue, c'est vrai, mais d'autres ont été refusés alors qu'ils étaient conformes. L'explication ? Il aurait fallu apposer un " sparadrap sur le pont nasal parce qu'ils sont fabriqués en Asie et que l'on a des nez plus proéminents que les personnes asiatiques ", explique la vice-présidente wallonne. Cela ne s'invente pas.

Il y a évidemment d'autres choses à retenir des discussions autour des équipements de protection. Des chiffres essentiellement. " Au total, ce sont plus de 18 millions de masques chirurgicaux qui auront été livrés à nos structures, mais nous pensons également à l'avenir. Un stock stratégique et dynamique de 12,3 millions d'unités est en cours de constitution pour faire face aux besoins futurs. Par ailleurs, plus de quatre millions de masques FFP2 auront été distribués et un stock stratégique de plus d'un million de pièces est dès à présent constitué. "

Utilitariste, la Belgique ?

Le sujet sur toutes les lèvres, ce sont bien sûr les maisons de repos. A-t-on laissé mourir " nos vieux " comme l'estiment certains ? Si non, pourquoi, nos voisins font mieux que nous ? La réponse de la ministre n'étonnera personne : c'est la méthode de calcul. " Il s'est avéré que notre méthode de calcul était celle qui correspondait le plus à la réalité de ce qui s'est produit. D'autres États ont utilisé d'autres techniques qui sont plus éloignées de la réalité. On a dit très tôt que nous comptabilisions des cas qui étaient des cas suspectés dont on n'était pas sûr. Soyons clairs, il n'y avait pas de volonté politique de ma part de gonfler les chiffres. "

Pour rester dans les chiffres, la ministre régionale nous apprend qu'au " pic d'infection dans les établissements d'hébergement wallons, soit le 26 avril, entre 177 et 182 foyers sont identifiés, tous types d'hébergement confondus, soit 15 %. Parmi ces 182 foyers, 172 sont situés dans des maisons de repos, ce qui doit nous poser question : pourquoi est-il plus rentré là qu'ailleurs alors que ce sont des institutions fermées avec des personnes qui se côtoient ? On ne peut pas dire que dans le secteur du handicap les contacts ne sont pas rapprochés. "

Autre question sur les MRS : les non-hospitalisations. Elio Di Rupo comme Christie Morreale diront qu' "à aucun moment la Wallonie n'a donné de consigne qui consisterait à dire aux hôpitaux de ne pas faire entrer des personnes qui viennent des MR/MRS. "

La Conférence interministérielle Santé ajoute : " Aucune instruction n'a été donnée par les autorités pour refuser des soins hospitaliers à nos aînés. Si des problèmes se sont posés sur le terrain, ils doivent être signalés. Les autorités compétentes examineront ces plaintes et, le cas échéant, interviendront. "

Dont acte. Christie Morreale, sur la même ligne de conduite estime que " s'il y a eu une volonté d'hospitalisation et des refus, c'est important que des enquêtes soient menées pour essayer de comprendre ". Le Comité bioéthique analyse actuellement la situation. " Nous attendons donc leur retour. "

Vers une refédéralisation de la santé ?

D'autres thématiques ont animé le débat : le suivi de contact, avec une application numérique prévue fin de ce mois, le déconfinement, ou encore le fameux " plan rebond " en 13 points (voir l'article " Le plan rebond (quasi) prêt à la rentrée " sur le site web du journal du Médecin, 17 juillet 2020 1). Mais aussi l'institutionnel, où la ministre se mouille un peu plus que son ministre-président.

" Nous avons été confrontés parfois à l'une ou l'autre interrogation sur la répartition des compétences. Parfois, les choses étaient évidentes : on savait qu'elles relevaient du Fédéral, on savait qu'elles relevaient de la Région. Parfois, il y avait une sorte de flou qui nécessitait soit un peu de temps, dont nous ne disposions pas, et que nous devions donc reporter plus tard, comme le fait de pouvoir transcrire clairement ce qui relevait d'un pouvoir ou d'un autre. Mais je pense que ce qu'il faudra que l'on fasse à l'avenir, c'est un nouveau protocole qui est adapté à la réforme de l'État avec une répartition claire de " on confie les clés à qui " et en termes d'opérationnalisation de manière détaillée, ce qui peut se faire. "

Enfin, Christie Morreale relègue la question de la réfédéralisation des soins au futur gouvernement fédéral. Mais le débat semble ouvert. " Une fédéralisation complète des soins de santé, cela nécessite une majorité de deux tiers du Parlement fédéral, ce qui n'a pas été fait pendant la crise. Ce sera après, aux parlementaires et aux responsables des différents partis qui seront dans la majorité de réfléchir éventuellement à une évolution institutionnelle. Ils l'ont relevé, pendant la crise, cela ne leur semblait pas être le moment de rajouter de la difficulté à la difficulté. "

1. www.lejournaldumedecin.com/actualite/le-plan-rebond-wallon-quasi-pret-a-la-rentree/article-normal-49761. html

La " Commission spéciale chargée d'évaluer la gestion de la crise sanitaire de la Covid-19 par la Wallonie " a pour objectif d'évaluer la gestion de la crise sanitaire en Wallonie. L'occasion de tirer un premier bilan à l'aube d'un potentiel rebond et de tirer des enseignements de la pandémie. Premier appelé à la barre, le ministre-président régional, Elio Di Rupo. On apprend de l'ancien Premier ministre que la Wallonie a consacré 1,59 milliard d'euros à la gestion de la crise hors les 260 millions d'euros prévus pour la revalorisation des travailleurs des secteurs de la santé et du social prévu dans le plan Rebond wallon. " En tout, le Gouvernement wallon a adopté 374 décisions. Nous avons dû passer à mon avis quelques centaines d'heures sur le Covid. "Les débats sont essentiellement institutionnels avec un rappel de la répartition des compétences dans la gestion de la crise du Covid. Le principal enseignement ? La capacité exceptionnelle qu'ont nos décideurs à naviguer au sein des couches de la lasagne institutionnelle que constitue le pays. Pour la gestion du Covid, et pour ne parler qu'en acronymes, il y a le CNS, le RAG, le RMG, le Celeval, le GEES, le COFECO et la CellInfo. Rien qu'au niveau fédéral ! Comme le dira André Frédéric, député PS, " tout cela n'est pas facile à expliquer au commun des mortels ". Pas plus pour les parlementaires, qui sont unanimes à se demander s'il n'y a pas des doublons, des retards dans la transmission de l'information. La réponse du ministre-président ne sera hélas pas à la hauteur du questionnement des parlementaires : " Il y a maintenant des discussions, depuis quand même un certain temps, pour former un gouvernement fédéral. Laissons nos collègues qui oeuvrent décider avec la sagesse qu'il sied dans le monde dans lequel nous vivons. La seule chose que je voudrais vous rappeler : personnellement, je n'ai pas vécu le chaos, je vous le dis très sincèrement. Pourquoi n'ai-je pas vécu le chaos ? Simplement parce que je connais très bien notre pays, je connais très bien le rôle des uns et des autres. Je dois dire que nous avons eu, avec tous les niveaux de pouvoir, des relations qui ont permis de travailler. " Eminemment politique comme réponse, à l'évidence. Vendredi dernier, c'était au tour de Christie Morreale de faire le bilan de la crise. 45 minutes après, elle a terminé son tour d'horizon. Mais ce ne sont pas moins de quatre heures de questions et trois heures trente de réponses qui l'attendent. Un véritable one woman show. Elle a heureusement pu compter sur ses fardes, ses fiches bien préparées et la présence de sa cheffe de cabinet adjointe en charge des matières santé, Yolande Husden, au passage médecin généraliste. Les parlementaires ont abordé tous les sujets, ou presque, à tel point que l'on ne retient parfois que le détail. Exemple avec la problématique de l'achat des masques non conformes : certains masques n'étaient pas de la qualité attendue, c'est vrai, mais d'autres ont été refusés alors qu'ils étaient conformes. L'explication ? Il aurait fallu apposer un " sparadrap sur le pont nasal parce qu'ils sont fabriqués en Asie et que l'on a des nez plus proéminents que les personnes asiatiques ", explique la vice-présidente wallonne. Cela ne s'invente pas. Il y a évidemment d'autres choses à retenir des discussions autour des équipements de protection. Des chiffres essentiellement. " Au total, ce sont plus de 18 millions de masques chirurgicaux qui auront été livrés à nos structures, mais nous pensons également à l'avenir. Un stock stratégique et dynamique de 12,3 millions d'unités est en cours de constitution pour faire face aux besoins futurs. Par ailleurs, plus de quatre millions de masques FFP2 auront été distribués et un stock stratégique de plus d'un million de pièces est dès à présent constitué. "Le sujet sur toutes les lèvres, ce sont bien sûr les maisons de repos. A-t-on laissé mourir " nos vieux " comme l'estiment certains ? Si non, pourquoi, nos voisins font mieux que nous ? La réponse de la ministre n'étonnera personne : c'est la méthode de calcul. " Il s'est avéré que notre méthode de calcul était celle qui correspondait le plus à la réalité de ce qui s'est produit. D'autres États ont utilisé d'autres techniques qui sont plus éloignées de la réalité. On a dit très tôt que nous comptabilisions des cas qui étaient des cas suspectés dont on n'était pas sûr. Soyons clairs, il n'y avait pas de volonté politique de ma part de gonfler les chiffres. "Pour rester dans les chiffres, la ministre régionale nous apprend qu'au " pic d'infection dans les établissements d'hébergement wallons, soit le 26 avril, entre 177 et 182 foyers sont identifiés, tous types d'hébergement confondus, soit 15 %. Parmi ces 182 foyers, 172 sont situés dans des maisons de repos, ce qui doit nous poser question : pourquoi est-il plus rentré là qu'ailleurs alors que ce sont des institutions fermées avec des personnes qui se côtoient ? On ne peut pas dire que dans le secteur du handicap les contacts ne sont pas rapprochés. "Autre question sur les MRS : les non-hospitalisations. Elio Di Rupo comme Christie Morreale diront qu' "à aucun moment la Wallonie n'a donné de consigne qui consisterait à dire aux hôpitaux de ne pas faire entrer des personnes qui viennent des MR/MRS. "La Conférence interministérielle Santé ajoute : " Aucune instruction n'a été donnée par les autorités pour refuser des soins hospitaliers à nos aînés. Si des problèmes se sont posés sur le terrain, ils doivent être signalés. Les autorités compétentes examineront ces plaintes et, le cas échéant, interviendront. "Dont acte. Christie Morreale, sur la même ligne de conduite estime que " s'il y a eu une volonté d'hospitalisation et des refus, c'est important que des enquêtes soient menées pour essayer de comprendre ". Le Comité bioéthique analyse actuellement la situation. " Nous attendons donc leur retour. "D'autres thématiques ont animé le débat : le suivi de contact, avec une application numérique prévue fin de ce mois, le déconfinement, ou encore le fameux " plan rebond " en 13 points (voir l'article " Le plan rebond (quasi) prêt à la rentrée " sur le site web du journal du Médecin, 17 juillet 2020 1). Mais aussi l'institutionnel, où la ministre se mouille un peu plus que son ministre-président. " Nous avons été confrontés parfois à l'une ou l'autre interrogation sur la répartition des compétences. Parfois, les choses étaient évidentes : on savait qu'elles relevaient du Fédéral, on savait qu'elles relevaient de la Région. Parfois, il y avait une sorte de flou qui nécessitait soit un peu de temps, dont nous ne disposions pas, et que nous devions donc reporter plus tard, comme le fait de pouvoir transcrire clairement ce qui relevait d'un pouvoir ou d'un autre. Mais je pense que ce qu'il faudra que l'on fasse à l'avenir, c'est un nouveau protocole qui est adapté à la réforme de l'État avec une répartition claire de " on confie les clés à qui " et en termes d'opérationnalisation de manière détaillée, ce qui peut se faire. "Enfin, Christie Morreale relègue la question de la réfédéralisation des soins au futur gouvernement fédéral. Mais le débat semble ouvert. " Une fédéralisation complète des soins de santé, cela nécessite une majorité de deux tiers du Parlement fédéral, ce qui n'a pas été fait pendant la crise. Ce sera après, aux parlementaires et aux responsables des différents partis qui seront dans la majorité de réfléchir éventuellement à une évolution institutionnelle. Ils l'ont relevé, pendant la crise, cela ne leur semblait pas être le moment de rajouter de la difficulté à la difficulté. "