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Les études réalisées précédemment à ce sujet chez des patients hospitalisés avaient livré des résultats contradictoires. Néanmoins, il s'agissait majoritairement de travaux de petite ampleur, qui n'avaient pas la puissance suffisante pour démontrer un effet sur la mortalité. Le tocilizumab est un anticorps monoclonal qui entrave la liaison de l'interleukine-6 (IL6) aux récepteurs IL6. Ce mécanisme rejoint l'image que nous avons actuellement du décours de l'infection par le virus Sars-CoV-2. Après la phase virale aiguë, on assiste chez certains patients à un "dérapage" sous la forme d'un syndrome hyperinflammatoire, le fameux choc cytokinique, qui se caractérise par une libération massive de certaines cytokines inflammatoires dont l'interleukine-6. C'est durant cette phase que se développe l'insuffisance respiratoire. La publication qui nous intéresse ici concerne l'un des volets de Recovery, une étude britannique de grande envergure qui se concentre sur la recherche de traitements contre le Covid-19 sous l'égide des autorités. C'étaient déjà les chercheurs impliqués dans Recovery qui avaient démontré, l'été dernier, la capacité de la dexaméthasone à abaisser la mortalité chez les patients hospitalisés avec une infection Covid-19.(1) Basée sur un protocole randomisé (ouvert), l'étude est organisée dans près de deux cents hôpitaux du National Health Service britannique. Le volet qui nous intéresse ici a inclus plus de 4.000 patients hospitalisés(2) nécessitant l'administration - invasive ou non - d'oxygène et répondant aux critères d'une inflammation systémique (CRP ? 75 mg/l). Les auteurs précisent que le CRP est un marqueur approprié dans ce contexte spécifique, parce qu'il présente une bonne corrélation avec l'IL-6. Les participants ont été randomisés pour recevoir soit un traitement par tocilizumab (groupe traité), soit les soins standard (groupe contrôle). La majorité d'entre eux (82% dans les deux groupes) recevaient également des corticostéroïdes systémiques. Le critère d'évaluation primaire était la mortalité à 28 jours. La mortalité s'élevait à 31% dans le groupe traité vs 35% dans le groupe contrôle (p = 0,0028). L'effet était présent et du même ordre de grandeur dans tous les sous-groupes, en ce compris celui des patients gravement malades soumis à une ventilation invasive et celui des patients sous corticostéroïdes. La probabilité de pouvoir quitter l'hôpital endéans 28 jours était par ailleurs plus élevée chez les patients sous tocilizumab (57% vs 50% ; p < 0,0001). Chez les sujets qui n'étaient pas sous respirateurs au début de l'étude, le risque d'atteindre le critère d'évaluation combiné (respiration mécanique ou décès) était plus faible sous tocilizumab (35% vs 42% ; p < 0,0001). Ces résultats confirment ceux de Remap-Cap, une étude de plus petite ampleur qui était parvenue à la conclusion que le tocilizumab permettait (tout comme le sarilumab) d'abaisser la mortalité chez les patients en état critique.(3) Les auteurs estiment par conséquent que le tocilizumab devrait être ajouté au traitement des patients atteints d'une infection Covid-19 qui ont besoin d'oxygène et qui présentent un taux de CRP ? 75 mg/l. En dépit d'une corrélation hautement significative entre l'administration de tocilizumab et les chances de survie, ce taux de mortalité de 31% reste passablement préoccupant, avec un risque relatif de 0,89. L'effet est du même ordre de grandeur que celui déjà observé dans Recovery avec la dexaméthasone (1), associée à une mortalité de 22,9% vs 25,7% sous traitement standard (RR=0,89). Il semble donc que le salut ne viendra pas d'une molécule unique et qu'il serait judicieux de rechercher plutôt une combinaison susceptible de faire reculer encore davantage le nombre de décès.