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Une presse écrite et télévisuelle très secouée par l'irruption d'internet et qui peine à se remettre en question. "P ourquoi faudrait-il être le premier", assène Stéphane Paoli, ancienne grande voix de Radio France, " sachant que l'immédiateté est un leurre au bénéfice de l'audience, laquelle porte la manne de la publicité. Les grands groupes industriels qui se sont emparés (ndla: en France) de quotidiens, de magazines, de chaînes de radio et de télévision l'ont compris. Insidieusement s'est effacée la ligne de partage entre information et communication." Analysant la presse française d'aujourd'hui au travers notamment de son rendu de la crise des gilets jaunes, la journaliste qui se dit engagée, mais pas militante dans la cause environnementale... engage à observer justement, en filant la métaphore de l'alimentation bio, comment nous ingurgitons du fast-food informatif, de la junk-food, quant ce n'est pas de la fausse (fake) nourriture lorsqu'il s'agit des "news", désormais pléthoriques depuis l'apparition des réseaux sociaux. Les algorithmes ont ainsi une manière sournoise de nous informer, préférant, puisque financé par la pub, nous proposer, sans que nous n'en sachions rien, des informations qui risquent de nous conforter et non pas nous confronter dans nos convictions. Des machines qui ne sont pas intelligentes mais programmées pour et par la pub et qui privilégieront comme, la presse traditionnelle d'ailleurs dorénavant, le spectaculaire, l'émotion, le dramatique plutôt que le réfléchi. D'autant que, nous apprend l'ouvrage, d'après une étude réalisée par Microsoft, la durée d'attention de la génération des "millenials", celle qui est née avec des écrans devant les yeux, est de neuf secondes! Et le livre de mettre en exergue un retour à un journalisme au long cours, d'analyse, un journaliste de solutions (et non pas un journalisme des bonnes nouvelles), au travers d'expériences certes menée à travers le monde (dans Le Monde, The Guardian dans la presse locale et des presses plus spécialisées), mais qui restent des initiatives niches et limitées à des sphères thématiques précises. L'on peut d'ailleurs reprocher à ce livre qui propose de façon ludique en annexe un régime informationnel détox, d'avoir choisi le prisme spécifiquement écologique et de sauvegarde de la planète, pour aborder la question de la presse, évacuant dès lors les questions suscitées par les journalistes que sont également les lanceurs d'alerte. Enfin dans ses conclusions, Anne-Sophie Novel enjoint le lecteur-consommateur de médias à croiser et vérifier ses sources... Outre qu'il peut lui-même publier ses infos, le voici reprenant une des tâches imparties au journaliste! Coincée entre intelligence artificielle et lecteur-auditeur potentiel média-bricoleur, cette profession semble également une espèce... en voie de disparition. Anne-Sophie Novel: Les médias, le monde et nous (Domaine du possible/Actes Sud)