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Fondée en 1129, l'abbaye de Parc, du nom du domaine de chasse cédé à Norbert de Gennep par le duc de Louvain, magnifique ensemble qui a gardé son bâtiment roman originel ainsi que toutes le ailes et abbatiale successives qui se sont ajoutées au cours du temps, a préservé intact sa ferme ses étangs et son... parc magnifique ainsi que son verger au coeur de la cité louvaniste. Elle a ainsi résisté à la Révolution Française (qui lui dérobera tout de même bien des trésors)- et aux deux Guerres mondiales- malgré l'incendie de Louvain durant la Première, et grâce à l'intervention du duc d'Arenberg, allemand, au cours de la Deuxième. L'institution religieuse appartient toujours à l'ordre des Prémontrés, du nom du petit village où Norbert de Gennep, originaire de Xanten en Allemagne, se voit autorisé par l'évêque de Laon (en Picardie) à fonder une congrégation portée sur les fonds baptismaux la veille de Noël 1121. Il essaimera dans les Pays-Bas d'alors (incluant Belgique et Hollande) mais aussi en Allemagne, Autriche et même en Angleterre ainsi qu'en... Wallonie à Bonne-Espérance près de Binche, au Roeulx et à Liège notamment. L'exposition commémorant les 900 ans met en lumière la vie de Norbert, dont la conversion à lieu suite à une chute de cheval, ceci après avoir présenté une maquette interactive de l'abbaye louvaniste. Sa vie est notamment illustrée par une étude de Rubens ou un très grand tableau de Cornélis De Vos en 1630, lequel met en scène les autorités de la ville d'Anvers remettant les sacrements liturgiques à Norbert avec pour décor l'abbaye locale détruite depuis, et, pour fond historique, l'hérésie de Tanchelm (prêcheur anversois qui prôna un retour à la simplicité dans l'Église). Parmi les joyaux présentés dans une pénombre emplie de ferveur (l'abbaye est toujours en activité et dotée désormais d'une micro-brasserie), celui qui évoque notamment la promesse de protection faite à l'ordre des Prémontrés par Frédéric Barberousse à l'abbaye de Parc en 1154: un document en latin remarquablement préservé. À l'intérieur du cloître, l'on peut admirer les 41 vitraux de Jan de Caumont, réalisés au milieu du 17e siècle afin de célébrer la vie du fondateur. Il a fallu attendre la fin du vingtième siècle pour qu'ils soient à nouveau réunis suite à l'éparpillement résultant des pillages de la Révolution française. Autre merveille, qui signale l'apogée de l'abbaye au moment du Baroque et de la Contre-Réforme, le remarquable plafond sculpté, sorte de retable plafonnier décorant le réfectoire: il est en stuc, signé Jan Christian Hansche et raconte des scènes de repas de l'Ancien et du Nouveau Testament: les disciples d'Emmaüs, la Samaritaine ou les Trois anges visitant Abraham. Entièrement restauré, alors que les panneaux de peintures, de qualité, notamment des bouquets de fleurs anonymes, doivent encore l'être. Tout comme celles de Jean Coxie qui ornent les appartements du père-abbé et content une fois encore la vie de Norbert: adjacente, la magnifique chapelle privée datant du 18e et une bibliothèque elle aussi... religieusement conservée. Combinant objets, oeuvres et documents d'époque avec des bornes interactives dernier cri, l'exposition présente encore d'énormes livres de comptes qui représentent la ville de Diest et l'Abbaye d'Averbode ou celle bien sûr de Parc. Des peintures de valeur ornent d'ailleurs les cimaises comme ce "Saint Jérôme" sorti des ateliers de Joos van Cleve et, du maître lui-même, un saint Norbert, tandis que dans la salle évoquant la dévotion privée trônent une Vierge à l'enfant lumineuse d'Antoon van Dijk et un Couronnement de Saint Antoine de David Teniers. Dans la bibliothèque, même ravissement que dans le réfectoire: le plafond y est décoré de statues en stuc - des bas-reliefs aériens, oeuvre du même auteur, qui mettent en scène le fondateur des prémontrés Norbert en compagnie de diverses figures saintes. Les oeuvres présentées dans l'expo viennent de Tongerlo, Averbode, des musées d'Anvers ou de Gand, voire de la Bibliothèque royale dans le cas d'ouvrages enluminés, notamment une Bible de l'abbaye de Bonne-Espérance datant du 12e siècle, qui côtoie un énorme et magnifique antiphonaire de 1522 et un missel enluminé de 1539. Enfin, l'abbatiale d'un style baroque de la contre-réforme très romain d'aspect (comme l'ancienne église des prémontrés à Liège) voit son choeur empli de peintures (évoquant la vie de... Norbert) signées Verhaegen, dernier héritier de la tradition rubensienne qui rehaussent les sculptures, oeuvres du Bruxellois Jean Berger. Apothéose de ce temple de l'art religieux dont la préservation au cours de ces neuf siècles a en effet quelque chose de... miraculeux.