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Paris dispose aujourd'hui d'un nouveau pôle pour les amateurs d'art. Édifice circulaire du 18e siècle, la Bourse de commerce est idéalement située, à deux pas des Halles et du Centre Pompidou. Soit dit en passant, ce dernier fermera ses portes pour rénovation pendant quatre ans en 2023 et rouvrira en grandes pompes en 2027, à l'occasion de son 50e anniversaire. Entre-temps, l'ancienne Bourse de commerce a été brillamment transformée en un musée accueillant une partie de la gigantesque collection du milliardaire français François Pinault. Succès assuré donc, à en croire les longues files d'attente à l'entrée du nouveau musée. Une patience récompensée une fois à l'intérieur, puisque les visiteurs se retrouvent d'entrée subjugués par cette magnifique rotonde baignant dans la lumière du jour. L'artiste suisse Urs Fischer les y accueillent avec une installation aussi déchirante que monumentale, basée sur la fameuse sculpture du 16e siècle de Giambologna (Jean de Bologne des Flandres), L'Enlèvement des Sabines. Une expérience extraordinaire dans cette salle à la coupole ornée de fresques peintes en 1889, à l'occasion de l'Exposition universelle de Paris. L'exposition se poursuit ensuite aux différents étages de la rotonde. Les quelques 10.000 oeuvres de plus de 400 artistes collectionnés par Pinault au cours de plusieurs décennies (le milliardaire français vient de fêter son 85e anniversaire le 21 août dernier!) ont été achetées par l'homme lui-même. François Pinault ne s'impose qu'un seul critère: il faut que l'oeuvre lui parle, le touche. Il peut ainsi rester immobile de longues minutes, voire des heures devant une oeuvre, et réfléchir pendant des jours avant d'éventuellement l'acheter. Mais une fois que l'artiste a gagné sa confiance, le collectionneur le suit de près. L'un des heureux protégés de Pinault n'est autre que Luc Tuymans, déjà honoré par une magnifique exposition solo il y a deux ans dans le Palazzo Grassi vénitien, que le journal du Médecin a d'ailleurs couvert. La Bourse de commerce démarre sa nouvelle vie par une exposition où Pinault joue sur tous les registres. Judicieusement appelée Ouverture, l'événement accueille ainsi des oeuvres de 32 artistes proches de François Pinault. Parmi eux, quelques grands noms comme Martial Raysse, Maurizio Cattelan, Marlene Dumas, Thomas Schütte, etc., mais aussi des dieux plus discrets du club très select de François Pinault. Deux pensées nous traversent l'esprit lors de la visite: l'art figuratif est de retour et l'art de l'installation n'est jamais parti. Ces deux courants servent de fil rouge tout au long de cette exposition. S'il fallait trouver un mot pour qualifier l'ensemble, ce serait peut-être l' aliénation. Un sentiment qui représente parfaitement l'oeuvre de Luc Tuymans, cet artiste anversois dont la quête n'a jamais été celle de la beauté, mais bien du mystère, de la part sombre et indicible de chaque être humain. Dans cette ouverture, vous pourrez admirer cinq oeuvres de Tuymans. Pinault ne s'intéresse pas seulement à la peinture ou à l'installation, mais également à la photographie. Un art qui, ici aussi, rend compte d'un monde hostile, où l'être humain est livré à lui-même et aux forces obscures qui le gouvernent. Ouverture répond ainsi aux attentes les plus folles. Si vous voulez vous rendre compte de la puissance des derniers courants de l'art contemporain, il faudra désormais vous rendre à la Bourse de commerce de Paris. Prévoyez quelques heures pour venir à bout de l'exposition, mais pas de panique en cas de fringale, Michel et Sébastien Bras, chefs de Laguiole aux deux étoiles, vous réservent des mets à la hauteur des oeuvres susmentionnées. Leur restaurant La Halle aux Grains est niché au dernier étage de l'édifice. La classe mondiale! Vous y jouirez en outre d'une vue imprenable sur Paris. Mieux vaut réserver à temps!