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Quand le rédacteur en chef de The French Dispatch (comme The French Paradox? ), antenne française du Evening Sun de Liberty dans le Kansas, qui consacre ce supplément du dimanche à la culture française et à la France où il vit... meurt soudainement, les journalistes américains qu'il avait recrutés des années durant pour assouvir son fantasme hexagonal, lui rendent un dernier et vibrant hommage sous forme de longs papiers sur cette ville d'Ennui-sur-Blasé où il a vécu des décennies durant. L'un écrit un ample article sur un peintre génial et... psychopathe qui, depuis sa prison, peint la jolie gardienne dont il s'est entiché ; la seconde pose un regard sur la révolte étudiante qui secoue la ville ; le troisième évoque le souvenir du rapt du fils du commissaire, sauvé par le talent du cuisinier personnel et d'origine japonaise du policier, l'excellent Nescoffier. Joyeusement référentiel, plein de clichés comiques et volontairement absurdes quant au regard anglo-saxon sur la culture et la mentalité française ( concernant la nourriture, la révolte, le sexe...), le film à sketchs du Texan Wes Anderson ne tranche pas avec sa production habituelle, maniaque, inventive, laissant peu de place à l'improvisation mais beaucoup à son inspiration de cinéaste et de scénariste. Fourmillant de détails (le peintre fou et emprisonné fument des "Gaulistes"! ) au point qu'il vaudrait mieux voir le film deux fois afin de saisir toutes les finesses de ce réalisateur tatillon, le film qui mêle décors studio surtout (à Angoulême) et animation (toujours dans la cité de la bédé) et se veut, outre un hommage à la France vintage, également un bel hommage au slow journalisme de l'hebdomadaire intellectuel libéral The New Yorker, est porté par une impressionnante brochette d'acteurs dont Benicio del Toro, Mathieu Amalric, Léa Seydoux, Cécile de France (sans doute pour son nom et le fait qu'elle soit une Française rêvée), Guillaume Gallienne, Timothée Chalamet et les habituels Willem Dafoe, Adrian Brody, Edward Norton, Jarvis Cocker pour la musique (qui reprend Aline de Christophe), Bill Murray - bien entendu - et la toujours formidable Tilda Swinton. En conférencière guindée, elle se livre à une imitation hilarante de Margaret Thatcher. Comme toujours avec Anderson, ce film suscitera autant d'enthousiasme chez certains que d'ennui chez d'autres. Mais ce qui est désormais certain, à la lecture de ce nouveau "journal", c'est que le réalisateur de La vie aquatique n'est pas prêt de changer son style... d'écriture.