Le 1er février, la Chambre des représentants a approuvé en séance plénière le texte d'un projet de loi modifiant la Loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient et modifiant les dispositions en matière de droits du patient dans d'autres lois en matière de santé [1]. Celui-ci a été soumis par le vice-Premier ministre et ministre des Affaires sociales et de la Santé publique Frank Vandenbroucke. Il a été établi en réponse à une résolution du Parlement fédéral du 15 décembre 2002 qui invitait le gouvernement à revoir en profondeur la Loi relative aux droits du patient qui avait plus de 20 ans.
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Le projet s'articule autour de trois axes de réforme: les droits du patient pour le patient et dans l'intérêt du patient (I), les droits du patient conjointement avec le patient (II) et les droits du patient par le patient (III). Sans prétendre à une exhaustivité complète, nous proposons de présenter les grandes lignes de ladite réforme. Le premier axe de réforme vise à renforcer dans la loi l'approche centrée sur le patient, lequel est invité à prendre un rôle plus actif dans sa prise en charge. Les auteurs de la nouvelle loi soulignent que la prestation de soin de qualité est une prestation axée sur le patient. Pour ce faire, il appartient au prestataire de soins, dans le cadre de sa liberté thérapeutique, de tenir compte des objectifs et des valeurs du patient, qui doit avoir la possibilité de les expliciter et d'en discuter avec son prestataire de soins. Ainsi, la loi précise que, lors de leurs concertations, le professionnel des soins de santé s'informe de la situation et des préférences en matière de soins actuels et futurs du patient. La nouvelle loi permet aussi au patient majeur incapable d'exprimer sa volonté de se faire davantage entendre en vue d'aboutir autant que possible à une prise de décision conjointe entre celui-ci et son représentant. Eu égard à la volonté d'impliquer le patient, les concepts de "planification anticipée des soins" et de "déclaration anticipée", introduites par la nouvelle loi, jouent un rôle central. La planification anticipée implique la mise en place délibérée d'un processus de réflexion et de communication sur les objectifs de vie et les valeurs préférentielles du patient, sans que n'en découle un quelconque effet juridique contraignant. La déclaration anticipée vise quant à elle la fixation par écrit de la volonté du patient au cas où celui-ci ne pourrait plus décider pour lui-même. Elle permet ainsi de continuer à offrir des soins de santé ciblés et axés sur le patient, même dans l'hypothèse où ce cas de figure surviendrait. Ce principe, qui n'était mentionné que de manière marginale dans la loi de 2002, est maintenant consolidé et bénéficie ainsi d'un cadre juridique. Les auteurs du texte insistent aussi, et cela est essentiel, sur la nécessaire collaboration entre le patient et le prestataire de soins, les soins de santé de qualité étant le résultat d'une interaction entre ces deux acteurs. Outre l'importance donnée à la figure du patient, la nouvelle loi modernise et précise le rôle de la personne de confiance et du représentant d'une part, et des proches du patient d'autre part. Alors que la personne de confiance est celle qui assiste le patient dans l'exercice de ses droits en tant que patient, le représentant peut, lui, exercer les droits du patient lorsque celui-ci n'est plus en mesure de les exercer lui-même. La nouvelle loi clarifie la définition, la désignation, l'étendue des compétences et de l'intervention de la personne de confiance et du représentant. Ainsi, par exemple, il est précisé que le patient décide de la portée de l'implication de la personne de confiance dans ses droits. Le praticien professionnel prend note de son identité et de l'étendue de sa compétence dans le dossier du patient. Par ailleurs, la personne de confiance et le représentant peuvent à présent être désignés de manière électronique par le patient. Aussi, les auteurs de la loi relèvent que la pratique montre une présence importante des proches du patient, que ce soit des amis, des membres de la famille, des représentants du patient. Dorénavant, à la demande du patient, le prestataire de soins consulte les proches désignés par lui. Le patient incapable d'exprimer sa volonté pourra par ailleurs demander que le représentant se concerte avec ses proches lorsqu'il exerce ses droits. Ce renforcement s'illustre aussi par un droit de consultation direct au dossier du patient et un droit d'en obtenir copie dans le chef du représentant du patient mineur d'âge décédé et de ses parents jusqu'au deuxième degré inclus (la demande de ces derniers doit toutefois être suffisamment motivée et spécifiée). Désormais, les proches d'un patient mineur ou majeur décédé peuvent également déposer plainte auprès d'une fonction de médiation lorsque cela s'avère nécessaire. Enfin, les modifications apportées par la loi tendent à améliorer la capacité des patients à prendre le contrôle de leurs soins. L'information est primordiale à cet égard, tenant compte du fait toutefois que ces informations ainsi que la manière dont elles sont communiquées doivent être adaptées à la situation personnelle du patient et ce, en vue de fournir des soins de santé ciblés.Concernant les modalités de communication de l'information, les travaux préparatoires évoquent notamment l'utilisation de nouvelles applications technologiques pour améliorer la performance de la communication. Ils mentionnent aussi, bien que cela ne soit pas prévu explicitement par la loi, la possibilité pour le patient d'enregistrer l'entretien avec le professionnel des soins de santé, moyennant son consentement, afin de pouvoir réécouter ultérieurement les informations fournies. La loi impose au professionnel de prévoir suffisamment de temps pour communiquer les informations de manière qualitative au patient et l'inviter à poser des questions. En outre, en ce qui concerne l'exception thérapeutique, une précision est apportée par la nouvelle loi: le prestaire doit examiner si l'information peut être communiquée graduellement et doit vérifier si le préjudice, empêchant la communication de l'information, est toujours présent. En effet, selon les auteurs de la loi, l'expérience a appris que des situations dans lesquelles une exception thérapeutique doit être envisagée ne sont pas toujours en "noir et blanc" et peuvent évoluer avec le temps. La nouvelle loi promeut par ailleurs plus de transparence à l'égard du patient. Ainsi, à titre d'exemples, le prestataire de soins doit informer le patient s'il ne répond plus aux conditions d'exercice de sa profession, le patient a le droit de s'informer sur la qualification et l'expérience du professionnel et le prestataire a l'obligation active d'informer le patient sur les répercussions financières d'une intervention. La loi apporte en outre des nouveautés concernant le dossier médical. Le patient peut désormais, lorsqu'il consulte son dossier médical, avoir accès aux annotations personnelles du professionnel de soins de santé. Le patient peut demander une explication quant au contenu du dossier médical le concernant et a le droit d'en avoir une première copie gratuite sous forme papier ou électronique. La loi accorde la possibilité au patient d'accéder par voie électronique à ses données de santé (la disposition prévoyant cela entrera toutefois en vigueur à une date ultérieure fixée par le Roi). L'exposé des motifs de la nouvelle loi insiste sur l'importance accordée à la sécurité et la traçabilité de ces données.