Pour son premier film européen, le Japonais Hirokazu Kore-Eda filme Catherine Deneuve en star vieillissante, dont le pire rôle fut celui de mère, confrontée aux reproches de sa fille, interprétée par Juliette Binoche. Pas un mauvais film, mais le réalisateur japonais, ne maîtrisant pas le français, semble parfois un peu hors-champ... lost in translation.
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Désormais scénariste à New York, Lumir débarque à Paris en compagnie de son mari, Hank, acteur de deuxième zone, et sa fillette Charlotte, afin de célébrer la sortie du livre de sa mère, Fabienne Dangeville, icône du cinéma vieillissante, égoïste, jalouse, et - semble-t-il -, revenue de tout. L'ouvrage parait - un tissu d'affabulations-, lequel devient très vite sujet de tension entre mère oublieuse, blasée, fille écorchée (la première écrit qu'elle conduisait tous les jours sa fille à l'école, ce qui n'est jamais arrivé précise la deuxième), et provoque la démission du secrétaire particulier de la star, mentionné nulle part dans le livre qui raconte pourtant par le détail quarante ans de carrière... Entre scènes de plateau (tournage d'un film sur une vedette de cinéma vieillissante confrontée à une version plus jeune, et donc triomphante, d'elle-même) et maison avec parc adossé à une prison - sans doute pour appuyer le huis clos (de circonstance ! ) -, les rancoeurs et minidrames vont faire apparaître des petits secrets de famille, souvent source de grandes incompréhensions.... Premier film français pour le réalisateur japonais Hirokazu Kore-eda, Palme d'or à Cannes en 2018 avec Une affaire de famille (critique acerbe de la société japonaise très mal accueillie dans l'archipel), La vérité ne manque pas certes d'implacable froideur (la Deneuve à l'ancienne ? ) mais manque souvent d'émotions, mis à part la scène finale et une autre de jeu lors du tournage en abîme inséré dans ce long-métrage. La faute sans doute au fait que le réalisateur ne comprenne pas le français. Reste que le film n'ennuie pas, même s'il n'offre pas de grands transports. Ceci sans doute grâce à une interprétation de premier choix : de Catherine Deneuve, qui ne doit pas se forcer en icône vieillissante et massacrante, à Juliette Binoche que l'on voit beaucoup et dont le jeu s'étoffe avec l'âge à l'image de la grande Catherine (elle jouait elle-même le rôle de star capricieuse rattrapée par l'âge dans Sils Maria d'Olivier Assayas il y a six ans), en passant par Manon Clavel : révélation du film qui capte à la fois la lumière, tout en jouant avec un naturel et un aplomb confondants face aux deux grandes comédiennes. Aux côtés de ses femmes magnifiées par Kore-eda, c'est peu dire que les personnages d'hommes sont falots, ce qui ne veut pas dire que ceux que les interprètent le sont : Ethan Hawke, parfait en ancien espoir masculin sans illusions ; et surtout trois comédiens belges, de trois générations différentes à l'affiche d'un film japonais ! Le vétéran Roger Van Hool en hirsute père de Lumir, Christian Crahay en compagnon discret de l'autoritaire actrice, et Laurent Capelutto qui s'offre la première scène avec Deneuve, en tant que journaliste interviewer : une confrontation auquel l'acteur belge s'est déjà livré dans Le Conte de Noël de Depleschin voici douze ans aux côtés de Mathieu Amalric. Le réalisateur nippon a peut-être songé à lui en voyant le film du Nordiste, lequel évoquait également les relations difficiles entre une mère et un fils cette fois. Sauf que le spectateur y avait l'impression d'évoluer au coeur de cette belle maison de maître roubaisienne et pas, comme dans celui-ci, de regarder ce qui s'y passe depuis l'extérieur... derrière une vitre.