Après de longues négociations entre le gouvernement fédéral et les Communautés, un nouvel accord a été trouvé concernant les numéros Inami, avec une augmentation de la proportion de médecins généralistes formés. Reste qu'une commune sur deux est en pénurie en Wallonie. Quelle est la stratégie de la Région?
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Dans le dernier recensement de l'Aviq en 2021, une commune wallonne sur deux se trouve en pénurie. La densité médicale - le nombre de médecins généralistes par rapport à la population - y est de moins de 90 généralistes pour 100.000 habitants. "Le problème ne concerne plus le nombre de praticiens formés, mais plutôt le choix de leur lieu d'installation", considère Valérie Glatigny, ministre de l'Enseignement supérieur de la Fédération Wallonie-Bruxelles. "Il est indiscutable qu'il existe un déficit criant de généralistes dans certaines zones rurales ou certains quartiers de la Région wallonne. Pour remédier à cette situation, il ne servira à rien d'augmenter sans fin le nombre de médecins diplômés s'ils vont tous s'installer dans la même région. Il y aura là un point à régler avec les Régions et les pouvoirs locaux. Ces derniers ont la possibilité de prévoir des incitants pour attirer des praticiens dans les zones en pénurie."Le choix de la commune d'installation par les nouveaux médecins est une question majeure. Une solution, d'application dans d'autres pays, serait de lier octroi du numéro Inami et territoire. Ce n'est pas le cas, pour l'heure, en Belgique. "C'est une formule qui aurait pu être envisagée, qui aurait apporté des solutions", reconnaît Christie Morreale, ministre wallonne de la Santé. Cette dernière n'oublie cependant pas les médecins qui cessent leurs activités ou se réorientent, dans les communes en pénurie comme dans celles qui ne connaissent pas de problème de densité médicale. " Il y a une attention particulière à apporter sur le remplacement des médecins dans les 130 communes qui sont en pénurie de médecins généralistes, mais il y faut également s'assurer que, là où le taux de couverture est correct, il le reste."Si l'on estime le déficit en médecins généralistes et que l'on ne tient pas compte des médecins de plus de 70 ans, qui ont souvent une activité plus limitée, la Région wallonne estime qu'il manquerait, pour le moment, 360 médecins pour l'ensemble des communes en pénurie. "Il faut dès lors former plus de médecins généralistes pour combler la pénurie actuelle, tout en remplaçant, chaque année, les médecins qui cessent leur activité. Par exemple, pour 2021, il y a 205 médecins généralistes qui ont arrêté leur activité dans notre Région", remarque Christie Morreale. Il faut aussi prendre en considération les besoins d'autres services puisque des médecins généralistes sont aussi appelés à travailler notamment dans des structures hospitalières pour assurer les gardes, en médecine scolaire, dans les centres de transfusion sanguine, à l'ONE, en milieu carcéral, dans les maisons de repos, dans les structures d'hébergement pour personnes en situation de handicap ou avec des problèmes de santé mentale, au sein de l'Aviq, ou encore dans les mutuelles. "L'équation est bien plus complexe que de faire matcher le nombre de médecins généralistes formés et le nombre répertorié de médecins nécessaires pour couvrir les territoires en pénurie", acquiesce la ministre. Outre ces considérations spécifiques, le gouvernement a développé plusieurs mesures pour limiter les cessations d'activité et essayer d'inciter à l'installation dans les zones qui sont en réelle pénurie. Impulseo, qui consiste pour rappel en une prime qui vise à encourager l'installation de médecins généralistes dans des zones en pénurie, fait partie de ces mesures. Le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) promeut également l'installation de médecins généralistes, particulièrement en zones rurales, par le biais des Associations de santé intégrée (ASI). Une mesure de programmation qui a été prolongée dans le cadre de la Politique agricole commune pour 2023-2027. Si les communes rurales sont impactées, c'est également le cas de certaines villes. "Il existe, sur la ville de Liège, des endroits et des quartiers dans lesquels il y a des couvertures de médecins qui sont significativement moindres que sur l'ensemble de la ville", explique, à titre d'exemple, la ministre Morreale, qui se console en notant l'évolution du nombre de jeunes médecins s'installant en Wallonie. En 2019, 131 nouveaux médecins de moins de 30 ans se sont installés en Wallonie, contre 86 en 2018 et 57 en 2017. On notera tout de même que l'embellie n'est qu'éphémère puisque cette soudaine augmentation coïncide avec la double cohorte de 2018. Pour le reste, la ministre attend les recommandations issues des Assises de la première ligne, dont les premiers groupes de travail ont démarré le 8 juin. "On agit avec des bouts de ficelles en fonction des compétences que l'on a en Région wallonne alors que le problème de base se trouvait en amont dans ces numéros Inami", justifie la ministre, réjouie donc de l'accord intervenu sur les numéros Inami. "Je pense que c'est une énorme épée de Damoclès qui pesait sur la tête des francophones et des citoyens wallons en particulier. Pour moi, c'est vraiment une très belle avancée. On va pouvoir avoir des perspectives. Nous ferons notre travail avec les sous-quotas. Nous discuterons avec la Communauté française. On va pouvoir enfin libérer le nombre de médecins qui vont sortir, y compris les généralistes."