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Avant tout, le Dr Raes nous rappelle la gravité de l'infection à rotavirus. Avant la généralisation de la vaccination, le rotavirus était l'agent étiologique le plus important de gastro-entérite aiguë à l'échelle mondiale, provoquant chaque année plus de 500.000 décès de jeunes enfants dans le monde(1). Dans les pays industrialisés, où les populations disposent de meilleurs soins de santé, le rotavirus n'était pas tant responsable de décès, mais bien d'une haute charge de morbidité et d'un besoin régulier d'hospitalisation pour réhydratation. Le Dr Raes souligne qu'avant l'introduction du vaccin en Belgique, les infections à rotavirus ont été responsables de 6.790 hospitalisations en moyenne par an, entre 2000 et 2005, parmi les enfants de moins de 5 ans(2). Une hospitalisation pouvant durer de trois à cinq jours, il en résultait malgré tout un lourd coût et une charge pesante pour la société, sans oublier la souffrance de l'enfant et de la famille. Depuis 2006, nous disposons en Europe de deux vaccins (vivants atténués) oraux très efficaces et sûrs. Rotarix est un vaccin monovalent, dont les deux doses doivent être administrées par voie orale à partir de l'âge de six semaines, moyennant un intervalle de quatre semaines entre les doses. RotaTeq est un vaccin pentavalent, dont les trois doses doivent être administrées par voie orale à partir de l'âge de six semaines, moyennant un intervalle de quatre semaines entre les doses. Depuis la recommandation formulée en 2006 par le Conseil supérieur de la santé, le vaccin contre le rotavirus fait partie du calendrier vaccinal de base des nourrissons en Belgique. Les vaccins peuvent être administrés en même temps que d'autres vaccins pédiatriques. En Belgique, on suit un schéma de 8-12 semaines pour Rotarix et de 8-12-16 semaines pour RotaTeq. À l'heure actuelle, le vaccin n'est pas encore gratuit comme d'autres vaccins repris dans le programme vaccinal officiel des communautés, mais il est partiellement remboursé par l'Inami. La prise du vaccin et l'impact de la vaccination ont été suivis de près depuis l'instauration du vaccin en Belgique. La deuxième année, la prise du vaccin tournait déjà autour des 90%, niveau auquel elle s'est d'ailleurs maintenue jusqu'à aujourd'hui. Une étude d'impact belge (RotaBIS) a évalué l'effet de la vaccination sur les hospitalisations liées au rotavirus chez les enfants jusqu'à l'âge de cinq ans sur une période de 13 ans(3). Les données montrent que le nombre annuel d'hospitalisations a baissé de 70% cinq ans après l'introduction du vaccin, et de 84% après dix ans. La surveillance épidémiologique du rotavirus par Sciensano confirme, elle aussi, une diminution significative du nombre de cas confirmés d'infections à rotavirus depuis l'introduction du vaccin(4). À ce jour, le suivi de la circulation des génotypes n'indique pas l'émergence de nouveaux génotypes ou de nouvelles souches susceptibles de diminuer l'efficacité des vaccins actuels. Des études réalisées dans d'autres pays mettent également au jour une baisse significative du nombre d'hospitalisations dues au rotavirus. Les études conduites dans des pays confrontés à une mortalité élevée due au rotavirus, comme le Mexique, ont établi d'impressionnantes régressions de la mortalité après l'introduction du vaccin. Les données de vie réelle confirment donc la haute efficacité qui avait déjà été démontrée au cours du développement clinique des deux vaccins. Le profil de sécurité et l'efficacité a été évalué en profondeur lors d'études cliniques des vaccins, incluant au total plus de 60.000 enfants pour chaque vaccin. Les deux vaccins contre le rotavirus ont peu d'effets indésirables et sont bien tolérés. Les études cliniques n'ont pas davantage révélé de risque accru d'invagination intestinale en réaction à la vaccination. Ce point a bénéficié d'une attention particulière lors des études, car un vaccin contre le rotavirus précédemment autorisé aux États-Unis (RotaShield) a été retiré du marché en 1999 après avoir été associé à un risque accru d'invagination intestinale. Étant donné qu'une faible augmentation du risque ne peut être évaluée qu'en étudiant des populations plus importantes, tant Rotarix que RotaTeq ont fait l'objet d'études de pharmacovigilance post-commercialisation. Ce suivi permet aujourd'hui d'affirmer qu'il faut effectivement tenir compte d'une possible relation entre la vaccination et un risque faiblement accru d'invagination. Mais ce risque est minime: environ 1 à 5 pour 100.000 nourrissons vaccinés. Les autorités sanitaires, dont le Conseil supérieur de la santé belge(5), s'accordent à dire que les bénéfices de la vaccination contre le rotavirus (prévention des hospitalisations et de la mortalité) l'emportent toujours nettement sur les risques liés à une invagination. En Belgique, il est toutefois conseillé d'appliquer le schéma de vaccination complet conformément aux indications de la notice: Rotarix à 24 semaines et RotaTeq à 32 semaines. Il faut savoir que l'incidence sous-jacente de l'invagination intestinale augmente avec l'âge de l'enfant. En complétant le schéma de vaccination le plus tôt possible, on réduit donc également le risque faiblement accru d'invagination en réaction à la vaccination. Le Dr Raes conclut que les différentes études de suivi conduites dans le monde depuis l'introduction de vaccins contre le rotavirus confirment de manière convaincante que ces derniers sont très efficaces et possèdent un profil de sécurité acceptable. La planète avait grand besoin d'un vaccin contre le rotavirus. Il s'agit d'un bel exemple, où nos connaissances scientifiques et notre approche commune nous ont permis de mettre à disposition de la société un vaccin doté d'un énorme impact sur la mortalité et le taux d'hospitalisation.