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Elle démontre en tout cas la cohérence d'un homme dans son propos et son credo de départ, qui est de protéger la vie privée des citoyens, et de rendre à l'inverse publiques les agissements condamnables des états, quels qu'ils soient. L'inverse de Facebook en fait. D'autant que ce hacker de génie devenu journaliste n'est absolument pas motivé par l'argent. Qu'il soit rustre, narcissique ou autoritaire ne change rien à la validité de son action quand il défend des opposants kényans, des activistes chinois, qu'il révèle l'ampleur de l'évasion fiscale vers les îles Caïman ou au travers des Panama Papers, ou que Wikileaks dénonce les agissements de l'armée américaine en Irak ou ailleurs. Et bien sûr, quand c'est " Le pays de la liberté " qui est ainsi pointé du doigt, cela ne passe pas... Au fil des pages, l'on constate l'empressement de Google a fournir les conversations privées d'Assange et ses affidés aux services secrets américains, la pression exercée par la Grande-Bretagne, alliée servile du premier cercle, sur la justice suédoise pour qu'en 2013, elle maintienne les poursuites alors que la Suède souhaite déjà les abandonner : c'est que cette affaire de viol finalement démentie, aurait permis à l'époque d'extrader facilement l'Australien vers les États-Unis via Stockholm. Si le journaliste ne meurt pas avant, vu les conditions déplorables dans lesquelles il se trouve, celui à qui la justice anglaise reproche de ne pas s'être présenté au contrôle hebdomadaire requis (et pour cause, par crainte il s'était réfugié dans l'ambassade d'Équateur durant sept ans), Julian Assange, délaissé par une presse même rigoureuse qui craint le retour de bâton des autorités et des Gafa et livré par le nouveau président équatorien à la grande fureur de son prédécesseur, risque de devenir le symbole du martyr de nos démocraties. Des pays démocratiques qui oublient tout credo humaniste dans les faits, dès que leurs intérêts sont en jeu. Replongé désormais dans l'ignorance, le citoyen lambda préfère mettre ses photos sur Facebook, plutôt que de regarder le négatif de nos sociétés et de leurs institutions, dont il devrait pouvoir pourtant avoir, lui et seulement lui, la liberté de surveiller les agissements.