Auteur d'un timbre illustrant la problématique de l'euthanasie aux Pays-Bas, le Dr Schretlen ne manque pas de cachet.
...
Médecin généraliste hollandais à la retraite de 's-Hertogenbosch, Ignace Schretlen (71 ans) a étudié la médecine et la philosophie. Outre son travail de MG, il est également l'auteur de 20 recueils et livres. En tant qu'artiste, il réalise des projets depuis des années. L'un d'entre eux porte sur la source de la créativité et a donné lieu à des expositions dans plus de 150 lieux, dont des musées à Paris, Anvers et dans de nombreuses villes néerlandaises. Le Centre belge de la gravure de La Louvière possède d'ailleurs plusieurs de ses oeuvres. Depuis plus de dix ans, il travaille sur un projet d'art postal qui, après plusieurs refus, a été accepté par La Poste néerlandaise. Le journal du Médecin: Vous avez suivi une formation de philosophe. Pensez-vous que ce soit un aspect qui manque à la formation de médecin? Dr Schretlen: Peu avant de terminer mes études de philosophie, ma femme et moi avons repris un cabinet de médecine générale. La philosophie médicale (ma passion) s'est soudain trouvée à mille lieues de la pratique. Ce n'est que quelques années plus tard que j'ai organisé, avec deux autres personnes, un cours d'éthique pour les médecins généralistes. La formation médicale met assurément l'accent sur la réflexion. Mais le grand changement se produit après l'obtention du diplôme. C'est à ce moment-là que l'on est plongé dans le grand bain. La façon dont les médecins généralistes et spécialistes néerlandais exercent leur profession n'invite pas à la réflexion. Dans la pratique, le plus important est de suivre les directives et les normes plus ou moins obligatoires. Alors pourquoi réfléchir à ses actes? Mes critiques à ce sujet ont suscité beaucoup de colère. Il semble plus compliqué aux Pays-Bas d'être médecin et artiste qu'en Belgique? À l'âge de 19 ans, je créais et chantais mes propres chansons, je dessinais et peignais, j'écrivais des articles et mon coeur se tournait vers la littérature et la philosophie. Mon père était professeur de pédiatrie. Un diplôme de médecine offrait une plus grande sécurité de vie. Mais j'ose dire que je me consacrais corps et âme à mon travail de médecin généraliste, peut-être aux dépens de ma famille et de moi-même. Mais je n'ai pas abandonné mes autres passions. Aux Pays-Bas, les gens sont catalogués. Certains collègues estimaient qu'un médecin qui est également écrivain et artiste ne peut pas faire correctement son travail de généraliste. En Belgique et certainement en France, je pense que les médecins qui écrivent et font de l'art sont pris plus au sérieux. Vous aimez la chanson française, composez vous-même. Y aurait-il quelque chose de latin chez vous plus que "germanique"? En effet, en France, j'ai suivi une formation d'animateur dans les colonies de vacances. Au cours de cette formation, j'ai découvert la chanson sous un autre angle: en chantant ensemble. Le répertoire était également différent de ce que l'on entendait à la radio aux Pays-Bas. La chanson francophone (également de Wallonie, de Suisse et du Canada) a commencé à me fasciner de plus en plus. J'ai écrit trois recueils à ce sujet et je suis devenu le compilateur d'une émission de radio. J'ai également compilé et commenté un certain nombre d'albums. Les enregistrements de spectacles d'artistes français constituent un point fort de mon expérience musicale: parmi eux, Barbara et Léo Ferré. Mais j'ai aussi enregistré Georges Chelon. Je me rendais très régulièrement à Paris où des artistes russes, catalans, grecs et sud-américains étaient également présents à l'époque. Seriez-vous une sorte de Dick Annegarn médecin? Ou alors un Dave pédiatre? Je connais évidemment le travail de Dick Annegarn et de Dave. Et j'ai aussi connu Jacques Bedos, le directeur artistique de Polydor à l'époque où Dick Annegarn y a fait ses débuts. Nous nous sommes rencontrés à plusieurs reprises. Grâce à Jacques Bedos, j'ai également connu le travail de Maxime Le Forestier et de Jean-Michel Caradec. Depuis dix ans, j'écris un blog hebdomadaire pour les médecins. Le rédacteur en chef m'a laissé toute liberté. J'y accorde également de l'attention à l'art et à la littérature. De temps en temps, je fais référence à une chanson francophone. Je regrette d'avoir arrêté de composer et de chanter mes propres chansons. Une version pour piano de certaines chansons a récemment été réalisée par le pianiste argentin Luciano Ledesme. Pourquoi ce projet de timbre est-il si important à vos yeux? Il y a plus de dix ans, j'ai entamé mon dernier grand projet artistique ("Laagvliegers"): il comprend aujourd'hui plus de 600 cartes, plus de 100 timbres, tampons et autocollants, et environ 35 affiches. Je me tiens à l'écart du circuit commercial. Mon projet a trouvé sa place dans quelques musées (entre autres), mais il n'est pas disponible autrement. En tant qu'auteur et artiste, je cherchais un moyen d'unir le texte et l'image. Pour moi, le mail-art symbolise la communication souvent déficiente entre les gens. J'ai mis toute ma vie dans ce projet, qui fait référence à l'art et à la littérature. Depuis plus de dix ans, je travaille sur ce projet d'art postal, mais PostNL (qui gère le courrier aux Pays-Bas) a refusé plusieurs de mes projets de timbres.Lorsque la loi sur l'euthanasie a eu 20 ans aux Pays-Bas, j'ai conçu un timbre. Dans mon projet "Laagvliegers", l'indifférence humaine, le durcissement de la société et la mort sont des thèmes récurrents. Mon "timbre sur l'euthanasie" a également été refusé. Lorsque j'ai créé un puzzle à partir de la même image pour ajouter une dimension au timbre, il a enfin été autorisé à être imprimé et diffusé.